En semant le colza avec une ou plusieurs légumineuses gélives, deux objectifs agronomiques sont recherchés. Tout d’abord, ces plantes améliorent le comportement du colza face aux larves de ravageurs d’automne. De plus, elles restituent de l’azote lorsqu’elles se décomposent au printemps.
« Cultiver le colza avec des plantes compagnes fait partie de nos recommandations dans le cadre de la démarche Colza robuste, complète Mathieu Dulot, ingénieur de développement Champagne-Ardenne. Toutefois, la croissance des légumineuses associées ne doit pas être stoppée ou freinée par le désherbage avant la mi-novembre, au plus tôt. L’objectif est de bénéficier le plus possible de leur action vis-à-vis des altises et de maximiser la production de biomasse. Le programme herbicide s’adapte selon les espèces semées en mélange et à la flore d’adventices les plus préoccupantes. Enfin, les produits s’emploient en réduisant la dose pour éviter au maximum la phytotoxicité. » En revanche, en cas de parcelles très sales, notamment en graminées, Terres Inovia déconseille tout simplement d’introduire des légumineuses (voir encadré).
Féverole : intervention possible en pré-semis et pré-levée
La féverole, la plante compagne la plus utilisée avec le colza, se révèle aussi la plus tolérante aux herbicides. « Pour les herbicides de pré-levée, une réduction de dose est nécessaire, hormis les produits contenant de la napropamide utilisés en présemis », précise Mathieu Dulot.
Ainsi, avec de la féverole, l’application de produits au mode d’action racinaire composés de napropamide solo peut s’effectuer en pré-semis en incorporation sans dépasser la dose 1,5 l/ha. Cette substance active sécurise le désherbage des graminées. Quant à Colzor trio, il associe la napropamide, la clomazone et le diméthachlore. La dose ne doit pas dépasser 3 l/ha en pré-levée.
Viser la post-levée précoce pour l’ensemble des légumineuses
Pour les autres espèces, la stratégie de post-levée précoce est préférable. Le passage se réalise au stade 2 à 4 feuilles. « Luzerne, gesse, trèfles, lotier et fénugrec se situent à un niveau intermédiaire de sensibilité, indique Mathieu Dulot. La lentille est la plus sensible. Dans tous les cas, en mélange, il faut faire attention ». La dose est ajustée. Par exemple, le désherbage peut se construire avec Novall (quinmerac + métazachlore) de 1 à 1,5 l/ha ou Butisan (métazachlore) à 1,2 l/ha ou Alabama à 1 à 1,5 l/ha. De plus, tous ces produits sont efficaces sur les dicotylédones majoritairement rencontrées dans les colzas des rotations betteravières (mourons, matricaires, véroniques …) et les graminées. « Ceux contenant du quinmerac ne peuvent s’utiliser que tous les 3 ans, avertit Mathieu Dulot. Or, sur une rotation blé, betteraves, colza, il faut être vigilant car cette molécule est aussi contenue dans les herbicides betteraves, Goltix Silver et Kezuro ». Quant à ceux composés de métazachlore, la dose ne doit pas dépasser 750 g/ha sur 4 ans ou 500 g/ha sur trois ans.
Ensuite, une intervention plus tardive en post-levée est toujours possible sur un colza associé. Il s’inscrit dans le cadre d’une stratégie « à vue » pour ne cibler que les dicotylédones avec Fox (bifenox) à 1 l/ha. « Ce dernier a un intérêt dans une rotation betteravière puisqu’il est efficace sur chénopodes, mercuriales et véroniques pour nettoyer la parcelle, souligne l’ingénieur. Atic-Aqua, lui aussi sélectif, permet le contrôle du coquelicot. En effet, avec des températures automnales de plus en plus douces, ces adventices printanières lèvent aussi en été ».
Finition en entrée d’hiver
Si la parcelle n’est pas propre en entrée d’hiver, avec notamment des ronds de géranium, de coquelicots, du gaillet et du chardon-marie, Mozzar (halauxifen-méthyl + piclorame) à 0,25 l/ha finit le travail. Neris (aminopyralide ) à 0,25 l/ha est recommandé en présence de matricaires. Callisto (mesotrione) à 0,15 l/ha apporte une bonne efficacité sur sanve, capselle, lamier, stellaire. « En revanche, ces herbicides vont détruire les légumineuses », rappelle Mathieu Dulot. Plus largement, contre les graminées, un passage à l’automne s’effectue avec Kerb flo (propyzamide) à 1,8 l/ha quand il fait froid afin que la molécule ne se dégrade pas rapidement. Enfin, Ielo contrôle la matricaire, le séneçon, le laiteron, le bleuet, tout en gérant les graminées avec de la propyzamide.
En cas de forte infestation de vulpins et ray-grass, le programme antigraminées nécessite la pleine dose et l’absence de légumineuses associées. Il intègre le présemis, la pré-levée et la post-levée tardive avec des herbicides racinaires. Terres Inovia recommande de « miser sur la napropamide (type Colzamid 2 l/ha) en présemis, dont l’efficacité est régulière, et/ou sur des produits de pré-levée à base de chloroacétamides (type Colzor Trio, Terox, Alabama ou Springbok, Novall) ». Pour Novall, la pleine dose est de 1,87 l/ha tous les 4 ans ou de 1,25l/ha tous les 3 ans. Colzor Trio et les associations à base de Terox peuvent être insuffisants sur vulpin. La post-levée précoce avec un herbicide foliaire, composé de FOP ou DIME, visera surtout les repousses de céréales. La cléthodime peut être encore efficace sur vulpin et ray-grass. Kerb flo (propyzanide) à 1,8 l/ha reste la référence en termes d’efficacité pour finaliser le travail et limiter le risque de résistance à la cléthodime.