L’année 2021 a été « une année normale ou presque, grâce au retour des néonicotinoïdes », a déclaré le directeur de la CGB Aisne, Emmanuel Pigeon, en introduisant la conférence annuelle de la Confédération régionale, le 9 septembre dernier, à Laon. Avec les prix qui sont remontés entre 29 et 30 €/t, le chiffre d’affaires betteravier retrouve quelques couleurs, même si les coûts de production ont déjà été impactés par la crise énergétique !
« Le marché du sucre permet une bien meilleure rémunération des betteraves », s’est félicité Guillaume Gandon, président de la CGB Aisne. Ces prix plus élevés devraient freiner la baisse des surfaces dans le département.
Mais l’avenir est plus incertain. « Après avoir traversé une des pires sécheresses, les rendements ne seront pas à la hauteur de nos attentes : ils pourraient être en dessous de la moyenne des 5 dernières années à hauteur de – 10 à – 15 %. Force est de constater que l’irrigation est désormais nécessaire en terres à faible réserve hydrique », a poursuivi Guillaume Gandon.
La plus grande incertitude provient du prix du gaz. Le marché des engrais est très compliqué. « Il n’y a plus de production d’engrais azoté sur la base du gaz en Europe. Les usines sont à l’arrêt. Nous allons vers une pénurie. Ce n’est plus une question de prix mais de disponibilité de produit », a prévenu David Deroi, directeur des achats fertilisants du groupe Seveal.
Le prix du gaz a aussi un impact sur la date de début de campagne, qui a dû être avancée. Beaucoup d’usines de déshydratation de pulpe ne pourront pas tourner au gaz. « Les coûts de production de la betterave explosent de + 30 à 35 % pour 2023 », a calculé Timothé Masson. L’économiste de la CGB redoute la pression des cultures alternatives moins dépendantes de la conjoncture gazière. « Si l’on regarde les prix sur lesquels un agriculteur peut actuellement se positionner, pour dégager la même marge en 2023, la betterave devrait être payée 36 €/t pour être équivalente à un blé, 37 €/t à un colza et 39 €/t à un maïs ».
Le nouveau directeur de la CGB, Nicolas Rialland a passé en revue les défis et les opportunités. Le premier concerne les néonicotinoïdes. À court terme, il s’agit d’avoir une dérogation en 2023, comme les deux années précédentes. « On peut être confiant sur l’aboutissement de la dérogation, mais elle n’interviendra pas plus tôt que les autres années, soit fin janvier ou début février, dans la mesure où nous sommes dans la phase de renouvellement du conseil de surveillance, suite aux élections législatives ».
Et ensuite ? Sera-t-on prêt pour les semis 2024 ? Nicolas Rialland estime qu’il y a des incertitudes sur des solutions suffisamment sécurisantes. « Ne faut-il pas avoir la sagesse de différer ces solutions une fois qu’elles auront été complètement testées ? »
Le directeur général de KWS, Patrick Mariotte, a ensuite présenté les avancées en terme de génétique. « Les premières années sans néonicotinoïdes, vous allez vouloir des variétés vertes, a-t-il déclaré en s’adressant aux planteurs. Or, dans nos essais, on voit que les variétés qui ont le plus fort potentiel au départ s’en sortent le mieux, sans être forcément les plus tolérantes. Il faudra vous habituer à voir des feuilles jaunes ». Dans le futur, les variétés réellement résistantes, avec des feuilles vertes, prendront la relève.
« Le défi est colossal, il ne peut pas se régler en 2 ans, a conclu Guillaume Gandon devant une assemblée de plus de 100 personnes. Car la recherche travaille sur un temps long ».