Les beaux jours reviennent et avec eux la période des semis, mais aussi des épandages. Ces derniers sont de plus en plus pointés du doigt. Les émissions d’ammoniac (NH3) sont issues à 96 % de l’agriculture, selon l’Ademe. Ce composé chimique contribue à l’eutrophisation des milieux mais aussi à la pollution atmosphérique, en se recombinant avec des oxydes d’azote et de soufre pour créer des particules fines (PM 2,5). C’est le cas particulièrement au printemps, période d’épandage de fertilisants et d’effluents d’élevage. En France, un quart des émissions d’ammoniac est lié à l’apport d’engrais minéraux.
Selon l’Union des industries de la fertilisation (Unifa), les émissions d’ammoniac ont augmenté d’environ 6,7 % entre 2005 et 2016. « Cette progression est due au déplacement de la demande vers les engrais uréiques (urée et solution azotée), ayant un potentiel émissif élevé en ammoniac, aux dépens des ammonitrates et d’autres formes moins émissives », a expliqué le 12 mars, Renaud Bernardi, le président de l’Unifa. En 2016, l’Union européenne a pris des mesures pour réduire les émissions d’ammoniac. La directive 2016/2284 du 14 décembre 2016 a fixé des objectifs à la France, repris dans le Plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (Prepa) : – 4 % en 2020, – 8 % en 2025 et – 13 % en 2030.
Enfouissement et inhibiteur d’uréase
« Deux pratiques se développent pour réduire les émissions de NH3 liées aux engrais uréiques : l’enfouissement rapide post-épandage, applicable en culture de printemps, et les inhibiteurs d’uréase pour l’urée » détaille l’Unifa. Les agriculteurs sont prêts à jouer le jeu. 40 % des agriculteurs interrogés ont déjà modifié leurs pratiques, 10 % comptent le faire à court terme et 50 % se déclarent prêts à intégrer une forme moins émissive de fertilisants, révèle une étude Unifa / Datagri de mars 2018. En janvier 2018, l’Unifa a mandaté le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa) pour réaliser une étude de projection sur les émissions françaises à l’horizon 2030. Selon les différents scénarii, il apparaît difficile pour la France de respecter l’objectif de 2020 (applicable au 31 décembre de l’année). « Nous ne sommes pas spécialement confiants. Cela paraît mal engagé, a reconnu Renaud Bernardi. En revanche, l’objectif de 2025 paraît davantage atteignable ». Pour diffuser les nouvelles techniques dans les campagnes, un guide de bonnes pratiques sera déployé. Une première version, courte, sera publiée début avril, complétée ensuite par une version plus détaillée. Mais certains aspects restent encore flous. Quels coûts supplémentaires vont engendrer ces nouvelles pratiques pour les agriculteurs ? Des réponses qu’il faudra apporter pour faciliter le changement des usages.
A.C.