Quelle sera la moisson de l’été 2024, avec le printemps pourri qui touche toutes les régions françaises et pas mal de pays de l’Ouest européen ? Les dernières prévisions d’Agreste tablent sur un petit recul de 1 à 2 % pour le colza ; la Commission européenne est plus pessimiste et avance plutôt une chute de l’ordre de 10 %, avec une récolte totale européenne de colza de 16 millions de tonnes. Il faut attendre juillet pour s’approcher de la vérité mais, à date, la météo chagrine tous les producteurs d’oléagineux.
Il leur reste tout de même un beau motif de satisfaction. Les prix sont très fermes depuis près d’un trimestre. Le 11 juin, le colza s’échange à 479 €/t sur le marché physique Fob Moselle et 475 €/t pour le physique rendu Rouen, pour la récolte 2023 encore en stock. La récolte 2024 trouve preneur sur le Fob Moselle et le rendu Rouen à un prix un peu moins élevé, dans une fourchette de 465 à 470 €. Sur les marchés à terme, les prix ne sont pas très différents, avec un plus haut à 485 €/t en mai 2025 et un plus bas à 465 €/t en août 2025, quand la récolte de l’an prochain sera dans les silos. C’est loin.
Que les cours du colza restent soutenus tient toujours au fait qu’il y a un marché spécifiquement européen, certes parfois un peu chahuté par les importations ou des événements mondiaux, mais de manière limitée. On a même vu, à certaines périodes, des tendances tout à fait contraires entre les marchés mondiaux et le marché européen. Par conséquent, la toute récente baisse du prix du pétrole n’a pas fait vaciller les cours des oléagineux, du moins en Europe.
Certes, certains analystes s’inquiètent de la forte production de canola au Canada, compte tenu des bonnes conditions météo. StatCan prévoit une récolte de 22,7 millions de tonnes, supérieure de 1% à la récolte 2023, ce qui va donner des volumes pour les exportateurs, notamment vers l’Europe puisque la Chine refuse de s’approvisionner au Canada en raison d’un conflit diplomatique. Autre concurrent de taille pour le colza, le soja, dont la production va encore augmenter, notamment avec une récolte en Amérique du Sud estimée à 220 Mt, contre 201 Mt l’an dernier. À la bourse de Chicago, les prix sont à la baisse.
Le Brésil tient la corde, avec 155 Mt, selon l’USDA, en baisse de 10 Mt, mais qui est compensée par une récolte deux fois plus élevée en Argentine à 50 Mt. Les importations de tourteau de soja par l’Europe devraient être plus soutenues, compte tenu de prix attractifs. D’autant que le vieux continent va devoir se passer des importations de tourteaux provenant de Russie et du Bélarus, qui feront l’objet de droits de douane prohibitifs à partir du 1er juillet, probablement au bénéfice aussi des exportations ukrainiennes. Mais pour l’instant, rien ne semble déstabiliser sérieusement le marché du colza dans l’Hexagone et en Europe.
