Ils sont six, six agriculteurs-éleveurs laitiers de vaches allaitantes et aviculteurs, tous installés au cœur du Pays de Caux en Normandie. Ils ont créé la SAS Caux Avenir Biogaz pour diversifier leurs activités et valoriser au mieux les matières organiques et les coproduits de leurs exploitations. Didier Bardin, Anthony Bergère, Samuel Bréant, Richard Goupil, Kévin Levesque et Wilfried Vimont travaillaient déjà ensemble à la CUMA du Progrès présidée par Benoit Geulin à Tocqueville-les-Murs. Didier Bardin est président de la SAS et les autres associés sont directeurs généraux.
Le projet de méthanisation a mûri chez chacun d’eux. « Nous mettions les fumiers en plaine qui fumaient et nous perdions le gaz. Nous avons visité plusieurs sites de production en Allemagne et le process de méthanisation retenu est allemand », explique Richard Goupil, dont le fils Adrien est salarié de la SAS. Il a suivi une formation de spécialisation dans la conduite d’une unité de méthanisation. Il assure la conduite et la maintenance de l’unité de production avec Romain Le Provot.
Le temps a fait le reste pour aboutir à la concrétisation du site de production de biogaz. Un long cheminement s’est déroulé, les six planteurs ont fait appel à la société Novatech, l’une des spécialistes de la méthanisation agricole en France, pour réaliser l’installation sur le site de Limpiville (76) avec l’entreprise Gazfio, leader du marché français du transport et de la distribution de gaz plus spécialement chargée de l’épuration du biogaz.
L’unité de production comprend deux digesteurs et un post-digesteur. Les matières organiques sont stockées en silos dans un bâtiment sur lequel ont été installés 900 mètres carrés de panneaux solaires photovoltaïques, qui fournissent 20 % de la consommation annuelle des méthaniseurs. Le choix de trois digesteurs a été fait pour plus de souplesse dans la maintenance du site.
La consommation de gaz de 4 000 foyers
C’est une unité de méthanisation de taille moyenne approvisionnée uniquement par les fermes des six associés, qui n’ont pas changé leurs pratiques culturales pour alimenter les méthaniseurs. Le site produit 199 Nm3/h de gaz et alimente l’équivalent de la consommation de 4 000 foyers situés dans plusieurs cantons environnants (Bolbec, Goderville, Valmont et Fécamp).
Au total 90 tonnes/jour de matières organiques sont utilisées dans les digesteurs, effluents d’élevage, fumier, lisier, soit 63 % du tonnage total, ainsi que des CIVE (cultures intermédiaires à vocation énergétique) notamment du seigle, ainsi que des pulpes et radicelles de betteraves sucrières (8 %), du maïs ensilage, des déchets de pommes de terre et des poussières de céréales.
Le projet d’un coût de 8,5 M€ a été subventionné à hauteur de 6 % par l’Ademe (agence de l’environnement et de la maîtrise des énergies) et une demande d’aide à la Région Normandie est à l’étude. Un contrat a été signé avec le fournisseur de gaz et d’électricité Engie sur 15 ans avec un retour sur investissement de 8 ans.
Une confiance mutuelle
La première injection de biogaz dans le réseau de GRDF qui se situe à 1,2 km du site de production a eu lieu fin 2023.
Les exploitations agricoles des six planteurs associés se situent en moyenne à 6 km du site. Le projet a été présenté aux élus et aux habitants également concernés par le plan d’épandage des digestats (déchets digérés de la méthanisation) et a reçu un accueil favorable, compte tenu aussi de la confiance accordée aux six agriculteurs associés, qui sont installés depuis longtemps dans la région. Aucun village n’est traversé et impacté par le trafic d’approvisionnement et sorties de matières du site de production.
Le digestat est épandu sur les parcelles agricoles des six planteurs associés, soit sur une surface de 1 000 hectares. La nouvelle unité de production de biogaz et l’usage des fertilisants produits doivent permettre une économie importante d’engrais chimiques et moins d’émissions de CO2. Les agriculteurs estiment que la réduction d’intrants chimiques sur leurs terres est de 50 % environ.