Face à un marché instable, Cristal Union ajuste ses surfaces. Après une augmentation en 2023 à 1 700 ha, le groupe sucrier veut éviter une surproduction « qui asphyxierait le marché ». Ses adhérents n’ont plus cultivé que 1 200 hectares de betterave bio en 2024. « Nous allons repartir sur les mêmes surfaces cette année », indique William Huet, directeur agricole adjoint chez Cristal Union. La prudence s’impose, alors que la filière peine à se structurer durablement.
De son côté, Tereos a suspendu la production de sucre bio de betteraves. En novembre 2023, le secrétaire général de Tereos, David Sergent, avait annoncé aux 88 planteurs de betteraves bio que le groupe coopératif observait « une forte baisse de la demande depuis plusieurs mois en sucre et alcool de la part des clients sur le marché bio, avec un réel impact sur le volume des ventes ». Les quelques 1 000 hectares de betteraves bio étaient envoyés vers la sucrerie d’Artenay (Loiret). Aujourd’hui, les stocks sont encore suffisants pour assurer des livraisons auprès des clients, « il n’y aura pas de betteraves bio cette année », indique Alain Carré, membre du conseil d’administration de Tereos.
En France comme en Europe, le sucre bio reste largement dominé par le sucre de canne, souvent perçu comme plus naturel par les consommateurs.
La betterave peine à s’imposer en grande distribution et se cantonne principalement à la transformation agroalimentaire. « Le marché est avant tout BtoB, chez les transformateurs industriels », constate William Huet. Quelques marques spécialisées parviennent à exister en supermarchés et en magasins bio.
Cristal Union produit la totalité de son sucre bio dans sa sucrerie de Corbeilles-en-Gâtinais (Loiret). Tandis que le jus sucré est transformé en alcool à la distillerie d’Arcis-Sur-Aube (Aube). Produire du sucre bio de betterave impose un calendrier strict. Les betteraves doivent être récoltées entre mi-octobre et fin octobre pour éviter toute perte de qualité. En 2024, elles ont été par la suite transformées dans une fenêtre de sept jours en milieu de campagne sucrière conventionnelle.
Des rendements encore limités
Le rendement moyen 2024 de la betterave bio s’établit à 46 tonnes de betteraves par hectare, bien en dessous du conventionnel qui a atteint 80 t/ha.
Le prix de la betterave bio a connu une légère hausse ces dernières années : 80 €/t en 2023, contre 75 €/t en 2019. Mais cette progression reste modérée, largement influencée par les prix des sucres bio de canne. William Huet rappelle que le groupe Cristal Union peut faire de la betterave bio « parce qu’on fait de la betterave conventionnelle ». La filière ne pourrait pas survivre sans être adossée à la betterave conventionnelle, qui absorbe les charges industrielles des sucreries.
Le désherbage reste un problème majeur en bio en raison du besoin de main-d’œuvre. Cristal Union a donc mis en place des essais variétés en partenariat avec l’ITB et testé la robotisation du désherbage. Aujourd’hui, 24 robots sont utilisés par les planteurs. La robotisation et l’innovation technique seront essentielles pour assurer la viabilité de la filière betterave bio à long terme.