La Russie a attaqué l’Ukraine le 24 février 2022. La guerre va entrer dans sa deuxième année, avec son lot de pertes humaines insoutenables. Cette situation nuit aussi considérablement à la production ukrainienne d’oléagineux et à la transformation, touchées par les pannes d’électricité ou la destruction de sites industriels. Autant de facteurs qui limitent les volumes de l’Ukraine à l’exportation, même si près de 800 navires ont pu charger des grains depuis l’accord instaurant un corridor maritime sur la mer Noire, signé entre les deux pays en guerre. Le 1er février, cinq navires ont pu rejoindre l’Espagne, le Portugal et la Turquie, selon le ministère ukrainien de l’Agriculture.
Cette faiblesse des exportations ukrainiennes n’est pas sans effet sur les cours mondiaux des oléagineux, d’autant que les perspectives de paix ne sont pas de mise, bien au contraire, les deux parties renforçant leurs moyens militaires. Les cours du colza en Europe sont ainsi repartis à la hausse. Sur les marchés physiques Fob Moselle et rendu Rouen, le 7 février 2023, la graine de colza s’affichait à 550 €/t, contre 535 € le 24 janvier. Les marchés à terme sont sur la même tendance, sur Euronext, autour de 550 €/t pour les quatre échéances trimestrielles à venir, jusqu’en février 2024. Même la graine de tournesol, en chute depuis des mois, affiche des prix à la hausse, passant de 550 à 565 €/t.
Autre facteur haussier, le recul des disponibilités du canola canadien, avec des prévisions de stocks quasi nulles à la fin de la campagne 2023, un marché domestique très dynamique et des exportations très élevées, et donc des cours qui se tendent à 895 dollars canadiens la tonne en moyenne, soit l’équivalent de 625 €/t, transport non compté. Certains prévisionnistes ont toutefois des inquiétudes. Le taux de croissance économique en Europe, deux fois plus élevé qu’aux États-Unis, a propulsé la monnaie européenne à 1,10 $, contre moins 1 $ il y a quelques mois, ce qui nuit aux exportations européennes.
De plus, le prix des huiles sur le marché mondial a plutôt tendance à baisser, ce qui réduit (un peu) la rentabilité des débouchés. Enfin, l’utilisation des productions d’oléagineux pour la fabrication des biocarburants est contestée, en Europe comme aux États-Unis où le président Biden a des velléités de réduire les taux d’incorporation des biocarburants. Une décision sera prise prochainement.
Cette menace n’empêche pas les cours du soja américain de se maintenir à près de 560 $/t à Chicago, soit un prix supérieur à celui du colza européen. Ainsi, si l’on compare les prix entre l’Europe, le Canada et les États-Unis, sur le marché mondial des oléagineux, les cours européens sont anormalement bas. Il ne serait pas étonnant que les cours de la graine de colza reviennent à 600 €/t dans les prochaines semaines.