Ce n’est pas tous les jours qu’un président de la République visite une usine de frites. C’est ce qu’a fait Emmanuel Macron le 13 mai dernier à Matougues dans la Marne dans le but de communiquer sur les investissements étrangers en France. Parmi eux, ceux que s’apprête à réaliser le Canadien McCain sur ses trois sites implantés dans le Pas-de-Calais (Harnes et Béthune) et en terres marnaises. Le site de Matougues bénéficiera pour sa part de 25 millions d’euros sur un total de 350 M€. Si l’investissement de l’entreprise familiale y est moindre que sur ses autres sites, c’est parce que l’usine champardennaise est la plus récente et donc la plus moderne. Mise en service en 2001, c’est la deuxième en termes de capacité de production. Matougues fabrique 193 000 tonnes de frites surgelées et 5 000 tonnes de flocons déshydratés par an. Les premières sont destinées à la restauration rapide et à la restauration traditionnelle, McDonald’s étant de loin son premier client, aux côtés d’enseignes comme Quick ou KFC. Les flocons entrent, quant à eux, dans la composition des gnocchis et des biscuits industriels.
16 t d’huile végétale
Frites et flocons disposent chacun d’une ligne de production dédiée, celle allouée aux frites étant la plus grande d’Europe avec ses 616 mètres de long. C’est d’ailleurs sur celle-ci que McCain a fléché ses investissements. La friteuse, qui utilise 16 tonnes d’huile végétale (colza, tournesol) renouvelées en continu va être remplacée par une friteuse moins énergivore et qui permettra de récupérer l’énergie. Une nouvelle unité d’enrobage va également être intégrée à la chaîne de production, avant la précuisson. « Cette technologie va permettre de renforcer la croustillance de la frite », explique Thomas Delcroix, le directeur du site. Ces investissements seront effectués d’ici à 2028, avec cinq créations d’emplois à la clé. Un autre investissement est en cours, hors enveloppe des 25 millions d’euros : la construction d’une chaufferie bois, qui permettra, là aussi, de décarboner l’usine.
350 000 t de pommes de terre
Le site marnais emploie 225 salariés travaillant en 5×8. Il tourne 24h/24, environ 310 jours par an. Il dispose d’un stock tampon de 20 000 tonnes de pommes de terre, assurant seize jours de production. Le reste des tubercules est conservé chez les agriculteurs, moyennant rémunération. Ils sont quelque 300 à fournir l’usine de Matougues, tous « situés dans un rayon de 150 kilomètres, dont 45 % issus de l’ex-Champagne-Ardenne », précise le directeur. La surface cultivée couvre 7 000 hectares environ, pour une production annuelle atteignant 350 000 tonnes. Une bonne dizaine de variétés différentes sont utilisées. Les plus gros calibres servent à fabriquer les frites, les plus petits à produire les flocons. Les déchets de production partent dans l’alimentation animale et la méthanisation.
McCain propose trois types de contrats à ses fournisseurs : d’un an (65 % du total), de trois ans (20 %) et, depuis 2022, de six ans (15 %). Ce dernier, conçu pour l’agriculture de régénération, bénéficie d’un accompagnement financier (+5 euros la tonne), d’un soutien bancaire (prêt de 2 000 euros par an et par hectare, McCain prenant en charge les intérêts) et d’une aide technique. « L’objectif est de remettre le sol au cœur du système de production, afin de limiter les effets du changement climatique, sachant que depuis dix ans on perd 1 % de rendement par an », indique le directeur de l’usine de Matougues. Il s’agit de contrats à l’hectare, pas de contrats à la tonne, l’agriculteur s’engageant sur une surface à planter, non sur un volume à livrer.