« Nous avons reçu des pucerons infectés avec les différents virus de la jaunisse de la betterave : le BYV (jaunisse sévère), le BMYV (jaunisse modérée) et le BChV (chlorose) », se réjouit Jean-Noël Thauvin. « Ils arrivent directement de chez Strube, en Allemagne ». Le jeune ingénieur, embauché par Deleplanque depuis février 2021, travaille à Estrées-Saint-Denis avec deux autres techniciens du groupe. Installé dans les locaux du sélectionneur Asur Plant Breeding, il teste la résistance des variétés aux virus de la jaunisse.
Ils apportent des pucerons virulifères … Dans les champs
« Nous commençons par multiplier les pucerons infectés sur les betteraves, dans des espaces confinés sous serre », dévoile-t-il. Et ce n’est pas une tâche facile, puisqu’à partir d’une trentaine de pucerons infectés par virus, il devra obtenir suffisamment de pucerons pour inoculer les 1500 micro-parcelles d’essais. « Nous comptons deux mois pour multiplier les pucerons », poursuit Jean-Noël Thauvin. La jaunisse ne se transmet pas à la descendance des pucerons contaminés pour le virus de la jaunisse sévère. Les pucerons l’acquièrent sur les plantes infectées, ce qui n’est pas le cas des virus de la jaunisse modérée où les pucerons infectés peuvent transmettre le virus à leur descendance.
Dans une seconde étape, les chercheurs infestent les betteraves à tester au champ en y déposant des pucerons porteurs des différents virus. La première inoculation a eu lieu mi-mai, avec des pucerons infectés par une combinaison de virus, de modérés à sévères.
L’équipe teste plusieurs centaines de génotypes assez divers, soit en plein champ, soit sous tunnel (variétés très exotiques, beta maritima, betteraves rouges…) à Estrées-Saint-Denis. Un test de rendement sur 40 génotypes mené dans la Somme complète ce dispositif. Le choix de la collection de génotypes réalisé par l’équipe de Strube en Allemagne reflète au maximum la diversité présente au sein du genre Beta, et devrait permettre d’identifier des gènes de résistance.
« Pour les génotypes élites, on mesure le rendement et on observe la capacité à résister ou à tolérer les différents virus. Pour les autres variétés, une PCR (réaction de polymérisation en chaîne) quantitative détermine le taux de contamination chaque semaine », précise l’expert en génétique. Des notations visuelles et un suivi des parcelles au drone permettront également de suivre l’impact de la maladie sur les différents génotypes.
Cette expérimentation fait partie du programme Modefy, programme de lutte contre la jaunisse de la betterave initié par le groupe Deleplanque. Il rassemble l’ITB, l’Inrae de Colmar et le groupe Deleplanque, pour une approche non seulement génétique, mais également agronomique et agroécologique. Le site d’Asur Plant Breeding d’Estrées-Saint-Denis s’est imposé par son implantation au cœur d’une région betteravière. De plus, Deleplanque a des liens avec le groupe Saaten-Union qui abrite Asur Plant Breeding (elle dispose d’une participation minoritaire) et partage des programmes de sélection, comme sur le seigle avec une filiale de Saaten-Union. Enfin, les chercheurs ont à leur disposition des tunnels et des serres à proximité des champs d’essais.
Quant au financement du projet Modefy, il est assuré par le Groupe Deleplanque et par les régions Île-de-France et Grand Est.