Avec 12 845 hectares cultivés dans l’Union européenne, les surfaces de betteraves biologiques ont chuté de 21 % entre 2022 et 2023 et se retrouvent de nouveau à un niveau proche de celui de 2020. Si l’Allemagne reste le premier pays producteur, suivie par la France, l’Italie et la Lituanie, tous ces pays enregistrent une baisse significative des surfaces consacrées à la culture biologique. Les difficultés agronomiques, notamment la pression sanitaire croissante sur les cultures, expliquent en partie cette tendance. Mais c’est surtout la faiblesse de la demande qui freine l’essor du sucre de betterave biologique, avec des acheteurs privilégiant encore le sucre de canne, de par son prix et son image jugée plus « naturelle » par les consommateurs.

Un déclin significatif des importations

En parallèle, les importations de sucre biologique en Europe poursuivent leur déclin. Avec un volume total de 107 460 tonnes en 2023, elles enregistrent une baisse de 26 % par rapport à l’année précédente et de près de 50 % par rapport au pic de 2019. Avec une production quasi exclusivement constituée de sucre de canne, la Colombie reste le principal fournisseur de l’Union européenne, suivie par le Brésil et le Paraguay, mais ces trois pays ont réduit leurs exportations vers
l’Europe. La situation reste cependant hétérogène et des acteurs plus modestes comme le Costa Rica, le Pérou ou le Laos ont vu leurs volumes progresser, bien que ces hausses restent marginales au regard de la tendance baissière générale.

La répartition géographique par États membres illustre également une concentration des importations, l’Allemagne, la France, les Pays-Bas, la Belgique et l’Italie représentant désormais 90 % des flux de sucre biologique à destination de l’UE. Si l’Italie fait figure d’exception et voit ses volumes d’importation augmenter, les autres États membres enregistrent tous une diminution notable.

Vers un cadre réglementaire plus strict

Au-delà des dynamiques de production et d’importation, les évolutions réglementaires viennent aussi modifier la donne. La Cour de justice de l’Union européenne a en effet mis fin au principe d’équivalence par pays tiers, qui permettait à certains producteurs étrangers d’apposer le label biologique européen sur leurs produits. À partir du 1er janvier 2025, seules les certifications délivrées par des organismes reconnus par l’Union européenne seront acceptées. Cette décision devrait réduire encore davantage l’offre de sucre biologique sur le marché européen et entraîner un renchérissement des coûts pour les producteurs des pays tiers souhaitant conserver leur accès au marché européen.

Loin de retrouver une dynamique positive, le marché du sucre biologique en Europe fait face à des vents contraires. L’étude de l’ARTB explique que la hausse des prix alimentaires a fragilisé la demande, avec des consommateurs plus attentifs aux coûts et des industriels hésitant à reformuler leurs produits. « En effet, certains utilisateurs doivent parfois faire face à des problèmes d’approvisionnement en lien avec d’autres produits biologiques qui sont à incorporer avec le sucre, comme le lait ou les fruits pour la production de yaourts biologiques. Il en résulte alors une limitation indirecte des volumes de sucre, compte tenu de l’existence possible de goulots d’étranglement sur d’autres produits biologiques ».

La logique de commodité

Alors que les ambitions initiales misaient sur une montée en gamme et une valorisation du sucre biologique comme un produit « à forte valeur ajoutée », la réalité semble montrer que le « contexte international libéralisé fait généralement la part belle aux logiques de commodité », conclut l’étude.

Sans un véritable regain de la demande, la filière européenne du sucre biologique risque de s’éroder dans les années à venir.

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Retrouvez l’étude de l’Association de Recherche Technique Betteravière (ARTB) sur : https://www.artb-france.com/nos-analyses/marches-international/599-le-sucre-biologique-union-europeenne.html