Le nombre grandissant de chats errants préoccupe les pouvoirs publics. Selon la fondation Brigitte Bardot, leur nombre est de l’ordre de 11 millions, soit la population la plus élevée d’Europe. Cette année, la loi de finances avait prévu une enveloppe de trois millions d’euros dédiée à leur stérilisation par les collectivités territoriales. Mais l’affaire est compliquée. Attraper les vagabonds n’est pas commode ! En 2020, Willy Schraen, le patron des chasseurs, était monté au créneau expliquant que ces chats représentaient un réel danger pour la faune et demandant une amplification des captures. Les réactions avaient été si violentes qu’il avait dû être placé sous protection policière. Pourtant, il avait exprimé la réalité, comme le prouvent de nombreuses études scientifiques.

Ainsi Marc Duquet, ornithologue, dans un article publié dans OrnithoScience estime que le chat est responsable de la disparition de 33 espèces dans le monde. Aux USA, les études scientifiques chiffrent à des dizaines de milliards les proies tuées chaque année.

À l’heure où tout le monde se mobilise pour la biodiversité, y compris les chasseurs, il serait donc temps d’endiguer le phénomène. La LPO, association militante et anti-chasse, rappelle que le chat errant chasse en moyenne 12 heures par jour. De nombreuses associations et fondations de protection animale (Fondation Assistance aux animaux, Fondation 30 millions d’amis, la SPA…) insistent, depuis des années, sur l’importance de la stérilisation. Tous les maîtres devraient donner l’exemple. D’autant que le chat est l’espèce la plus abandonnée en France.

La législation actuelle prévoit que les animaux errants soient conduits en fourrière. Une alternative consistant à les capturer, à les stériliser puis à les relâcher en groupe est autorisée en vertu de l’article L. 211-27 du code rural. Cette solution présente l’avantage d’éviter la recolonisation.

Selon le code rural, l’errance féline relève du maire

Comme d’habitude, lorsque surgit un problème, l’administration commande un rapport. C’est fait. Les travaux ont commencé en 2023 et vont se poursuivre.

En attendant, une enveloppe de 29 millions d’euros a été mobilisée au bénéfice des associations de protection animale accueillant des chiens ou des chats abandonnés ou accomplissant des stérilisations d’animaux errants.

416 campagnes de stérilisation ont ainsi été financées pour un montant de plus de 5 millions d’euros.

Rappelons que, selon le code rural, l’errance féline relève de la responsabilité du maire mais ces derniers ont bien souvent … d’autres chats à fouetter.

Le chat, errant ou pas, jouit de la sympathie grandissante du public. Il est hors de question de le détruire comme c’était le cas autrefois lorsqu’il divaguait à plus de 150 m des habitations.

Dans un petit village du sud-ouest, je connais une colonie de chats maternés par un commerçant. La nuit ,ces chats disparaissent. Ils chassent. À l’aube, ils reviennent prendre position devant la vitrine du commerçant qui n’a pas de mots assez doux pour les accueillir. Chaque année, il y a de nouvelles portées. Je lui ai demandé s’il avait stérilisé les animaux. « Non, pourquoi, ils ne font de mal à personne? »

Tuer un chat errant peut coûter cher

Tuer un chat haret à la chasse coûte désormais très cher. Il ne figure plus sur la liste des nuisibles depuis 1987. Depuis décembre 2021, l’article 521-1 du code pénal prévoit cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende pour l’élimination d’un animal domestique.

Un cas concret. En mai 2022, un piégeur de l’île de Bréhat avait abattu un chat attrapé dans une cage. Un voisin l’avait surpris en train de tirer sur l’animal avec sa carabine 22 long rifle, puis l’avait vu jeter le cadavre à la mer.

Il faut savoir que les chats errants grouillent sur l’île et que rien n’est fait pour arrêter l’invasion. « Que fait la mairie ? » s’interroge le président du tribunal correctionnel de Saint-Brieuc. « Elle est consciente du problème mais peine à trouver des solutions » répond le représentant de la municipalité. L’avocat du piégeur plaide que le chat était malade et qu’il fallait l’euthanasier. « Mon client n’est pas coupable. Il a agi comme il aurait dû agir. Un coup de carabine ou l’euthanasie, c’est la même chose ». Il ajoute que « ce n’était pas un chat de compagnie, mais un chat sauvage ». Grave erreur, car le véritable chat sauvage est protégé … Mais bon, le tribunal ne connaît pas ces finesses.

La procureure estime, elle, que « le prévenu se dédouane sur la mairie ». Elle requiert trois mois de prison avec sursis, le retrait du permis de chasser pendant trois ans et une interdiction de détenir un animal pendant cinq ans.

Le prévenu écope finalement de 1 000 € d’amende, dont 500 avec sursis et de 200 € de contravention. Il doit en outre verser 100 € à chacune des associations requérantes et devra régler les 400 € de frais d’avocat de la partie adverse.

Les chasseurs doivent donc le savoir : éliminer un chat errant dans la nature peut causer de graves soucis.

Notons que chez nos voisins suisses et belges, l’animal peut être détruit. Les autorités considèrent que c’est un acte de bonne gestion.

Eric Joly

Le chat est l’espèce la plus abandonnée en France