Le syndrome des basses richesses est une maladie apparue en France dans les années 1990, causant principalement une diminution de la richesse en sucre. Historiquement connu dans les plaines de Dijon qui ne sont plus une zone de production de betteraves, le SBR a refait son apparition en Alsace en 2023.

Qu’est-ce que le syndrome des basses richesses ?

Le Syndrome des basses richesses (SBR) est une maladie causée par une bactérie : Candidatus Arsenophonus phytopathogenicus. La bactérie se situe dans les vaisseaux du phloème, en particulier dans les racines et dans le pétiole des vieilles feuilles. Les symptômes sur betteraves sont caractérisés par un jaunissement du feuillage.

Les repousses de feuilles sont asymétriques et lancéolées. Lorsque le pivot est coupé en deux, il est possible d’observer des traces foncées sur le réseau vasculaire de la racine, causées par une nécrose des tubes de phloème (dans lequel la sève élaborée, riche en glucide, circule dans la plante), une lignification de la paroi cellulaire et un dépôt de phénols (des métabolites secondaires couramment impliqués dans les mécanismes de défense des plantes). Ces symptômes apparaissent généralement à partir du mois d’août.

Les pertes de rendement sont principalement causées par une diminution de la richesse, de l’ordre de 4 points de richesse. Un impact, plus faible, est parfois observé sur le pois.

Une maladie transmise par des cicadelles

La bactérie responsable du SBR est transmise par des cicadelles. Ce sont des insectes piqueurs suceurs, qui transmettent le SBR lorsqu’ils se nourrissent de sève.

Sur betterave, le pic de vol des cicadelles est constaté fin juin ou début juillet. Exceptionnellement, un second vol en août peut être observé, comme en Allemagne en 2022. Ce second vol pourrait être expliqué en partie par les conditions particulièrement chaudes de l’année.

Le vecteur principal du SBR identifié en Bourgogne et en Franche-Comté, au début des années 2000, est la cicadelle Pentastiridius leporinus. Cixius wagneri est également identifiée comme cicadelle porteuse de la bactérie, mais son importance semble plus marginale et son cycle de vie est moins bien connu.

Biologie de la cicadelle P. leporinus

Les adultes de Pentastiridius leporinus migrent sur la betterave sucrière au début de l’été. Ils pondent des œufs qui éclosent en moyenne deux semaines plus tard. Les larves se nourrissent sur les racines de betteraves jusqu’à l’arrachage. Dans les champs présentant des symptômes de SBR, on peut observer les larves blanches de P. leporinus en arrachant des racines de betterave. Elles sont facilement reconnaissables grâce au « plumeau » blanc visible à l’arrière.

Ensuite, les stades larvaires plus âgés se nourrissent sur les racines de la culture suivante. Au cours de l’hiver, elles migrent plus en profondeur dans le sol lorsque les températures en surface diminuent, avant d’émerger l’été suivant et de migrer sur la betterave sucrière (voir photo 1).

Au laboratoire, les jeunes larves ont une mortalité importante lorsqu’elles sont élevées sur orge ou maïs, et une bonne survie sur betterave. En revanche, les stades larvaires plus âgés sont capables de se développer sur ces trois hôtes.

Une fois infectée, P. leporinus est capable de transmettre la bactérie responsable du SBR après quelques jours et reste infectieuse toute sa vie. La bactérie, principalement présente dans les glandes salivaires et dans les organes reproducteurs de la cicadelle, est transmise à 30 % de sa descendance (transmission verticale). Les cicadelles s’infectent également en se nourrissant sur des plantes contaminées (transmission horizontale).

Avant l’identification de P. leporinus sur betterave, son principal hôte connu était un roseau. La raison du changement d’hôte vers la betterave n’est pas connue.

Les recherches en cours

La recherche se mobilise pour trouver des solutions au syndrome des basses richesses : en Allemagne, où le SBR est un problème majeur, une task force a été constituée en 2023 pour intensifier les travaux de recherche et trouver des solutions. En France, depuis cette année, l’ITB évalue différents dispositifs de monitoring (plaques transparentes engluées et pièges jaunes connectés, qui détectent automatiquement les cicadelles) pour suivre au mieux les vols de cicadelles.

Différentes méthodes pour réduire les populations de cicadelles ont été testées en Europe, notamment en France :

• Certaines techniques de travail du sol, comme le labour profond, semblent réduire les populations de cicadelles émergentes l’été suivant.

• Le semis de maïs après la betterave permet également de réduire le nombre de cicadelles émergentes par rapport au blé d’hiver. Laisser le sol nu permet des résultats similaires, le mécanisme semblant être un affamement des cicadelles.

• Aucun des insecticides, conventionnels ou de biocontrôle testés, ne paraît protéger les betteraves des vols de cicadelles.

• Certaines variétés réduisent l’impact sur la richesse.

Lorsque des parcelles présentent des symptômes, il est conseillé d’arracher les betteraves au plus vite pour minimiser les pertes de richesse.

Faut-il craindre la bactérie responsable du Stolbur sur betteraves ?

Un autre pathogène, le phytoplasme (bactérie sans paroi) Candidatus Phytoplasma solani, est également transmis par des cicadelles à la betterave, notamment par P. leporinus.

L’impact de cette bactérie sur le rendement dépend de la souche :

• Les souches les plus agressives ne sont pas présentes en France, et sont détectées uniquement en Europe de l’Est. Ces souches sont responsables de pertes de rendement très importantes, pouvant aller jusqu’à des pertes totales dans les parcelles les plus touchées en Serbie. En effet, les racines de betteraves deviennent très molles et peuvent être difficiles à couper, ce qui empêche l’extraction du sucre, rendant les betteraves non marchandes dans le pire des cas. De plus, l’infection de la betterave par Candidatus Phytoplasma solani permet le développement de pathogènes opportunistes comme Macrophomina phaseolina, qui est habituellement un pathogène du soja, du sorgho ou de l’arachide.

• Les souches détectées en France sont peu agressives et ne causent pas de perte de rendement à ce jour.

Ce phytoplasme peut être présent dans les betteraves seul ou en co-infection avec Candidatus Arsenophonus phytopathogenicus (responsable du SBR).

Epidémiosurveillance

En 2024, un réseau de piégeage est constitué par l’ITB, Cristal Union et plus particulièrement le CTBA (Alsace), Tereos et Saint Louis Sucre sur le territoire betteravier. Ce réseau est constitué de pièges automatiques (photo ci-dessus) et de pièges englués pour capturer les cicadelles, soit à proximité des parcelles touchées l’an dernier, soit en surveillance dans les autres régions betteravières.

Les piégeages sont en places depuis la mi-mai, pour suivre la potentielle sortie d’hibernation des cicadelles des parcelles de céréales.

CE QU’IL FAUT RETENIR

• Le SBR est causé par une bactérie

• Il a été détecté en Alsace en 2023 sur une surface très limitée

• La bactérie est transmise par des cicadelles

• Les feuilles jaunes, lancéolées et asymétriques sont caractéristiques de la maladie

• Les souches agressives du phytoplasme Candidatus Phytoplasma solani responsable du RTD ne sont pas présentes en France