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Lise Magnier, Députée Horizons de la Marne :
Ma question s’adresse au ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.
Un vent glacial d’inquiétude et de désarroi souffle sur nos plaines agricoles depuis la semaine dernière. A quelques semaines seulement des semis de betteraves, les 24000 planteurs et l’ensemble des salariés de la filière betteravière, tous des emplois situés dans notre ruralité, ont appris avec stupeur la décision de la cour de justice de l’Union Européenne d’interdire totalement l’utilisation des néonicotinoïdes. Lors de la campagne de 2020, la première campagne sans néonicotinoïde, la production dans mon département, la Marne, avait baissé de plus de 25%. D’autres départements avaient connu une baisse de 60%. En tout 40%, des planteurs avaient connu une baisse de 30% de leur production. Aujourd’hui les planteurs refusent catégoriquement de revivre un tel traumatisme. Les industriels s’inquiètent clairement pour leurs outils en cas de baisse massive des surfaces et des rendements. Des filières connexes, le bioéthanol et aussi la luzerne, pourraient subir, à court terme, des répercussions tout aussi majeures. Alors meme que la France est aujourd’hui le premier pays producteur de sucre d’Europe, et alors même qu’à ce stade aucune solution scientifique ou agronomique n’a fait ses preuves pour protéger les cultures de betteraves du puceron et de la jaunisse, malgré l’engament collectif des planteurs, industriels, semenciers, chercheurs, responsables politique et environnementaux, dans un plan national de recherche et d’innovation depuis 3 ans, ce cout d’ arrêt brutal met en question notre souveraineté alimentaire et notre souveraineté industrielle. Ma question est donc double Monsieur le Ministre :
A très court terme d’abord, afin de rassurer l’ensemble de la filière, pouvez-vous nous assurer qu’ils seront entièrement indemnisés des potentielles pertes liées à la jaunisse ?
Pouvez-vous aussi nous confirmer qu’à l’échelle européenne, aucune distorsion de concurrence ne sera possible, et je pense notamment à l’Allemagne ?
Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire :
Nous savions très bien que nous étions sur la voie d’une progression qui nous a mené à la fin de l’année 2023 au plus tard à la sortie des néonicotinoïdes. C’était d’ailleurs le sens de la loi que vous avez voté qui permettait de déroger mais, dans le même temps, essayait de trouver des solutions alternatives. La difficulté dans laquelle on se trouve, c’est qu’effectivement, au milieu de cette campagne, c’est pour ça que nous avions demandé une troisième dérogation, nous nous apprêtions à expérimenter plus avant encore un certain nombre de solution qui commencent à être sur la table mais qui ne sont pas abouties. Cette décision nous impose à prendre un certain nombre de décisions effectivement vis-à-vis des planteurs et vis-à-vis de la filière tout entière.
Vis-à-vis des planteurs, c’est d’abord, à court terme, de leur garantir que sur 2023, en cas d’apparition de jaunisse, c’est qu’ils puissent être couvert intégralement des pertes qu’ils pourraient avoir du fait de l’apparition par les pucerons de la jaunisse.
Deuxième élément, c’est de faire en sorte que nous rassurions aussi les industriels car un certain nombre d’industriels ont besoin de betteraves pour faire tourner et ont produit des investissements importants donc nous allons y travailler pour faire en sorte qu’on soit au rendez-vous sur cet élément-là.
Troisième élément, la recherche et l’innovation, qui nous faut accélérer à la fois avec le programme tel qu’il avait été lancé et par ailleurs avec des dispositions, y compris phytosanitaires, qui sont existantes et utilisables aujourd’hui et avec des itinéraires tactiques qui leur permettent de répondre.
La démagogie ça serait de dire qu’il ne faut pas respecter le droit européen, d’ailleurs ce n’est pas ce que vous avez dit, le droit européen s’impose à nous et parfois nous a bien protégé dans un certain nombre de domaines. La démagogie ça serait de faire croire qu’il y ait d’autres voies possibles et la responsabilité c’est de dire ce que nous faisons, ce que nous allons faire pour sauver la filière car nous avons besoin de cette filière, vous l’avez dit, pour le sucre, pour l‘éthanol, pour un certain nombre des éléments et donc c’est bien ça qui massivement sera déployé par le Gouvernement pour faire en sorte de donner à court, moyen et long terme de la visibilité enfin à cette filière.
Julien Dive, Député LR de l’Aisne
200 millions d’euros, ce sont les pertes de rendements estimées par les betteraviers à la suite de l’épidémie de la jaunisse qui a décimé des hectares entiers de cultures en 2020. Alors que cette année noire semblait appartenir au passé, le 19 janvier 2023, la cour de justice de l’UE en a décidé autrement. Elle a en effet jugé illégales les dérogations accordées aux agriculteurs pour l’usage des néonicotinoïdes en enrobage de semence. Cette décision est un véritable coup de massue pour la filière betterave-sucre, quelques semaines avant les semis de la campagnes 2023-2024. Les producteurs sont aujourd’hui confrontés à une vérité agronomique qui est à contre-courant des décisions prises par la CGUE. Alors que ça fait des semaines qu’on entend le ministre de la Transition écologique se positionner contre les betteraviers, il a fallu cet arrêté brutal pour être obligé d’agir dans l’urgence et sortir de cette impasse.
Monsieur le ministre de l’Agriculture, vous proposez un plan d’action en soutien à la filière mais il nous faut des engagements concrets et durables. Le plan national de recherche et d’innovation que vous mentionnez ne demande pas seulement de l’argent mais aussi du temps, et le temps de nos 24000 betteraviers est compté. Aussi vous évoquez dans ce plan d’action un accompagnent financier, mais nos producteurs de pommes de terre féculières se souviennent encore de ces promesses non tenues. Alors où comptez-vous chercher ces fonds ? Quelles en sont les règles ? Avec ou sans plafond ? Avec ou sans franchise ? En dehors de la règle de minimis ? Aujourd’hui, aucun pays membre ne peut déroger à l’interdiction des néonicotinoïdes enrobés sur des graines de betteraves, sauf l’Allemagne, deuxième producteur de betteraves à sucre en Europe après la France, qui feinte cet arrêté en utilisant des insecticides pulvérisés que vous interdisez en France. Les mêmes règles en UE doivent s’appliquer pour tous. Monsieur le Ministre, comptez-vous monter au créneau pour proposer l’instauration des mêmes règles du jeu au sein de l’UE pour préserver notre souveraineté agricole et permettre aux agriculteurs français de fournir le sucre, le bioéthanol, le gel hydroalcoolique dont nous avons besoin chaque jour ?
Marc Fesneau :
Il était prévu que nous sortions en 3 ans par une dérogation sur simplement l’enrobage des semences et la décision de la cour de justice vient interrompre le processus dans lequel nous étions lancé et ça vient durement interrompre le processus. Pourquoi ? Car nous attentions une troisième année d’expérimentation et, c’est ce qui avait été décidé par le Gouvernement, c’est de lancer la troisième année d’expérimentation pour enfin valider les solutions car ce n’est pas de la magie les solutions, les solutions c’est de la recherche, du temps et de l’innovation qu’il faut mettre en œuvre.
1er élément, qui permet aussi de répondre à Lise Magnier, évidement la décision de la cour de justice va s‘appliquer à l’ensemble des pays européens. Et donc, s’il y avait un besoin, et d’ailleurs c’est le processus dans lequel on va se lancer, nous activerons la clause de sauvegarde pour éviter que des distorsions se créent à l’intérieur de l’UE
Deuxième élément, je le dis sur l’engament par rapport à la filière, évidemment c’est un engagement qui sera tenu, de couverture de l’intégralité des pertes sur la jaunisse. Je rappelle que c’est pour l’urgence. Car il faut répondre en urgence aux planteurs. Et il faut continuer à prolonger la recherche, à la fois sur les itinéraires techniques plus classiques et puis par ailleurs à travers le PNRI. Je sais, vous avez raison, c’est long. Il n’y a pas d’autre choix, et de toute façon nous étions dans la tendance d’interdire les néonicotinoïdes car c’est la loi qui avait été votée à l’Assemblée nationale et au Sénat sous une forme de compromis avec la filière.
Voilà le travail que nous avons à faire Monsieur le Député, je compte sur nous tous pour faire en sorte que nous puissions envoyer ces messages à la filière, ceux du court terme et ceux du moyen et long terme car, comme vous l’avez dit, c’est une filière très importante pour la France et c’est une filière qui compte beaucoup en termes de souveraineté.
Michelle Peyron, Députée Renaissance de Seine-et-Marne
La cour de justice de l’UE a rendu une décision de bannir les dérogations aux néonicotinoïdes. Suite à l’interdiction des nni en 2018 et une épidémie de jaunisse qui avait décimé les parcelles de betteraves sucrières, c’est toute une filière qui était en danger. Nous avions donc mis en place une dérogation qui devait courir jusqu’en juillet 2023 et des moyens massifs pour la recherche afin de laisser le temps pour trouver une alternative viable, en clair pas d’interdiction sans solution.
J’ai rencontré les agriculteurs de Seine-et-Marne ce vendredi suite à la décision de la CGUE. Leur inquiétude est forte et réelle. Cette décision est brutale pour nos agriculteurs en pleine campagne de semence. Brutale quand d’autres pays européens sont bien moins respectueux en environnement et que les recherches sont toujours en cours. Nos agriculteurs ont toujours fait preuve de soutien envers ces recherches d’alternative. Je souhaite assurer que le groupe Renaissance est aux cotés des agriculteurs et partage leurs inquiétudes. C’est aujourd’hui 45 000 emplois de la filière française qui sont menacés suite à cette décision. C’est un enjeux plus large relatif à notre souveraineté alimentaire face à des pays hors UE qui n’ont pas ce type d’interdiction. Il existe un vrai risque d’abandon de la part des agriculteurs de cette culture car serait jugée trop peu rentable. Les solutions de remplacements sont bien avancées mais sont pour l’heure pas assez satisfaisantes. Les agriculteurs ont besoin de signes forts de notre part.
Monsieur le Ministre, quelles sont les solutions à court terme pour les agriculteurs dont les semences sont en cours ? Quelles seront les garanties apportées en soutien aux agriculteurs et à la recherche des solutions alternatives ?
Marc Fesneau :
Vous êtes dans un département éminemment concerné par ce sujet, d’abord car un département dont on connait l’importance en termes de production de betteraves et aussi car c’est un des départements qui a été le plus touché par les épisodes de jaunisse à cause à la fois des dérèglements climatiques et donc de l’impact que ça peut avoir sur la prolifération des pucerons qui sont liés à la jaunisse.
Je ne reviens pas sur ce que j’ai dit mais évidemment le Gouvernement sera au rendez-vous. Comme il a été au rendez-vous sur la filière viticole, sur la filière aviaire et sur la filière porcine. Il a été au rendez-vous car il veut préserver la souveraineté alimentaire de notre pays. Et donc nous avons besoin de conforter le monde agricole sur ce domaine.
Voilà les éléments factuels :
Premier élément : un plan d’accompagnent sur 2023 qui puisse couvrir le risque de perte de récolte sur la jaunisse.
Deuxième élément : la recherche. Il me semble que la recherche est un élément très important et fondamentale, en particulier la recherche sur la semence. Nous avons besoin d’accompagner, j’en parlais hier avec les semenciers, les techniques de recherches qui permettront d’avoir des semences qui seront des betteraves résistantes à la jaunisse. C’est sans doute le meilleur moyen pour faire face à ça.
Sur la question industrielle, je le dis sous le regard de mon collègue Lescure, on aura besoin de travailler avec la filière pour assurer que les outils industriels soient préservés. Car évidemment, sans outil industriel, il n’y a pas de planteur et sans planteur il n’y a pas d’outil industriel. C’est un élément de préoccupation éminent, et particulièrement dans votre département.
Il faut continuer à déployer nos dispositifs de recherche. Tous les sujets de cette nature en termes de produits phytosanitaires, il faut les poser au niveau européen. Dès lors qu’on commence à avoir des dispositifs différents en France que dans les autres pays, on crée les conditions d’une distorsion qui n’est pas acceptable. C’est tout le combat que nous menons, à la fois pour être sur la tendance de réduction des produits phytosanitaires et que nous le fassions au niveau européen et pas ailleurs.