L’objectif de cette étude est de décrire une partie des sites d’expérimentation afin de mieux connaître le réseau post inscription et d’étudier également le comportement des variétés, dans des conditions de culture bien caractérisées.
Sélectionner le réseau à analyser
Afin de réaliser cette étude, il a fallu sélectionner un ensemble d’essais rassemblant différentes conditions. Le premier point concerne la répartition géographique ; les 27 essais choisis pour la suite du travail représentent une bonne partie de l’ensemble des zones de culture de la betterave (figure 1).
Un autre point d’intérêt porte sur le choix des années à étudier. Pour cette analyse, le choix s’est porté sur les années 2016, 2017 et 2018. En effet, ces années présentent des conditions climatiques contrastées (figure 2). L’année 2016 s’est accompagnée d’un excès d’eau au printemps et d’une température relativement faible. L’année 2017 représentait une année moyenne d’un point de vue climatique tant par la température que par la présence d’eau. L’année 2018, quant à elle, a subi une forte sécheresse durant l’été, décrite par une forte température et par un manque d’eau disponible.
Le choix de ces 3 années permet également d’obtenir un maximum de variétés en commun à toutes les expérimentations. On retrouve 21 variétés dont on a mesuré le rendement racine et la richesse associés pour chaque essai. Les résultats de ces variétés représentent également le contraste observé entre les 3 années (figure 3). En 2016, les variétés ont été faiblement touchées par l’excès d’eau au printemps ; elles présentent un rendement racine moyen et une belle diversité de richesse. En 2017, le rendement racine a été exceptionnellement élevé et la richesse présente aussi une belle diversité. En 2018, fortement touchées par la sécheresse, les variétés ont eu un rendement racine assez bas, quelque peu rattrapé par une richesse plus élevée.
Pour chacun des sites sélectionnés, un grand nombre d’indicateurs est rassemblé. Ces indicateurs représentent différents types de stress à étudier (stress hydrique, stress azoté, stress lié à la lumière, à la température ou à la durée des cycles). Les indicateurs sont répartis en deux types reflétant les données utilisées et la difficulté d’obtention : soit des indicateurs phénoclimatiques qui sont généralement faciles à obtenir, soit des indicateurs agronomiques, qui sont plus coûteux. Chacun de ces indicateurs est calculé sur différentes phases de culture de la betterave : du semis à la levée (P1), de la levée à la couverture foliaire (P2), de la couverture foliaire à la récolte (P3) et sur l’ensemble du cycle (CC).
Décrire les sites d’expérimentation
Pour tester le pouvoir descriptif des indicateurs par rapport aux variations du rendement, une analyse statistique est établie. Elle consiste en l’utilisation d’un modèle de type PLS (Partial Least Squares regression) pour expliquer le rendement du poids racine à partir des indicateurs environnementaux. Pour mesurer la performance du modèle, deux indices de performances sont calculés : le coefficient de détermination du modèle (R²) et l’erreur de prédiction (RMSEP). Le modèle obtenu a un R² de 0,54 et un RMSEP de 10,9 t/ha (figure 4).
A partir des indicateurs, les sites d’expérimentation sont répartis dans un arbre de classification (figure 5). La combinaison de l’expertise et de l’analyse du pouvoir explicatif du nombre de groupes sur la variation de rendement a permis de séparer les sites en trois groupes distincts, expliquant 53 % de la variation du rendement. Ces trois groupes ainsi créés peuvent ensuite être décrits par les indicateurs sélectionnés : le groupe 1 rassemblant les essais de 2018 est décrit comme un environnement avec des températures et un rayonnement plus élevés que la moyenne des autres essais et un rendement racine ainsi qu’un bilan hydrique plus faible que la moyenne des autres essais ; le groupe 2 regroupant une partie des essais de 2017 est décrit comme un environnement avec un rendement racine et un bilan hydrique en P3 supérieur à la moyenne des autres essais ainsi qu’un bilan hydrique en P1 inférieur à la moyenne des autres essais ; le groupe 3, dans lequel on retrouve tous les essais de 2016 et une partie des essais de 2017, est décrit comme un environnement avec un bilan hydrique en P1 et en P2 plus élevé que la moyenne des autres essais et une température plus faible que le moyenne des autres essais.
C’est un premier résultat intéressant qui correspond bien aux informations dont on dispose sur les différents sites d’expérimentation.
Faire un lien entre variétés et sites d’expérimentation
La suite de cette étude consiste à décrire le lien entre les variétés et les environnements associés. À cette fin, pour chaque site d’expérimentation, chaque variété va être comparée aux autres variétés cultivées au même endroit ; c’est l’analyse des interactions génotype-environnement (IGE). De la même manière que précédemment, on peut établir un arbre de classification des sites d’expérimentation en se basant cette fois sur le comportement des variétés sur ce site (figure 6). Afin d’expliquer les 52 % de la variation du rendement racine, l’arbre doit être cette fois séparé en six groupes, contre trois groupes pour l’arbre de classification fait à partir des indicateurs environnementaux. Cela peut indiquer une faible importance des IGE dans le réseau sélectionné.
Les groupes formés sont très hétérogènes, certains essais se retrouvent même isolés. Il s’agit d’essais spécifiques sur lesquels on retrouve des stress particuliers (sites à forte pression rhizomanie ou forte présence de cercosporiose) qui ne sont pas liés à des stress abiotiques. Contrairement à la classification précédente, les essais de 2018 sont répartis dans plusieurs groupes et sont ainsi mélangés aux essais de 2017. Les essais de 2016, quant à eux, sont presque tous rassemblés dans un seul groupe.
Pour chaque groupe, il est possible d’étudier si les indicateurs environnementaux sont significativement différents de la moyenne. Ainsi, pour le groupe 1, les indicateurs de stress hydrique des P1 et P2 sont plus faibles que la moyenne des autres essais ; pour le groupe 4, les indicateurs de stress hydrique de la P3 sont plus élevés que la moyenne des autres essais. En revanche, pour le groupe 2, aucun indicateur ne ressort significativement ; cela signifie que ce ne sont pas les indicateurs que l’on a sélectionnés qui définissent ce groupe. Il est possible que ce groupe soit lié à un stress qui n’a pas été étudié dans l’analyse.
Enfin, lors de l’analyse, il est important d’étudier les corrélations qui existent entre les différents indicateurs sélectionnés mais aussi avec d’autres indicateurs qui ne sont pas utilisés dans l’étude. En effet, pour le groupe 5, par exemple, un indicateur lié à l’irrigation en P3 est significativement différent des autres essais. Cet indicateur est fortement corrélé à la notation de gravité cercosporiose évaluée chaque année par les experts sur le terrain.
Malgré les faibles IGE détectés dans le réseau étudié, des informations sur la structure des expérimentations et sur le comportement des variétés par rapport à celle-ci ont pu être mises en valeur. Afin d’aller plus loin dans l’étude de la caractérisation du réseau d’essais post inscription de l’ITB, notamment concernant le stress hydrique qui est une préoccupation majeure actuelle, ces études vont également être réalisées sur des essais spécifiques au stress hydrique.
Ce projet, terminé en décembre 2020, avait pour objectif de mieux caractériser les variétés pour prédire leurs performances dans une large gamme d’environnements. Ce travail a été réalisé sur diverses cultures (betterave, maïs, pois, tournesol) dans les réseaux d’inscription en 2014 et en 2015 et de post inscription en 2016. L’étude s’est concentrée sur l’analyse des stress abiotiques (indépendants des êtres vivants), et en premier lieu le stress hydrique. Ce projet a permis d’obtenir une description du réseau ainsi que des informations sur les interactions entre variétés et sites d’expérimentation. Les résultats de ce projet sont très prometteurs, notamment pour la betterave qui obtient les résultats les plus précis.
Un indicateur est un outil d’évaluation qui permet d’obtenir des informations sur les conditions de croissance tout au long de la culture. Cela comprend l’ensemble des variables climatiques, mais aussi des informations sur la durée des cycles, sur les capacités d’absorption de minéraux, sur les maladies, etc.
Ces indicateurs peuvent être calculés uniquement à partir de données climatiques et phénologiques (stades de croissance et seuils de tolérance), l’indicateur est alors dit « phénoclimatique », ou calculés à partir de données agronomiques et nécessitant le recours à des modèles de culture, l’indicateur est alors dit « agronomique ».