La métribuzine, un herbicide essentiel pour la culture de la pomme de terre, va être retirée du marché au niveau européen. C’est la décision qu’a prise le Comité permanent des végétaux, animaux, denrées alimentaires et alimentation animale (Scopaff) début octobre. Cet organisme décisionnaire européen rassemble l’ensemble des États membres et décide de l’octroi ou du retrait des autorisations de mise en marché (AMM).
Cet herbicide est utilisé à très faible dose et en mélange, notamment dans le produit Bastille. Son AMM sera retirée sous 6 mois et disposera peut-être d’une possible période de grâce de 12 mois maximum, à la main de l’Anses, qui permettra de couvrir la prochaine campagne.
Ce retrait fait écho au prosulfocarbe, une molécule actuellement visée par des conditions d’emploi spécifiques suite une décision de l’Anses, explique l’Union nationale des producteurs de pommes de terre (UNPT). « Aujourd’hui, 75 % des surfaces de pomme de terre sont désherbées grâce à l’une de ces 2 molécules », rappelle-t-elle
Le risque de concentration des molécules restantes.
Le retrait de la métribuzine est-il vraiment écologique ? Cela reste à démontrer. Pour y répondre, il faut prendre en compte le phénomène de rétrécissement du panel des molécules restantes et le risque d’apparition des résistances. En effet, supprimer des molécules signifie utiliser toujours les mêmes molécules (celles qui restent). Cela aboutit à sélectionner des adventices résistantes, et donc à augmenter les doses utilisées et à réduire l’efficacité du traitement. Le désherbage mécanique serait-il la solution de remplacement ? La pluviométrie des 12 derniers mois laisse dubitatif…
« Trop c’est trop ! »
L’UNPT avait pourtant alerté les pouvoirs publics depuis 2023 sur le risque de disparition de cette molécule. Le syndicat « refuse de voir la filière pomme de terre condamnée par des décisions politico-administratives déconnectées des réalités du terrain ». Ce retrait n’est pas un cas isolé. Il « s’inscrit dans une tendance inquiétante à l’abandon des outils de protection des cultures en pommes de terre », précise le communiqué de l’UNPT. C’est d’ailleurs également le cas pour beaucoup de cultures, notamment la betterave, avec le retrait des néonicotinoïdes.
« Nous demandons à la France un positionnement défensif et pragmatique vis-à-vis de ces substances essentielles de lutte afin de garantir un panel de protection qui « casse » les résistantes végétales et fongiques tout en maintenant un statu quo socio-économique viable pour les agriculteurs. La dérive du tout « principe de précaution », sans solutions alternatives, doit cesser immédiatement, sinon c’est la destinée de la production de pommes de terre en France et en Europe que nous allons sceller », affirme l’UNPT.