Cette année, un prix moyen de campagne de la tonne de blé de 230 € est tout à fait envisageable. En grandes cultures, des marges brutes et un excédent brut d’exploitation plus élevés que les années passées restaureront les fonds de roulement des exploitations céréalières. Ils permettront aussi de faire face aux échéances de prêts.
« Mais, quoi qu’il en soit, toute variation de 100 € du montant du chiffre d’affaires ou des charges d’exploitation augmente ou réduit automatiquement de 50 € environ les montants des prélèvements à régler », fait remarquer Eric Quineau, directeur associé à Fiteco, membre du réseau AgirAgri.
Pour atténuer les hausses de son revenu et des prélèvements sociaux et fiscaux qui en découleront, Antoine, céréalier, dispose de plusieurs leviers.
Avant la clôture de son exercice comptable, l’agriculteur anticipera la réparation de ses matériels ou la rénovation de ses bâtiments.
Ces prestations de services seront des charges directement imputables sur le chiffre d’affaires de l’exploitation.
Mais se lancer immédiatement dans l’acquisition de matériels pour créer des charges et augmenter les montants des amortissements n’est pas en soi judicieux. Un tel projet engage financièrement et relève d’un plan d’investissement pluriannuel à réaliser.
Si Antoine diffère la vente d’une partie de sa récolte après la fin de son exercice fiscal en cours, il inscrira en inventaire, à l’actif du bilan de son exploitation, les céréales à vendre en stock. Celles-ci seront alors évaluées à leur coût de production après l’application d’une décote de 15 % à 20 %. Dans les organismes stockeurs, seules les quantités de céréales en dépôt-vente seront ainsi comptabilisées.
« Mais si Antoine diffère la vente d’une trop grande partie de sa récolte, il se retrouverait à gérer fiscalement deux années de chiffre d’affaires : ses stocks inventoriés en 2021 et sa production 2022 », souligne Eric Quineau.
Or, certains indices conjoncturels laissent penser que les prix de vente des céréales seront élevés au moins jusqu’à la prochaine campagne 2022-2023. Mais, surtout, Antoine doit d’ores et déjà anticiper une augmentation des coûts de production des céréales qu’il récoltera l’été prochain. La hausse des engrais et des carburants impactera automatiquement le résultat du prochain exercice fiscal.
Des outils de lissage de revenu efficaces
Au moment de la remise, par le conseil-comptable, du compte de résultat de l’exercice clos, l’agriculteur dispose de plusieurs outils fiscaux efficaces pour lisser son revenu.
Le premier est la modulation des amortissements linéaires et dégressifs des actifs inscrits au bilan. Aussi, le comptable-conseil portera en charges, à la fin de l’exercice, le montant maximum des amortissements autorisé. Mais, là encore, ce qui a été amorti au cours d’un exercice ne le sera plus l’exercice suivant.
Le deuxième outil fiscal est l’épargne : réaliser une dotation pour épargne de précaution (DEP) plus importante que les années précédentes, alimenter le plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) et, si Antoine est employeur, le plan épargne entreprise de l’exploitation. L’ensemble des versements effectués est déductible du revenu brut soumis aux prélèvements sociaux et fiscaux.
Si Antoine a opté pour le régime annuel des prélèvements sociaux depuis au moins cinq ans, il a la possibilité de revenir au régime triennal dès cette année ou si ce n’est pas le cas, l’an prochain. Les prélèvements sociaux seront alors calculés par rapport aux résultats des trois derniers exercices comptables.
« Ces trois outils comptables (amortissements, DEP, MSA) sont très efficaces pour atténuer la hausse des prélèvements obligatoires et lisser sur une ou deux années », explique Eric Quineau. Mais si les prix des céréales sont durablement élevés, Antoine n’aura pas d’autre choix que d’intégrer ce facteur prix dans la stratégie de gestion de son exploitation.
La hausse des engrais et des carburants représente un surcoût de 200 € par hectare dans les grands bassins céréaliers du nord de la Loire.