« La France reste le premier pays exportateur mondial de semences, mais les temps sont durs », affirme Olivier Paul, le président de l’UFS. En effet, après une mauvaise année en termes de production de semences en France (notamment liée au climat), y compris en betterave, l’Union française des semenciers (UFS) alerte sur différentes problématiques de la production de semences.
L’enjeu des moyens de production
En premier lieu, l’UFS veut faire reconnaître l’importance des produits de protection des cultures et de l’irrigation pour la production de semences. Le cas du radis est particulièrement parlant : « la France était le premier producteur de semences de radis il y a plus de 5 ans. Cette production a complètement disparu de France et d’Europe avec l’arrêt d’une molécule et elle se fait maintenant en Nouvelle-Zélande », explique Rémi Bastien, le vice-président de l’UFS.
L’e syndicat a d’ailleurs fait partie des 11 organisations agricoles (dont la CGB) qui ont interpellé le gouvernement le 4 novembre à propos des distorsions de concurrence sur les néonicotinoïdes interdits en France. Selon Olivier Paul, retirer des molécules avant l’arrivée de solutions alternatives, notamment génétiques, pourrait entraîner la disparition de filières qui ne redémarreront pas lorsque la génétique arrivera. « Je doute qu’on recommence la production de semences de radis en France comme on a pu le faire dans les années passées. En interdisant trop vite des molécules, on perd des savoir-faire et on arme nos concurrents ». La betterave connaîtra-t-elle le sort du radis semences ?
Cette alerte sur les moyens de production résonne particulièrement bien avec la mobilisation agricole qui a repris ce lundi 18 novembre.
L’assimilation des semences traitées à des produits sanitaires
« Aujourd’hui, il y a une tendance à une surinterprétation qui fait qu’on assimile les semences traitées à des produits phytosanitaires », s’inquiète Olivier Paul en précisant que cette modification entraînerait un changement de statut et d’exigences règlementaires. Si cela se confirmait, « ça ne se vendrait plus, ne se stockerait plus et ne se transporterait plus de la même façon. On ne mesure pas encore les conséquences jusque dans les cours de ferme : comment les agriculteurs vont-ils devoir stocker leurs sacs de semences traitées s’il y a assimilation à des produits phytosanitaires ? », s’inquiète-t-il. Pourtant, les traitements des semences présentent de grands bénéfices puisqu’ils permettent la baisse de l’utilisation des phytos sur la culture. « Demander aux semenciers d’arrêter de traiter les semences, c’est tout l’inverse de ce que demande la France à son agriculture ». Par ailleurs, cette mesure fermerait aux semenciers français certains marchés à l’exportation.
Parallèlement à la question des phytos, l’UFS alerte sur celle de l’eau : « un grand nombre de productions de semences ne peuvent se faire qu’avec l’irrigation », rappelle Rémi Bastien.
Une visibilité financière sur le temps long
L’UFS alerte aussi sur l’instabilité du crédit impôt recherche, qui représente jusqu’à 20 à 25 % du budget recherche de ses adhérents. En effet, ce dispositif est souvent rediscuté lors des débats sur le projet de loi de finances (PLF). Comme l’explique Olivier Paul, « il est difficile pour les semenciers de mener des projets de recherche variétale sur le long terme (7 à 12 ans) sans avoir une bonne visibilité sur leurs financements. La possible suppression du crédit impôt est une vraie épée de Damoclès », affirme-t-il.
Au niveau européen, on est toujours dans le flou artistique, notamment en raison de l’opposition de certains états membres, explique Rémi Bastien. « On prend vraiment du retard par rapport au reste du monde », prévient Olivier Paul. En effet, les semenciers ne peuvent pas investir massivement dans les NGT sans disposer d’une visibilité sur le cadre réglementaire.
Par ailleurs, un point paraît particulièrement bloquant dans ce dossier, celui de la traçabilité des variétés NGT jusqu’au produit fini souhaité par une partie des représentants politiques. Mais, selon le vice-président de l’UFS, la complexité logistique et le coût qui en résulteraient seraient trop importants et pèseraient beaucoup sur le développement des NGT.