À Rouen, le prix du blé est repassé en semaine 47 (close le 29 novembre dernier) sous la barre des 210 € la tonne. L’offre mondiale de maïs abondante affaiblit aussi le cours de la céréale, victime collatérale de la prochaine taxation des échanges commerciaux entre les États-Unis et le Mexique.

Les céréaliers français vendent toujours à perte leur récolte mais, en Ukraine, leurs collègues ont retrouvé l’entrain perdu en 2022, depuis le début du conflit. Lors de cette campagne, l’essentiel de leurs bénéfices sont les économies réalisées sur les frais de transport et d’assurance. Ils sont revenus à des niveaux très supportables depuis que le marché ukrainien a quasiment retrouvé sa fluidité d’avant-guerre. Or, en 2022, ces frais s’élevaient à plus de 100 € la tonne. Autre facteur de satisfaction, la neige tombée à la fin du mois dernier qui protègera les céréales d’hiver des grands froids.

À vrai dire, les cours des céréales évoluent de nouveau au gré des conditions météorologiques récentes de la planète, plutôt favorables, qu’en fonction de l’intensité des combats dans le Donbass en Ukraine.

La baisse de 2 millions d’hectares (Mha) de la surface de blé semée dans le monde – la seconde en deux ans – n’a eu aucun impact sur les marchés. Selon le Conseil international des céréales, elle passerait à 222 Mha. Or, avec 224 Mha emblavés la campagne passée, la production mondiale de blé était déficitaire.

Surfaces de blé en hausse dans l’UE

Parmi les grands pays exportateurs de céréales dans l’hémisphère nord, seule l’Union européenne implanterait davantage de blé (26,1Mha, +1,2 Mha) qu’à l’automne 2023. Des conditions climatiques bien plus favorables expliquent cette progression de 4,7 %. Mais la surface emblavée demeure inférieure à son niveau de 2022-2023 de 27 Mha.

Le mois prochain, Agreste et la Commission européenne diffuseront davantage de détails. Mais le 25 novembre dernier, FranceAgrimer soulignait des semis de blé réalisés à plus de 90 % sur l’ensemble du territoire national.

La Russie (27,2 Mha), le Canada (10,3 Mha) et les États-Unis (15,2 Mha) ont semé 1 Mha de moins que l’an passé. Leur surface de blé serait ainsi inférieure de 2 % par rapport à l’année dernière.

Mais la Chine en cultiverait 23,7 Mha, comme l’an passé malgré la baisse dissuasive de 20 % des prix auxquels les paysans vendent leurs grains.

Dans l’hémisphère sud, la prochaine période de semis est celle du maïs en Argentine où des foyers de cicadelles sont réapparus. Aussi, la superficie de maïs pourrait diminuer de 15 % et la récolte de 6 %. Mais au Brésil, la Safrina sera semée au début de l’année prochaine.

La seconde partie de la campagne de commercialisation 2023-2034 des céréales débute avec les moissons d’orges et de blé dans l’hémisphère sud.

Parmi les pays producteurs de blé qui voient leur production croître, l’Australie affiche la progression la plus importante (31,3 Mt ; +21 % sur un an). Il est encore trop tôt pour dresser un bilan définitif de sa production, mais elle aurait pu être plus élevée si certaines régions n’avaient pas été affectées par l’El Niño. « La hausse de 21 % en glissement annuel est principalement liée à des perspectives de rendement excellentes, voire records, en Nouvelle-Galles du Sud », souligne le CIC. Mais la récolte est à son plus bas niveau depuis des années en Australie-Méridionale et dans le Victoria en raison d’un déficit chronique de pluies.

En Afrique du Sud, la récolte de blé plafonnerait aussi autour de 2 Mt pour les mêmes raisons.

Mais la principale céréale cultivée en Afrique subsaharienne est le maïs. Or, seules 83,8 Mt (- 3 %) seront récoltées cet été austral, la plus faible moisson de ces cinq dernières années. En Zambie et au Zimbabwe, l’effondrement de moitié de la production va mettre en difficulté des milliers de petits paysans. Faute de moyens financiers, les importations subsahariennes de maïs (4 Mt) seront probablement insuffisantes pour compenser ces pertes.