Sans surprise, l’arrivée de Trump à la Maison Blanche est tonitruante. En quelques heures, il a fait plier le président socialiste colombien qui refusait l’atterrissage de deux avions militaires remplis de migrants expulsés, avec la menace d’imposer des droits de douane de 25 %, puis de 50 %, sur les produits colombiens entrant aux États-Unis. Le droit de douane est l’arme fatale du nouveau président américain. À compter du 1er février 2025, il promet que les importations canadiennes, dont le canola, seront soumises à une taxation de 25 %. L’annonce a déjà eu un effet sur le colza en Europe, qui a perdu une vingtaine d’euros par tonne en quelques jours.

L’effet n’est pas neutre. Une tonne de canola entrant aux États-Unis coûte 440 dollars américains la tonne. Avec une taxe de 25 %, la valeur serait portée à 550 $/t, un prix déconnecté du marché tant pour les huiles, que les biocarburants ou les tourteaux, comparé à la valeur marchande de la graine de soja ou autre. Les Canadiens se tourneraient alors vers l’Europe pour écouler leur marchandise. C’est un scénario parmi d’autres, car Trump a aussi promis de taxer les importations européennes de 10 ou 20 %, et les importations chinoises de 60 %. Et la Chine comme l’Europe pourraient à leur tour taxer les importations américaines. Chaque décision aurait pour effet de réorienter des flux et modifier les prix.

À date, la graine de colza sur le marché physique Fob Moselle s’échange à 530 €/t (525 €/t pour le rendu Rouen) en léger repli, mais toujours dans la fourchette de variation de cours de 500 à 550 €/t. Sur Euronext, les échéances de février, mais surtout de mai, qui représentent 60 % des échanges, sont surveillées de très près. Elles naviguent en eaux basses à 525 €/t, mais résistent tout de même malgré l’ambiance de guerre commerciale qu’entretient Trump. La graine de tournesol en Europe est assez résistante, autour de 630 €/t, un cours soutenu notamment parce que la guerre en Ukraine se poursuit et nuit aux exportations de graines et d’huile de tournesol, dont le pays est le premier producteur mondial.

Les cours du soja à Chicago se maintiennent à plus 380 $, sans toutefois atteindre le seuil des 400 $ envisagés avec l’annonce des droits de douane sur le canola canadien. Il faut dire que la production américaine de 130 Mt, dont 50 sont exportés, est en concurrence avec la production record du Brésil de 167,7 Mt de soja, soit une augmentation de 9,4 % par rapport à la saison précédente. Les exportations devraient atteindre un niveau record de 104,1 Mt, en hausse de 5,9 %, dont 65 Mt à destination de la Chine. Et non seulement les disponibilités du Brésil sont énormes, mais la monnaie, le real, dévisse par rapport au dollar, renforçant encore la compétitivité de la graine brésilienne. Un dollar fort, encore un effet Trump…