La campagne betteravière en cours envoie plusieurs signaux que nous devons prendre en compte. Je souhaite ici en développer trois principaux.
En premier lieu, elle souligne l’importance de l’agronomie et d’un choix variétal judicieux. Les conditions humides et la forte pression maladies que nous avons connues tout au long du cycle végétatif de la betterave nous rappellent qu’il nous faut véritablement choisir la variété la plus adaptée à chaque parcelle, notamment du point de vue de son historique sanitaire. Redisons aussi que la betterave est une culture exigeante qui requiert des sols en bon état et suffisamment dotés en éléments minéraux pour bien alimenter la plante.
En second lieu, cette campagne confirme que la progression du rendement betteravier n’est plus automatique. Pour la première fois depuis 2007, la moyenne (5 ans) du rendement national betteravier moyen repasse sous la barre des 80 t/ha. Il faut y voir la conséquence directe des aléas climatiques (semis tardifs en raison des pluies et faible ensoleillement) mais aussi celle de l’affaiblissement de notre boîte à outils. La protection de nos betteraves repose désormais sur un nombre très restreint de molécules, elle est donc fragilisée et plus aucune distorsion de concurrence ne peut être tolérée. Elle souligne aussi le challenge que nos sélectionneurs doivent relever, en proposant des variétés multi-tolérantes qui restent productives. Il est donc essentiel qu’ils disposent, eux aussi, des outils adaptés avec un cadre réglementaire européen autorisant les nouvelles techniques génomiques (NBT ou NGT).
Enfin, au regard de tout ce qui précède, nous devons réfléchir à la gestion de nos surfaces en 2025. Car un constat s’impose : pour beaucoup, le revenu betteravier de 2024 sera en net recul cette année compte tenu d’un rendement décevant et d’un prix de betterave en baisse. Il pourrait même être négatif pour ceux dont le rendement est inférieur à la moyenne nationale. Or, les perspectives de marché sont incertaines pour 2025, tout comme le contexte géopolitique, mais nous savons avec certitude que nos coûts de production continuent à progresser, ils sont proches de 3 000 euros par hectare. Pour rester attractive, la culture doit apporter de la rentabilité à nos fermes. Cette rentabilité est nécessaire pour pouvoir vivre de notre métier mais aussi pour nous permettre d’investir. S’il est évident que nos groupes sucriers sont confrontés aux mêmes exigences économiques, il importe qu’ils veillent à un juste partage de la valeur, afin de garantir un approvisionnement suffisant des usines, gage de compétitivité de la filière.