CHRISTIAN VANBOCKSTAEL
«À chaque type de sol sa variété»
Christian Vanbockstael exploite 110 ha dans le plus bas village de France – Les Moëres (Nord), en Flandre maritime-, situé à 2,5 m sous le niveau de la mer. « Mes sols, très hétérogènes, sont d’anciens marais. Cela va des terres sableuses aux limons très lourds. Je réserve les terres difficiles aux arrachages précoces et les sables aux plus tardifs. J’adapte ensuite les variétés au type de sol. En moyenne, je choisis deux génétiques : une récente et une plus ancienne, qui a déjà fait ses preuves sur mon exploitation. Mes critères de choix sont la productivité, la richesse en sucre et la résistance au stress hydrique. » Christian Vanbockstael apporte un soin tout particulier à l’entretien du semoir : « Une étape capitale pour positionner au mieux la graine et, ainsi, optimiser la qualité de la levée, souligne-t-il. Ma rotation, de sept ans, limite la pression maladies. La montée de la pression sociétale autour des produits phytosanitaires doit inciter les semenciers à nous proposer des variétés de plus en plus résistantes aux maladies et aux insectes pour limiter le recours aux intrants. Un vrai challenge pour les campagnes à venir », concède-t-il.
Surface betteravière : 15 ha ⎟Sucrerie: Lilliers
MICHEL LAFOSSE
«Des variétés rustiques pour limiter les intrants»
« Pour choisir une nouvelle variété, je m’appuie sur les recommandations de mon Ceta, les essais de l’ITB, des semenciers et du service agronomique de ma sucrerie», explique Michel Lafosse, agriculteur à Combon (Eure). Les cinq dernières années, sa moyenne s’établit à 107 t/ha. « Une variété doit également être rustique avec une bonne capacité à résister à la rhizomanie et à la cercosporiose, l’enjeu étant de limiter le recours aux produits phytosanitaires. À l’inverse, une sensibilité à la montée à graines est, pour moi, rédhibitoire. » Parmi les nouveaux critères à prendre en compte, les retombées du changement climatique et l’allongement des campagnes. Selon lui, « une variété adaptée à un semis précoce résistera mieux au stress hydrique. De même, une génétique générant peu de tare terre se conservera mieux dans les silos en cas d’enlèvement tardif». Les variétés proposées par les semenciers étant de plus en plus nombreuses, le choix s’avère parfois compliqué. « Alors pour me faire ma propre idée, je n’hésite pas à multiplier les visites de parcelles et à mettre les bottes pour arpenter mes champs. Je marche beaucoup », conclut-il.
Surface betteravière : 15 ha⎟Sucrerie : Étrépagny
BÉRENGÈRE CHOMBART
«Mon premier critère : le rapport rendement richesse»
Bérengère Chombart, diplômée d’une école de commerce, a repris l’exploitation familiale en 2015 après avoir travaillé durant quinze années en entreprise. Si aujourd’hui elle gère la ferme située à Fournes-en-Weppes (Nord), elle n’hésite pas à prendre l’avis de son père. « Mais pour le choix des variétés, c’est moi qui m’en charge. Pour me séduire, une variété doit faire preuve de stabilité sur au moins deux ans! Ma référence, c’est le classement annuel réalisé par l’ITB, que j’étudie longuement. » Premiers critères observés : le rendement et la richesse. « Je prête également attention à la tolérance aux maladies, à la montée à graines, à la tare terre ou à la vitesse de levée, précise-t-elle. Tout dépend aussi de la date d’arrachage de mes betteraves. Si elle est précoce, je favoriserai le critère richesse. À l’inverse, pour un arrachage tardif, j’intègre dans mon choix la conservation de la betterave en silo. » Pour l’avenir Bérengère Chombart attend de la recherche des variétés capables de produire jusqu’à 120 t/ha, tout en étant résistantes aux maladies et ravageurs, à commencer par les pucerons. Et si elle avait un message à faire passer, cela serait « choisissez vous-même vos variétés ».
Surface betteravière: 10 ha⎟Sucrerie : Escaudœuvres
ARNAUD CLOMENIL
«La modulation de dose est en marche»
Installé à Marbois (Eure), Arnaud Clomenil cultive la betterave depuis trois ans seulement. « Ma motivation ? Allonger les rotations et mieux gérer les problèmes de mauvaises herbes. Je me suis appuyé sur l’expérience de mes voisins et collègues de Geta pour bien débuter cette culture. Et je suis plutôt satisfait du résultat, puisque nous avons récolté en moyenne 105 t/ha. Mon choix variétal est Sucrerie: Lilliers raisonné à partir de critères tels que les dates d’arrachage et aussi en fonction de la résistance à cercosporiose », explique-t-il. Les terres sont très hétérogènes, aussi tient-il compte du potentiel de chaque parcelle et même, quand c’est justifié, du potentiel de chaque zone à l’intérieur de la parcelle. Concrètement : après avoir réalisé une cartographie complète de l’exploitation par conductivité, il a adopté l’agriculture de précision sur l’ensemble de l’exploitation depuis 2007. « Pour l’heure, nous modulons les doses d’azote, phosphore, potasse, magnésie, chaux et produits phytosanitaires, ce qui nous permet de réaliser des économies sensibles tout en homogénéisant nos rendements. Demain, nous modulerons peut-être nos doses de semis de betteraves … »
Surface betteravière : 60 ha⎟Sucrerie : Étrépagny
GRÉGOIRE DE GRAVE
«Faire le bon choix pour préserver la richesse»
Depuis 2013, Grégoire de Grave est chef de culture sur une exploitation de 63 ha à Tardinghen (Pas-de-Calais). « La betterave nécessite le plus grand soin, à commencer par le choix des variétés. Pour m’aider dans cette étape, je consulte les résultats d’essais de l’ITB et de ma sucrerie Tereos. Les sols, sabla-limoneux ou argilo-limoneux, peuvent être très humides l’hiver et très secs l’été.J’opte pour trois ou quatre variétés, parmi les plus robustes, afin de préserver les tonnages et la richesse ». Outre la productivité et la richesse, il regarde de près la tolérance à l’oïdium et l’aptitude à résister à la montée à graines : l’exploitation étant située à un kilomètre de la mer, les conditions sont souvent idéales pour favoriser ce phénomène. « Lors du voyage en Allemagne, dans les laboratoires de recherche de Deleplanque, j’ai découvert que la qualité de la graine impactait la qualité de la levée, se souvient-il. Un paramètre intéressant pour les années à venir. » Pour assurer la rentabilité de la culture, Grégoire de Grave mise sur la génétique afin de réduire les charges, en intrants notamment, tout en préservant le rendement et la richesse.
Surface betteravière : 12 ha⎟Sucrerie: Lillers
HUBERT PINEAU
«La qualité, jusque dans les semences»
Toutes les cultures qui composent l’assolement d’Hubert Pineau sont destinées à des filières de qualité: plants de pommes de terre, blé Label rouge, colza érucique, lin textile … Alors pour la betterave, l’agriculteur de Mézières-enVexin (Eure) n’hésite pas à peaufiner le choix de ses variétés pour, là aussi, miser sur la qualité. « Une démarche qui s’illustre, depuis 2008, par l’obtention de la certification Iso 14001 avec Terr’Avenir, qui vise à réduire l’impact de mes itinéraires techniques, explique-t-il. En betterave, je conduis des essais en partenariat avec l’ITB pour surveiller les pucerons vecteurs de la jaunisse et voir par exemple comment préserver la productivité tout en réduisant les intrants. Je sème en moyenne trois variétés, de trois semenciers différents, et ne me tourne pas forcément vers les nouveautés. J’attends qu’elles aient fait leurs preuves! Le critère poids-valeur reste le critère principal. Grâce à une rotation longue, de huit années, la pression maladie est moindre, tout comme les problèmes de rhizomanie ou de rhizoctone. Mais le recours à des variétés peu sensibles à l’oïdium, à la cercosporiose ou à la ramulariose est un plus. » Pour demain, selon Hubert Pineau, la recherche doit cibler le stress climatique et la résistance aux insectes.
Surface betteravière : 20 ha⎟Sucrerie : Étrépagny
STÉPHANE COCHAIN
«La vitesse de couverture du sol, un critère clé»
«Sur mon exploitation située, à Lorrez-le-Bocage (Seine-et-Marne), la betterave est conduite sans irrigation sur des terres argilo-limoneuses, le choix de la variété est donc primordial. L’objectif est de produire des tonnages tout en préservant le sol. J’aimerais à terme me tourner vers les techniques culturales simplifiées mais les premiers essais ne sont pas très concluants. Je pratique l’arrachage en décomposé pour limiter les phénomènes de tassement. Les chocs entre betteraves sont moindres, ce qui favorise leur conservation. Une fois arrachées, elles sont laissées une journée en andains. La tare terre est ainsi moins importante. » En règle générale, Stéphane Cochain choisit quatre variétés, dont deux nouveautés. « L’un de mes critères de choix est la vitesse de couverture de sol, ce qui permet d’économiser un passage d’herbicides. Même si cet atout est difficilement quantifiable, c’est l’une des premières choses que je regarde dans les essais. » Stéphane Cochain n’oublie pas de jeter un œil sur la tolérance des variétés aux maladies et aux insectes. « Je compte beaucoup sur la recherche pour limiter l’usage des intrants même si, avec une rotation de six ou sept ans, la pression des maladies est déjà moins importante. »
Surface betteravière: 18 ha ⎟Sucrerie : Souppes-sur-Loing
FRÉDÉRIC BRUNOT
«Ce qui prime, c’est la rentabilité ! »
À Nangis (Seine-et-Marne), Frédéric Brunot choisit des variétés équilibrées et lourdes. « Pour moi, ce qui prime, c’est le rendement! Je ne focalise pas sur le critère richesse en sucre car je me suis aperçu que dans mes terres,j’arrivais toujours à produire du sucre. En revanche, sans rendement, pas de rentabilité!» En général, il sème quatre variétés, de semenciers différents, pour profiter des différentes familles de génétiques. « Je teste une nouvelle variété et opte pour trois plus anciennes, qui ont fait leurs preuves sur ma ferme, explique-t-il. Je me réfère aux données de l’ITB et les croise avec celles des semenciers et du service agronomique de ma sucrerie. » Frédéric Brunot tient également compte de la tolérance à la cercosporiose et à la montée à graines. « Toutes les solutions pour réduire les quantités d’intrants sont également les bienvenues. Voilà pourquoi je n’hésite pas à planter des variétés plus anciennes, plus stables. Les semenciers devraient, à mon sens, redonner leur chance à ce type de génétique. Cela permettrait peut-être de diminuer le coût de la semence, une charge non négligeable pour nos exploitations. »
Surface betteravière : 43 ha⎟Sucrerie : Nangis
CÉCILE CORNICHON
«Je sème entre dix et quinze variétés différentes»
Chez Cécile Cornichon, à La Chapelle-la-Reine (Seine-etMarne), la betterave occupe près du tiers des 420 ha de l’exploitation. « Une place stratégique depuis quatre générations, raconte-t-elle. Pour tenir compte des différents types de sol et minimiser les risques, je sème dix à quinze variétés selon les années. Quatre ou cinq variétés occupent près de la moitié des semis et chaque année, je teste trois ou quatre nouvelles AU 6 MAI 2020 génétiques. N’irriguant pas et n’ayant pas de souci de nématode, mon choix variétal repose sur quatre critères principaux : la productivité, le stress hydrique, la tolérance à la cercosporiose et à la montée à graines. » Cécile Cornichon constate déjà les conséquences du réchauffement climatique : « Dans notre région, les étés sont de plus en plus secs, d’où l’importance d’implanter des variétés moins sensibles au stress hydrique, poursuit-elle. La variété idéale serait, pour mon secteur, une graine combinant un bon rendement racine, une bonne résistance au stress hydrique et à la cercosporiose, et bien sûr une tolérance aux pucerons et aux charançons. Ces derniers ayant fait une apparition marquée au sud de Paris, nous suivons leur évolution de près»
Surface betteravière : 135 ha⎟Sucrerie: Souppes-sur-Loing
LOÏC BOLLAERT
« Avec trois sites, tout est question d’organisation»
L’exploitation de Loïc Bollaert étant répartie sur trois sites distants de 50 km autour de Charmoy (Yonne), l’organisation prime. « Pour la betterave,je sème d’abord dans les limons argileux difficiles à travailler au printemps. Là où les arrachages sont les plus précoces, pour éviter la détérioration de la struc- ture, je sème des variétés riches et résistantes au stress hydrique.» au développement de certains parasites : la teigne, les pucerons et maintenant le charançon Lixus juncii. Il sème cinq variétés chaque année : deux nou – velles et trois confirmées. « Le choix de la variété se porte sur des variétés résistantes à la montée à graines et à la cercosporiose qui, à cause de la disparition de certaines solutions chimiques, est en plein développement. » La moyenne des cinq dernières années est de 95 tonnes/ha, avec une pointe 111 tonnes/ha. « Je suis en agriculture de conservation depuis quatre ans, avec quelques difficultés parfois pour arracher dans le sec. D’où ma demande envers les semenciers de travailler des variétés de type fourragère, qui s’enfonceraient moins dans le sol afin de faciliter l’arrachage en bouleversant le moins possible le sol. »
Surface betteravière : 45 ha⎟Sucrerie : Arcis-sur-Aube