On se souvient de l’exploit historique du marché à terme du sucre brut, la dernière quinzaine de septembre : il a pris plus de 20 % en moins de 10 séances, passant de moins de 19 cts/lb à plus de 23 cts/lb. Depuis, il semble en pause, autour des 22 cts/lb. Mais, derrière cette pause apparente, on peut aussi voir une consolidation. Deux indices pourraient nous le faire penser : la position des spéculateurs, et le niveau de la prime de blanc.
Commençons par les spéculateurs. Ils sont désormais plus modérés dans leurs visions des évolutions à venir : ils étaient, début octobre, acheteurs-nets de 2,1 Mt, ils le sont désormais trois fois moins (0,7 Mt). Mais le marché résiste, et c’est une très bonne nouvelle. Car cela souligne que leur effet sur le marché n’a été que d’impulser une tendance, mais que celle-ci reposait bel et bien sur des fondamentaux. C’est d’ailleurs l’opinion de l’analyste Sucden, qui a publié son dernier bilan mondial le 10 octobre dernier : il anticipe un déficit sur la campagne qui ouvre (octobre 2024 à septembre 2025) de l’ordre de – 1,8 Mt. Et ce, malgré des prévisions encourageantes de l’Asie. La Thaïlande pourrait en effet produire 11 Mt à partir de novembre prochain, contre moins de 9 Mt l’an dernier. Quant à l’Inde, elle devrait produire 32 Mt de sucre : c’est 4 % de plus que l’an dernier, selon l’USDA.
Le deuxième indice d’une consolidation nous vient de la “prime de blanc“. Cette “prime de blanc“ est la simple différence entre la valeur du sucre raffiné et celle du sucre brut. Elle permet de mesurer les coûts du raffinage à destination, mais aussi la demande en sucre immédiatement disponible. Alors qu’elle avait souffert pendant l’envolée du sucre brut, en passant sous les 70 $t, revoilà cette prime autour de 85 $/t. C’est encore deux fois moins que sa valeur d’il y a six mois… Mais la probabilité que les disponibilités à venir en sucre raffiné soient décevantes est élevée, que ce soit d’Europe, où les rendements déçoivent, ou d’Inde, qui ne devrait être qu’anecdotiquement présente sur le marché mondial. En effet, sur les 32 Mt que le géant asiatique va produire, 3 Mt devraient servir à faire de l’éthanol, ne laissant plus de disponibilité pour l’export. Une lente remontée, en continu, de cette prime de blanc n’est donc pas à exclure…
Bref, pendant que le marché directeur, le cours du sucre brut sur le marché mondial, semble faire une pause, les marchés annexes tentent donc de rattraper leur retard. Et le marché européen pourrait suivre. Car le cours du sucre spot est décidément bien à la peine… Sans volume d’échange, il affiche un niveau bien bas, presque 300 €/t de moins que le sucre livré en août dernier (794 €/t). Au rythme où vont les choses, un correctif de cette valeur spot n’est pas à exclure : on ne peut pas imaginer que le marché d’export devienne plus rémunérateur que le marché local !