Quel est le rapport entre la bataille des Ukrainiens et des Russes pour le contrôle de la ville de Kherson, la forte demande de trituration de canola au Canada, la hausse des importations chinoises de soja au Brésil et l’augmentation des exportations d’huile de palme malaisienne vers l’Inde ? Pas grand-chose au premier abord. Et pourtant, ce sont autant de facteurs qui déterminent les prix actuels des graines de colza et de tournesol en Europe, et de soja aux États-Unis. Et in fine des cours mondiaux des oléagineux dont le volume global atteint 650 millions de tonnes, dont 390 Mt de soja, 85 Mt de colza et 50 Mt pour les graines de tournesol. Des chiffres gigantesques alors que pourtant les stocks sont très bas, de l’ordre de 7 Mt pour le colza et le tournesol, selon les statistiques de l’Union européenne.
Résultat : les prix mondiaux des oléagineux restent stables. Le 25 octobre, la graine de colza affiche 643 €/t sur le marché physique Fob Moselle, équivalent à celui observé deux semaines plus tôt, avec un accès de faiblesse entre les deux, vite résorbé. La graine de tournesol rendue à Saint-Nazaire se négocie à 735 €/t, alors qu’elle avait chuté à moins de 700 € dans les semaines précédentes, résultat d’une forte hausse des huiles sur les marchés mondiaux, et de la difficulté pour l’Ukraine à exporter sa récolte, avec les obstacles rencontrés sur les chargements des navires en mer Noire et des contrôles tatillons en Turquie, qui joue toujours un jeu trouble dans le conflit russo-ukrainien.
Aux États-Unis, les cours du soja évoluent façon mer d’huile, autour de 500 $/t sur le marché de Chicago, un chiffre constant depuis des mois et qui n’a pas connu les fortes hausses du colza et du tournesol comme en Europe. Mais cette stabilité n’est qu’apparente. Car la forte hausse du dollar, de l’ordre de 20 % avec l’euro, mais aussi avec les monnaies des pays importateurs comme la Chine, entraîne une hausse du coût des importations, à tel point que l’Argentine a mis au point un mécanisme de compensation pour soutenir ses exportations.
Enfin, le Canada, avec sa récolte de canola attendue de 19 Mt, affiche aussi des prix soutenus. Les usines de trituration canadiennes, qui avaient souffert de la faible récolte l’an dernier, peuvent à nouveau tourner à plein, avec des marges solides. Et les exportations canadiennes vers l’Europe ont repris, ce qui soutient la valeur. Comme les usines européennes et françaises de trituration peuvent aussi réaliser de belles marges, elles achètent les graines à un niveau supérieur d’environ un tiers par rapport à la moyenne quinquennale…