C’est un coup dur pour la Sucrerie Ouvré de Souppes-sur-Loing (Seine-et-Marne). À la suite de difficultés de fabrication majeures, la société familiale indépendante a annoncé à ses planteurs, le 25 octobre dernier, que les betteraves seraient transformées « en travail à façon » dans les sucreries de Cristal Union à proximité jusqu’à la fin de la campagne.

Dans une lettre adressée aux planteurs, le président directeur général, Julien Ouvré, a indiqué que la sucrerie avait rencontré des difficultés opérationnelles et de fabrication : « à la suite de la panne majeure du débourbeur et de l’arrêt d’usine en deuxième semaine, le process a été déréglé et cela a entraîné des problèmes de maintenance. »

Bruno Lanneau, un des membres planteurs de la Commission interprofessionnelle, salue la « difficile décision » prise par Julien Ouvré. « Il a fait appel au groupe Cristal Union pour que nos betteraves soient traitées dans les meilleurs délais possibles ».

La plus grosse partie des betteraves ira donc à Corbeilles-en-Gâtinais (Loiret), située à 20 km de Souppes, mais les sucreries de Pithiviers-le-Vieil et d’Arcis-sur-Aube seront aussi sollicitées. Cristal Union a élaboré de nouveaux plannings pour ses trois sucreries afin d’y intégrer les réceptions des betteraves venant de Souppes.

Pertes en silo

La campagne ayant pris beaucoup de retard, certains silos connaissent des problèmes de conservation, avec des taux de betteraves malades très élevés et des richesses basses. « Certaines betteraves arrachées entre le 8 et le 25 octobre vont rester relativement longtemps en silo et vont subir des pertes. Les membres de la Commission Interprofessionnelle s’attachent à les évaluer », note Bruno Lanneau.

Les agriculteurs de Souppes se posent beaucoup de questions. « La société Ouvré a tenu à rassurer ses propres planteurs en leur indiquant par courrier que les règlements de leurs betteraves 2024 et le solde des betteraves 2023 se feront selon les échéances prévues », mentionne Jean-Philippe Garnot, président de la CGB Île-de-France.

En résumé : les enlèvements et réceptions des betteraves sont gérés par Cristal Union, alors que les questions économiques et les contrats sont du ressort de la sucrerie Ouvré.

Ainsi, les contrats des planteurs Souppes avec la Sucrerie Ouvré restent effectifs : ils prévoient pour les betteraves 2024, un règlement de « 26 € payé en cours de campagne, 6 € fin mars et le solde du supplément de prix en janvier suivant ».

« Nous pouvons saluer l’engagement de Cristal Union, qui permet aux planteurs de Souppes d’avoir une récolte de betteraves 2024 qui soit achetée et travaillée », remarque Jean-Philippe Garnot, soulignant les échanges entre l’industriel et les planteurs de la Commission interprofessionnel.

Les changements pour les planteurs de Souppes

La réception des betteraves dans les usines de Cristal Union se fait selon les méthodes du groupe coopératif. Toutes les betteraves sont déterrées. Les betteraves sont réceptionnées selon le principe du forfait collet à 7 %, alors que l’usine de Souppes est restée sur le système du décolletage manuel pour chaque camion prélevé.

La réorganisation des plannings, pour s’insérer dans les réceptions des autres usines, induit un allongement de la campagne qui impose de protéger les betteraves contre un risque de gel. Le bâchage des betteraves est inédit pour les planteurs de Souppes, puisque la sucrerie terminait traditionnellement sa campagne de fabrication début décembre. La majorité des planteurs de Souppes va pouvoir bénéficier d’une prestation de bâchage mécanisé mise en place par Cristal Union pour les betteraves réceptionnées à l’usine de Corbeilles. La Sucrerie Ouvré prend en charge une partie de ce surcoût et le solde sera mutualisé entre les planteurs.

Impact sur Cristal Union

Cet incident bouleverse aussi les plannings des planteurs de Cristal Union. Les premières estimations conduisent à une augmentation des durées de campagne d’environ 4 jours à Arcis-sur-Aube, 12 jours à Pithiviers et 20 jours à Corbeilles-en-Gâtinais. Cette dernière sucrerie devrait tourner jusqu’au 10 janvier. « Il faut souligner la solidarité entre les planteurs des deux sociétés sucrières », relève Jean-Philippe Garnot.

L’organisation de la SICA pulpe Gâtinaise de déshydratation est aussi bouleversée, puisque les pulpes viendront de Corbeilles. « Nos deux entreprises sont liées. On travaille main dans la main avec la sucrerie », explique le président de la SICA, Benoît Timbert.

Et pour l’avenir ? Julien Ouvré a indiqué à ses planteurs s’attacher à « tout mettre en œuvre pour transformer leurs betteraves en 2025 et les années suivantes ».

« C’est un séisme pour les planteurs de Souppes, mais restons calmes et soyons pragmatiques », conclut Jean-Philippe Garnot.