« Utiliser des plants coupés présente des risques », prévient Solène Garson, ingénieur régional pommes de terre chez Arvalis. Lors de la journée technique organisée à la station Arvalis de Villers-Saint-Christophe, le 20 juin, le message a été martelé, essais à l’appui. « Vu la faible disponibilité en plants sur cette campagne (avec des estimations de 100 000 t de plants français en moins), de nombreux producteurs de pommes de terre ont cherché des solutions pour implanter leur surface, rappelle l’ingénieur. Certains ont utilisé des variétés destinées au grand export, inutilisées jusqu’alors dans nos contrées. D’autres ont diminué la densité ou encore utilisé la coupe des plants. Toutes ces techniques ne sont pas sûres ». Arvalis a mis en place des essais d’opportunité pour évaluer le comportement de la culture en cas de sous-densité ou d’implantation de plants coupés. Ces expérimentations comparent les résultats en plants conventionnels et en plants coupés, le tout avec trois densités différentes (30 000, 38 500, 42 000 plants/ha, sachant que la densité recommandée est de 38 500 pour 130 tubercules/10 kg).

Hétérogénéité et retard de levée

Premiers constats obtenus un mois après l’implantation. La culture implantée en plants coupés s’avère beaucoup plus hétérogène, avec des effets de moutonnements, par rapport à la parcelle de plants certifiés entiers. Les plants coupés lèvent plus tard. Seulement 70 % des plants coupés avaient levé contre 90 % en plants entiers. Néanmoins, le nombre de tiges reste identique dans les deux cas. Reste à attendre la récolte des essais pour réaliser le bilan de l’expérimentation.

Précautions à prendre

Arvalis insiste sur les précautions à prendre en cas de coupe de plants. Tout d’abord, il faut s’assurer que la variété est « coupable ». Il y a un manque de recul sur la plupart des variétés. Les variétés chair ferme sont plus difficilement coupables, vu la matière sèche trop basse et la forme des tubercules. Il faut utiliser un plant certifié sain et sec et surtout, de gros calibre (70 g, supérieurs à 50 mm au minimum).

Dans une note d’information, l’institut rappelle que la pratique de coupe des plants augmente les risques, notamment dans la diffusion d’organismes nuisibles réglementés. Afin qu’elle ait le moins d’impact sur les cultures à venir, Arvalis préconise des conditions d’usage s’apparentant aux bonnes pratiques à respecter en cas de traitements des plants sur table à rouleaux.

Les opérateurs doivent utiliser du matériel propre et désinfecté, notamment entre chaque lot à couper et en cas d’utilisation par différents producteurs. Il faut privilégier les journées ensoleillées (et venteuses) avec peu d’hygrométrie ambiante. La coupe se fera à chaud avec des disques rotatifs à 250 °C, avec parfois l’application de talc afin d’assécher les tubercules. Bien sûr, le plant entier à couper doit être sain et indemne de pourriture avant le coupage. Les tubercules à couper seront réchauffés à plus de 8 °C. Ensuite, les plants coupés doivent être entreposés dans un endroit ventilé pour sécher au plus vite (2 à 5 jours) et cicatriser. La remise en palox est conseillée. En cas d’impossibilité, il faut étaler les lots et surtout ne jamais laisser les plants dans la benne.

L’intervalle de temps entre la réception des plants et la coupe ne doit pas dépasser 10 à 15 jours. De même, le temps entre la coupe et la plantation ne doit pas excéder une semaine. L’idéal étant une coupe le matin pour une plantation l’après-midi dans un sol ressuyé.

Un plant coupé n’est plus certifié

Ne pas respecter ces indications entraine des risques non négligeables. La FN3PT, Fédération nationale des producteurs de plants de pommes de terre, proscrit cette pratique et rappelle que la coupe d’un lot de plant entraîne sa « dé-certification » et qu’il n’est en aucun cas re-certifiable. Cela pose donc la question de la responsabilité du donneur d’ordre de la coupe et de l’éventuel échange ou revente de tels lots (qui de fait est interdite), rappelle Arvalis.

Bien gérer sa densité pour obtenir le bon nombre de tiges

Arvalis rappelle qu’il faut viser environ 160 000 tiges/ha en consommation frite et 200 000 tiges/ha en chair ferme. Le calibre impacte le nombre de tiges. Des résultats d’essais indiquent ainsi la variation du nombre de tiges selon le calibre :

6 tiges en 50/60 mm ; 5,1 tiges en 40/50 mm 4,5 tiges en 35/45 mm ; 3,7 tiges en 28/35 mm

Au-dessus d’un seuil minimal, la densité de plantation a peu d’effets sur le rendement final. Son accroissement influe alors sur la répartition des calibres. Son raisonnement permet ainsi de favoriser l’obtention d’un calibrage déterminé pour le débouché souhaité.

La densité recherchée varie selon la variété, notamment son aptitude à tubériser, le calibre
du plant et le calibre demandé à la vente.