Après des rendements très bas sur des récoltes de céréales en 2016 et de betteraves en 2018, nous avons décidé d’agir et de diversifier nos revenus », explique Guillaume Brierre. Âgé de 36 ans, il est installé avec sa femme Morgane et ses trois enfants, à Soisy-sur-école (Essonne), sur une exploitation reprise en 2008 à ses parents.
Longtemps première source de revenus, la betterave est devenue une source de préoccupations pour lui. « Nous sommes passés de 40 à 47 hectares il y a deux ans, car il y avait un appel des sucriers. On y croyait fortement, se rappelle-t-il. Mais les prix se sont effondrés et nos rendements ont été catastrophiques l’an passé », explique cet adhérent de Cristal Union. De 98 t/ha en 2017, le rendement a chuté à 67 t/ha un an plus tard, malgré des surfaces irriguées. Pour les semis de 2019, il a décidé de réduire les surfaces à 37 hectares. « Nous observons un mouvement de recul global de la betterave cette année dans la région », ajoute-t-il.
Du quinoa dans l’Essonne
Dans un souci de répondre aux attentes des consommateurs, ils ont décidé il y a deux ans de se lancer dans la production de protéines végétales avec quatre exploitations voisines. Ensemble, les associés ont créé une société de type SAS baptisée « Emile et une graine », pour cultiver du quinoa, une graine originaire d’Amérique latine. Guillaume assure la présidence de la structure et Morgane la gestion administrative. « Les protéines végétales ont le vent en poupe. Il y a une forte demande. La France n’arrive pas à y répondre et est obligée d’importer », souligne Guillaume Brierre. Le quinoa est une culture aléatoire et compliquée à mener selon lui. « Le désherbage est manuel et mécanique. Cela nécessite beaucoup de temps. Les semences sont par ailleurs chères », détaille l’agriculteur. Pour la récolte qui a lieu durant les mois de juillet et août, une faucheuse andaineuse est utilisée. Une Cuma a d’ailleurs été créée pour son utilisation avec les autres exploitations partenaires du projet. Pour sélectionner les grains, les associés ont fait appel à une Cuma partenaire en Vendée, qui fait du triage optique, pour enlever les mauvais grains et les impuretés. Avoir leur propre équipement est pour l’instant exclu pour des raisons de coûts. En pourparlers avec la grande distribution, la SAS vend pour l’instant son quinoa dans les épiceries fines de la région et est au menu de plusieurs restaurants.
Dans la même logique de diversification, Guillaume Brierre s’est lancé dans la culture du lavandin sur 1,3 ha. Les premiers pieds ont été plantés en 2018. La première récolte aura lieu cet été. « Il y a une forte tradition de lavande dans la région de Milly-la Forêt, qui s’était un peu perdue », confie l’exploitant. Un plan a été initié avec le Parc du Gâtinais pour relancer cette culture. L’objectif est de produire une huile essentielle. « Pour l’instant, nous utilisons une distillerie mobile. Demain, nous souhaiterions construire notre propre distillerie », explique-t-il.
Du miel et des plantes aromatiques
Sa femme Morgane a par ailleurs débuté la production de miel depuis deux ans, après une formation à la Chambre d’agriculture et du syndicat des apiculteurs du Val d’Essonne. Elle possède aujourd’hui neuf ruches. « Au début, c’était davantage un passe-temps. Aujourd’hui, je me rends compte du temps que cela représente. Pour l’instant, je vends avec le bouche-à-oreille, mais je réfléchis à de la vente en ligne », explique-t-elle. En attendant que l’ensemble de ces nouvelles activités porte ses fruits, l’exploitation travaille en partenariat avec Darégal. Depuis 22 ans, l’Earl Brierre cultive des plantes aromatiques, comme la menthe, l’estragon et le cresson pour le compte de l’entreprise familiale de Milly-la-forêt (Essonne). « Les contrats sont établis sur la durée de plantation, par exemple neuf ans pour l’estragon. Nous assurons le suivi des cultures et le désherbage tout au long de l’année. Mais la production leur appartient. Ce sont eux qui récoltent et qui décident du moment », détaille Guillaume Brierre. Chaque mois, avec l’aide de deux salariés à temps plein sur l’exploitation, Guillaume s’attelle de longues heures aux champs, à désherber manuellement, avec une binette, à raison de « 1 800 m2 à l’heure environ par personne ». Malgré ce travail manuel important, la famille Brierre s’estime très satisfaite de cette collaboration « fructueuse » avec l’entreprise locale, à la fois sur l’aspect financier et humain. Aimant chercher de nouvelles opportunités, Guillaume a aussi commencé depuis peu la culture d’arnica sur une parcelle, pour un laboratoire pharmaceutique.
Et le bio ? « Je m’y intéresse, répond Guillaume. Il y a un fort élan en Ile-de-France, accompagné par le Conseil régional. Une conversion partielle de l’exploitation est en cours, qui sera effective en septembre 2019. Mais la betterave est pour l’instant un frein pour aller plus loin ». Cependant, le développement de l’activité bio chez les sucriers, notamment chez Cristal Union, entraînera peut-être des évolutions dans le paysage francilien de la betterave.
A. C.