Ces trois dernières semaines, les cours du blé sont restés stables sur les marchés français (1). Ceux du maïs ont gagné 10 € par tonne. En conséquence, les prix des deux céréales sont supérieurs de 15 € à 20 € à leur niveau du début de l’année passée, aidés par un euro proche de la parité avec le dollar.
Les opérateurs redoutaient les 8 au 9 janvier derniers la publication du nouveau rapport de l’USDA. Ils s’attendaient à ce que les productions argentine et australienne de blé soient revues à la hausse avec, à la clé, un repli des prix mondiaux.
Il n’en a rien été ! L’institut américain a maintenu ses prévisions à l’identique pour ces deux pays : des récoltes de 46 millions de tonnes (Mt) et des exportations de 36,5 Mt.
Dans le dernier rapport publié le 10 janvier, les pays mis en exergue par l’USDA sont la Russie et les États-Unis. Ils commencent la nouvelle année avec un peu de moins de panache qu’ils n’avaient entamé leur campagne au début de l’été dernier.
Comme la Russie a vendu en six mois 29,4 Mt de blé sur les 46 Mt exportables d’ici la fin du mois de juin, elle n’en expédierait plus que 17 Mt, selon l’USDA.
Pour ne pas attiser l’inflation des prix à la consommation, le Kremlin a du reste imposé un quota d’exportation de 10,4 Mt à partir du 15 février prochain.
Ce quota est faible comparé aux cinq dernières années. Mais la Russie a déjà vendu une grande partie de sa récolte. Aussi, ce quota sera suffisant pour réfréner les velléités des traders russes.
La Russie est partie pour ne récolter que 80 Mt de blé l’été prochain, alors qu’elle entamerait la prochaine campagne 2025-2026 avec seulement 8 Mt de grains en stocks.
Or, cette campagne-ci, la production mondiale de blé (793 Mt) reste déficitaire de 8 Mt.
La Chine en retrait
Quant aux États-Unis et à leur production de maïs, les prévisions de l’USDA se sont assombries. Ils n’en auraient récolté que 377 Mt et non pas 384 Mt comme l’avait encore estimé l’USDA le mois dernier. En cause, des rendements plus faibles qu’escomptés. Mais en puisant dans leurs stocks, les États-Unis ambitionnent toujours d’exporter 62,5 Mt de maïs d’ici l’été prochain. Depuis le mois de septembre, ils en ont déjà expédié 13 Mt.
Mais l’augmentation annuelle de la production chinoise de maïs (295 Mt ; + 35 Mt en quatre ans) attise la concurrence entre pays exportateurs, puisque l’empire du milieu en importe moins. Le Brésil en serait la première victime.
En ajoutant le riz, l’empire du milieu a récolté 11 Mt de céréales de plus que l’an passé. Sa production aurait ainsi dépassé le seuil de 700 Mt et atteint 706 Mt, rapporte Ukragoconsult. Un record !
Ces bonnes récoltes et les stocks massifs de grains détenus poussent la Chine à réduire ses importations de céréales de 23 Mt par rapport à la campagne passée, selon l’USDA. Ce qui n’est pas sans incidences sur le fonctionnement des marchés et sur les prix mondiaux.
Le Brésil vend déjà deux fois moins de maïs que l’an passé à la Chine (à peine 500 000 tonnes par mois). Toutes destinations confondues, ses exportations n’ont jamais été aussi faibles depuis trois ans.
Toutefois, l’augmentation de la production brésilienne d’éthanol de 30 % réduit nettement les capacités d’exportation de maïs du Brésil, bien que ce dernier s’apprête à en récolter 133 Mt (+6 Mt en un an).
En attendant, l’Ukraine demeure toujours aussi combative sur les marchés. Selon Ukragroconsult, la prochaine récolte de céréales se situerait entre 55 et 65 Mt, avec des exportations projetées à 40-50 Mt vers, notamment, l’Afrique du Nord, l’Asie et le Moyen-Orient.
Mais l’Union européenne resterait son principal débouché. Depuis le début de la campagne, les deux tiers du blé importés par les vingt-sept (4,4 Mt), et notamment par l’Espagne sont ukrainiens (2,9 Mt). Kiev a aussi vendu plus de la moitié du maïs (5,5 Mt) et de l’orge (400 000 t) achetée par l’Union européenne.
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Texte écrit le 13 janvier 2025