Avant les élections du 6 au 9 juin prochain, tenter de dresser un rapide inventaire agricole de la Commission Von Der Leyen me semble essentiel pour comprendre les enjeux du mandat 2024-2029.

L’agriculture a sans doute été le secteur d’activité sur lequel la Commission européenne a dû le plus revoir sa copie. Courant 2020, sous l’impulsion du Néerlandais Frans Timmermans, l’exécutif européen avait décidé de se lancer dans un véritable marathon réglementaire se proposant de réformer l’agriculture européenne en faisant de « Farm to Fork » sa nouvelle cabine de pilotage.

Cette approche a fait long feu. Les grandes crises que nous avons vécues ces cinq dernières années ont révélé tous les angles morts de cette vision quand la méthode proposée, par ces objectifs imposés « d’en haut », sans étude d’impact, sans chiffrage des coûts, a conduit à une impasse. Beaucoup des textes controversés de 2020 ont été bloqués, amendés et même abandonnés (pesticides, loi restauration de la nature, directive sur les émissions industrielles (IED), bien-être animal, systèmes alimentaires durables…).

Les manifestations agricoles, à peu près partout en Europe, du début 2024, ont fini d’acter à Bruxelles le besoin d’un changement de logiciel. En quelques semaines seulement, la Commission a proposé un certain nombre de mesures d’urgence, notamment de simplification PAC pour redonner de la flexibilité aux agriculteurs. La Commission a lancé en parallèle « un dialogue stratégique pour l’avenir de l’agriculture » avec les principales organisations agricoles et une vingtaine de parties prenantes afin de faire émerger des propositions plus réalistes, sortant de l’opposition stérile agriculture/environnement. « Farm to Fork » aura été un échec sur le fond comme sur la forme, sa poursuite est, pour tous, inenvisageable aujourd’hui.

Le mandat qui s’annonce ne sera pas non plus celui du « statu quo », soyons clairs. Nous allons devoir collectivement répondre à un nombre grandissant de défis. Comment assurer notre souveraineté agricole et alimentaire ? Comment accélérer le renouvellement des générations, la mise en cohérence de la politique commerciale de l’UE avec ses ambitions climatiques et environnementales ? Comment intégrer dans la PAC et le Green Deal, les nouveaux pays frappant à la porte de l’UE ? Ces questions qui n’ont pas trouvé de réponses sous cette Commission devront en trouver sous la prochaine.

Le Copa et la Cogeca portent des demandes très claires dans ces élections que nous avons regroupées dans notre manifeste. Impossible évidemment de tout résumer ici, mais en voici quelques éléments : en début de mandat, nous demandons une étude d’impact de toutes les politiques actées en matière agricole, avec un chiffrage précis des coûts des transitions demandées qui devront se refléter dans un budget PAC forcément plus ambitieux. Ensuite, nous demandons un vice-président aux questions agricoles capable de dire aux autres commissaires « moins de réglementations coûte que coûte mais des propositions plus concrètes ».

Ainsi, les futurs députés européens devront confirmer le changement d’orientation pris par Bruxelles en matière agricole. C’est pourquoi, à mon sens, il est crucial aujourd’hui que les agriculteurs et les ruraux se mobilisent en masse afin de faire plus entendre leurs voix à Bruxelles.

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