Ça y est ! Les alternatives aux néonicotinoïdes contre les pucerons de la jaunisse sont là. Il y en aurait même 22 selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). C’est en tout cas ce qu’ont pu croire nombre de personnes qui ont lu en diagonale les articles de la presse grand public. Dans son communiqué, l’Anses précise pourtant bien que « ces solutions alternatives qui présentent des efficacités correctes mais insuffisantes en utilisation seule, nécessiteront une approche de lutte intégrée pour atteindre une efficacité suffisante, voire une évolution des pratiques culturales ».
L’agence a en fait étudié 3 800 publications scientifiques et a repéré « quatre solutions à court terme » : deux phytosanitaires conventionnels (flonicamide et sprirotétramate que les planteurs connaissent sous le nom de Movento et Teppeki), et deux méthodes culturales à partir du paillage et de la fertilisation organique.
Les 18 autres méthodes ou produits alternatifs aux néonicotinoïdes devraient être disponibles « dans un délai de deux à trois ans », d’après le rapport. Ces autres moyens de lutte comprennent des phytosanitaires de synthèse et d’origine naturelle, des microorganismes, des insectes prédateurs ou parasitoïdes des pucerons, des huiles organiques et minérales, des stimulateurs de défenses des plantes, la sélection de variétés de betteraves résistantes aux virus de la jaunisse, et des méthodes culturales reposant « sur des associations végétales favorisant les effets d’évitement de la plante hôte (betterave) ou le renforcement du contrôle biologique des pucerons par les ennemis naturels (auxiliaires de culture) présents localement ».
Informations énormément politiques
Quand on les regarde de plus près, on s’aperçoit que les quatre solutions immédiates sont peu efficaces. Alexis Hache, planteur dans l’Oise et président de la commission environnement de la CGB n’est pas du tout convaincu. « Où va-t-on trouver du paillage pour protéger 400 000 ha de betteraves ? Cela va faire du volume ! Et à quel coût ? L’Anses n’a pas chiffré cette mesure. La durabilité de la filière, c’est aussi l’économie ».
Quant à la fertilisation organique qui changerait l’appétence de la plante vis-à-vis des pucerons, une partie de la sole betteravière reçoit des fumiers de volaille. « Encore une fois, ces amendements ne sont disponibles à l’infini », poursuit Alexis Hache. « L’autre mesure, c’est l’utilisation du Teppeki et du Movento dont on sait pertinemment que cela ne marche pas, puisque nous avons eu l’année dernière une perte de 750 M€ pour la filière. On a l’impression que ces solutions ne sont pas à la hauteur des enjeux ».
Et Alexis Hache de conclure : « les informations qui sont distillées par l’Anses sont énormément politiques et très peu scientifiques ». Mais ces annonces vont obliger les représentants de la filière betterave-sucre à argumenter encore pour obtenir une dérogation en 2022.