Une nouvelle génération de betteraviers monte en puissance. On a pu le constater le 12 avril dernier, lors de la remise des prix du Betteravier de l’année : les trois jeunes lauréats ont initié des changements de pratiques agronomiques, sous le regard parfois incrédule de leur père.
Choisis parmi les betteraviers dont les portraits ont été publiés dans le Betteravier français au cours de l’année 2023, Martin Gosse de Gorre, Thibaut Vandewalle, Caroline et Eléonore Blanquart ont été respectivement élus par des étudiants d’UniLasalle Beauvais, un jury composé de responsables de la filière betterave-sucre et 719 lecteurs, qui ont voté sur leletteravier.fr au cours du mois de mars.
La remise des prix fut l’occasion de lancer le débat sur le conseil agricole, puisque les étudiants présents au débat suivent le parcours « Conseil et productions de références agronomiques ».
Les trois lauréats ont déclaré faire surtout appel à des conseils sur le travail simplifié et la couverture des sols. Et naturellement, les débats ont vite tourné autour de la vente des crédits carbone par les agriculteurs. Ils sont même devenus plus vifs quand Thibaut Vandewalle a déclaré s’être lancé avec sa coopérative céréalière… et qu’il n’avait « pas encore touché d’argent » !
Le carbone séquestré attise les convoitises
Le carbone séquestré par les agriculteurs attise les convoitises. Il faut donc faire attention à ce que les agriculteurs ne se fassent pas « voler » leurs crédits, ont dit en substance plusieurs intervenants présents dans la salle.
« Il ne faudrait pas, sous prétexte que tout le monde a des obligations, que l’agriculteur soit le seul à ne pas bénéficier d’un retour financier », a notamment déclaré Emmanuel Pigeon, directeur de la CGB Hauts-de-France. C’est pourquoi Tereos propose une démarche transversale. « Nous ne sommes pas partis sur la vente de crédits carbone, mais sur une prime filière pour emmener le maximum d’agriculteurs », a expliqué Jérome Hary, président de la commission Innov’action de Tereos. Et François Leveaux, responsable relations coopérateurs chez Tereos d’ajouter : « la première étape sera le diagnostic pour quantifier le point d’où l’on part. La seconde sera l’accompagnement pour mettre en place des leviers, comme la localisation de l’azote ou les cultures intermédiaires ».
Il faut donc être bien conseillé pour espérer un retour financier, notamment être attentif à la fixation du « point zéro » lors du diagnostic, avant de mesurer les progrès et pouvoir prouver le niveau de carbone qui aura été stocké dans les sols.
L’enjeux ira bien au-delà des primes filières ou de la vente de crédits carbone. Ainsi, Guillaume Vanthuyne, président du Crédit Agricole d’Ile-de-France, pense que « dans 5 ou 10 ans, le niveau des emprunts et les taux d’intérêt seront indexés sur la capacité qu’aura l’agriculteur à lutter contre le réchauffement climatique ». Cette exigence, qui est déjà demandée aux entreprises, pourrait s’appliquer aux agriculteurs dans le futur.
François-Xavier Duquenne
Le 12 avril dernier, les trois lauréats avaient en tête les semis de betteraves qu’ils prévoyaient pour le lendemain. Eléonore Blanquart dans le Nord (15 ha), Thibaut Vandewalle dans l’Oise (30 ha) et Martin Gosse de Gorre dans le Pas-de-Calais (20 ha) attendaient encore que les conditions s’améliorent. Et tous les trois craignaient aussi l’arrivée des pucerons.
Thibaut Vandewalle a été récompensé par les étudiants d’UniLasalle Beauvais, très intéressés par l’agriculture de conservation.
De son côté, le jury composé de responsables de la filière betterave-sucre a apprécié l’implication de Martin Gosse de Gorre dans la recherche pour trouver de nouvelles solutions contre la jaunisse dans le cadre du Plan national de recherche et d’innovation (PNRI).
Enfin, les internautes ont voté pour Caroline et Eléonore Blanquart qui animent le compte Instagram : « Un jour à la ferme ».