Une arrière-saison compliquée d’un point de vue climatique, avec un niveau de tare élevé, des nerfs mis à rude épreuve aussi bien chez les agriculteurs que chez les entrepreneurs : c’est ainsi que Joseph Behr, directeur de la CGB Alsace, a décrit la campagne 2023 à l’assemblée générale du syndicat, le 24 mai à Oberhausbergen. Mais au bout du compte, les rendements 2023 sont « pile dans la moyenne » (83,5 t/ha à 16°S) et les résultats économiques sont « largement positifs », ce qui permet aux planteurs alsaciens de retrouver des marges intéressantes.

Cette rentabilité retrouvée a de quoi satisfaire les responsables du syndicat betteravier qui, en plus, voient les surfaces remonter depuis deux ans grâce aux planteurs historiques et à 130 nouveaux planteurs : de presque 6 000 hectares en 2023, elles sont passées ce printemps à 7 200 ha. Les investissements réalisés à la sucrerie d’Erstein permettraient même d’accepter des surfaces supplémentaires, selon Gérard Lorber, président de la section d’Erstein de Cristal Union.

Comparée au blé et au maïs, la betterave offre une marge brute à l’hectare bien supérieure en 2023 (2 558 €/ha contre 1 012 €/ha pour un maïs et un blé), ce qui n’était de loin pas le cas les deux années précédentes, a fait valoir Joseph Behr. Le coût de production étant lui aussi en hausse (+ 41 % entre 2023 et la période 2010-2020), « il faudra tenir compte de cette nouvelle donne quand le prix baissera ». Dans une région où le maïs est très présent, la betterave constitue aussi « un rempart contre la chrysomèle », valorisant de plus très bien l’irrigation.

Distorsion de concurrence

Pour les betteraviers alsaciens comme pour leurs collègues des autres régions, la défense des moyens de production est plus que jamais à l’ordre du jour. « C’est un combat de tous les instants pour la CGB ». Des avancées ont été obtenues dans le prolongement des manifestations agricoles des derniers mois. Deux dossiers majeurs restent toutefois en suspens, selon Nicolas Rialland, directeur général de la CGB. « L’impossibilité pour les planteurs français d’utiliser le flupyradifurone et l’acétamipride, alors que la totalité des pays betteraviers en Europe ont accès à l’une ou à l’autre de ces molécules, constitue une distorsion de concurrence. Elle les expose à la jaunisse chaque année. ». La concurrence déloyale des producteurs des pays tiers constitue l’autre dossier chaud. Nicolas Rialland appelle à imposer des clauses miroirs, permettant aux producteurs européens de se battre à armes égales avec leurs concurrents.

Franck Sander, président de la CGB, profite de la présence des parlementaires bas-rhinois pour évoquer le projet de loi d’orientation agricole. « Que l’agriculture soit reconnue comme un secteur majeur, donc prioritaire, c’est un point majeur. Mais il va falloir travailler davantage sur l’aspect compétitivité », ainsi que sur les prix et l’accès à l’eau. Sur le plan sanitaire, il s’inquiète de la présence, outre-Rhin, de la citadelle, vecteur d’un virus responsable du syndrome de basse richesse. Seul moyen de s’en prémunir : mettre un maïs derrière la betterave pour couper son cycle.