Depuis le déploiement de la stratégie d’accélération, en novembre 2021, par le ministère de l’Agriculture, le biocontrôle devient de plus en plus visible. « Les sociétés réunies au sein d’IBMA France représentent plus de 90 % du marché du biocontrôle dans notre pays, avec 39 sociétés associées », rappelle Céline Barthet, présidente d’IBMA France. Ces acteurs travaillent dans plusieurs directions : biofongicides, bioinsecticides, piégeage des ravageurs, avec des outils permettant de les positionner au bon moment. Ainsi, Bioline a mis au point T-booster, un système de distribution mécanisé des trichogrammes utilisés contre la pyrale du maïs. Plus récemment, De Sangosse a mis au point des attractifs odorants Fabaodor et Lentodor pour piéger les bruches de la fèverole et de la lentille, en les détournant des cultures. « Leur coût est de 120 € /ha, il comprend les pièges et les attractifs. Ces deux solutions sont distribuées dès cette année », explique Marie Aubelé, chef de produit chez De Sangosse.
Colza : de la semence aux pétales
Plusieurs solutions sont déjà appliquées sur le colza pour protéger les semis et lutter contre le sclerotinia. Le traitement de semences Integral Pro (BASF), efficace sur les fontes de semis, stimule aussi les défenses naturelles de la plante. Ce produit est formulé à partir de bactéries. À la germination, il forme un film protecteur autour des racines. Integral pro permet un démarrage rapide du colza, ce qui contribue à diminuer l’impact des altises et des limaces sur les levées…. Pour un coût assez compétitif d’environ 4 euros/hectare. Contre le sclerotinia, les autres biocontrôles disponibles sont le Contans en application au sol; les Rhapsody et Polyversum pulvérisés en fin de floraison. Rhapsody (Bayer) est une formulation microbienne (Bacillus sub.) utilisée en mélange avec un produit classique à demi-dose, au stade G1 du colza à la chute des premiers pétales. Le fongicide Polyversum (De Sangosse) à base du micro-organisme Pythium oligandrum est aussi est autorisé pour lutter contre le sclérotinia du colza, associé à 1/2 dose de fongicide conventionnel. Sur les ravageurs, Terres Inovia teste des solutions sur les pucerons vecteurs de la jaunisse, les grosses altises et les melighètes. « Les pistes sont intéressantes, à poursuivre, comme les phéromones pour piéger les altises », note Laurent Ruck de Terres Inovia.
Céréales : un anti-septo et un anti-fusariose
Le soufre a longtemps été le seul biocontrôle utilisé sur le blé comme anti-oïdium, ensuite sont arrivées des formulations à base de laminarine (Florilège Vacciplant d’UPL). Il existe désormais d’autres substances actives. Le biofongicide Pygmalion, à base de phosphonate de potassium (De Sangosse), a été autorisé en 2022 sur la septoriose, principale maladie du blé tendre. « C’est un produit systémique exempt de classement », souligne Aurélie Morin, chef de produit chez De Sangosse. Cette AMM arrive au terme de plusieurs années d‘expérimentation qui ont conforté son efficacité. « Au T1, sur septoriose, le phosphonate arrive au même niveau d’efficacité qu’un fongicide conventionnel IDM », estime Claude Maumené d’Arvalis. En pratique, c’est l’application au T1, en mélange avec du soufre, ou au T2, qui est préconisée sur blé par De Sangosse. Autre biosolution : l’Échiquier, antifusariose lancé en 2021 par De Sangosse, a une formulation à base de bicarbonate de potassium, sans résidus. Il agit en limitant les symptômes de fusarium sur épis et en baissant le niveau de mycotoxines dans le grain. Échiquier est préconisé à 1 kg/ha en association avec un partenaire fongicide, il est éligible aux CEPP : 0,5 CEPP par hectare à la dose pratique de 1 kg/ha. De nouvelles solutions biologiques de protection et de stimulation des semences commencent aussi à émerger pour les céréales. En fin d’année, l’Ympact (Corteva) devrait être proposé sur les céréales dans un pack, associé à un insecticide conventionnel.
Pomme de terre : une alternative contre le mildiou
Le phosphonate de potassium (Pygmalion) a aussi été autorisé en 2022 comme anti-mildiou sur la pomme de terre. Testé par Arvalis, il a été validé dans plusieurs associations avec un fongicide conventionnel à demi-dose (Revus, Ranman Top, Infinito). Pygmalion associé s’applique à la dose de 2 l/ha pour un coût d’environ 21 euros/ha, qui permet de réduire l’IFT de 25 %. Arvalis poursuit des essais avec d’autres fongicides de biocontrôle et des bioinsecticides anti-taupins issus de souches microbiennes. Contre les taupins, le Naturalis (De Sangosse) est déjà autorisé à la dose de 3l/ha en application dans la raie de plantation. Naturalis est formulé avec une souche microbienne (Beauvearia bassiana) et il est aussi autorisé sur des légumes de plein champ en pulvérisation foliaire contre plusieurs ravageurs. Le biocontrôle s’est déjà déployé sur les productions industrielles, en particulier sur les haricots. Comme le soulignait Daphné Souliez, responsable qualité chez Bonduelle, lors de la journée IBMA 2022 :« dans les Hauts-de-France, 20 % de nos productions légumières ont déjà recours au biocontrôle ».