Au Brésil, la campagne commence très, très doucement. Les dernières statistiques disponibles du Centre-Sud, région historique de la canne, montrent une baisse, dans le broyage de la canne, de 25 % par rapport à l’an dernier. La sécheresse entraîne des rendements en baisse de 10 % par rapport à l’an dernier.
Mais ce n’est pas tout. Car le pétrole retrouve des couleurs et le baril de Brent voisine à nouveau les 70 $/baril, du jamais vu depuis un an. Et, malgré les confinements relatifs au Brésil, l’éthanol dans le pays atteint des records : il a gagné 30 % depuis l’ouverture de la campagne !
Du coup, la part de canne dédiée au sucre a tendance à diminuer par rapport à la part dédiée à l’éthanol : sur le premier mois, 42,7 % de la canne a été dédié à l’éthanol, c’est 1 point de moins par rapport à la même période l’an dernier. Couplée à la moindre disponibilité de la canne, la baisse de production de sucre, sur le premier mois de la campagne, dépasse les 28 % par rapport à l’an dernier !
Même si le Réal reprend des couleurs, les cours du sucre prospèrent. Les spéculateurs anticipent et accélèrent le mouvement. Ils sont désormais acheteurs-nets de plus de 9,5 Mt – c’est deux fois plus qu’il y a un mois ! Et le sucre brut oscille désormais autour de 17 cts/lb, même sur les échéances éloignées (jusque mai 2022). Le sucre blanc suit le mouvement, autour de 450 $/t jusqu’aux mêmes échéances.
L’Europe profitera-t-elle de cette hausse ? Rien n’est sûr sur le court terme. Certes, le prix du marché spot dépasse actuellement les 445 €/t (en équivalent sortie usine française). Mais, faute de disponibilité, il semble que les industriels européens ne peuvent pas répondre à la demande, et restent contraints de livrer leurs engagements passés : les livraisons effectives ne dépassent pas les 380 €/t. Le gain est donc de seulement 6 % en un an, alors que l’Union a produit 1,8 Mt de moins ! Une aubaine pour les importateurs : en avril dernier, un premier contingent d’importation dit ‘sous CXL’, c’est-à-dire payant la taxe à l’importation de 98 €/t, a été accordé. Le volume est très faible (1 000 t), mais il reflète bien la tendance à l’œuvre.
Il est désormais acquis que l’Union restera importatrice nette. Les surfaces européennes sont en repli (-1,4 %), alors même que les stocks sont au plus bas. La Commission européenne chiffre même ces stocks, pour la fin septembre 2021, à 1 Mt : du jamais vu depuis le début des années 2010. Dans ces conditions, les cartes sont désormais dans les mains des vendeurs pour permettre à la campagne 2021-2022 d’être, enfin, rémunératrice !
Fondamentaux porteurs, spéculateurs à l’achat : les cours mondiaux se tiennent.
L’éthanol carburant profite de l’embellie du pétrole, et dépasse les 68 €/hl.