Dans la nuit du 19 au 20 mars, a eu lieu le trilogue sur la reconduction des mesures commerciales de soutien à l’Ukraine. Cela signifie que les représentants du Parlement européen, du Conseil et de la Commission européenne ont négocié une position commune, après que chacune de ces deux représentations se soit positionnée par rapport à la proposition de la Commission. L’enjeu est de gérer les conséquences des flux de produits agricoles en provenance d’Ukraine qui déstabilisent les marchés européens.

Le Parlement européen avait adopté une position plus protectrice des agriculteurs que le texte initial de la Commission (que le Conseil avait approuvé sans le modifier). Cette position « était perfectible mais elle était le fruit d’un compromis encourageant pour protéger les agriculteurs français et européens des distorsions intenables générées par la libéralisation des échanges avec l’Ukraine », a déclaré la FNSEA ainsi que l’AGPB, l’AGPM, la CGB et la CFA (confédération française de l’aviculture) dans un communiqué du 21 mars. Mais ce n’est pas ce qui a été négocié lors du trilogue.

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Le choix de la période de référence

En effet, si on peut se réjouir que le sucre ait été inclus dans le mécanisme de frein d’urgence qui vise à protéger les betteraviers des importations de sucre ukrainien, on peut déplorer que le seuil à partir duquel le mécanisme se déclenche soit trop haut. Alors que le Parlement l’avait fixé à environ 220 000 t, soit le volume moyen importé entre 2021 et 2023, le texte négocié en trilogue l’établit à environ 320 000 tonnes, c’est-à-dire le volume moyen importé sur les seules années 2022 et 2023 – soit celles où les échanges étaient déjà libéralisés !

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Par ailleurs, on peut aussi se réjouir que le maïs ait été inclus dans le texte comme le demandait l’AGPM. Mais dans la réalité, le maïs ukrainien ne sera taxé que si le cours du maïs américain rendu Rotterdam descend en dessous de 152 € /tonne.

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Le blé a, quant à lui, été exclu du texte, alors que le Parlement avait prévu de l’intégrer pour éviter de déstabiliser les marchés européens.

« Sans le changement de l’année de référence et sans inclusion directe du blé, cette proposition ne répond pas aux préoccupations des producteurs et reste donc inacceptable », a déclaré Christiane Lambert, présidente du Copa-Cogeca, sur le réseau social X.

Les demandes de la FNSEA

La FNSEA et ses associations spécialisées concernées demandent que la position défendue par la France, et soutenue par l’ensemble des agriculteurs européens soit adoptée, à savoir l’inclusion du blé et de l’orge dans la clause de sauvegarde automatique, la fixation de la période de référence qui détermine les contingents à droit nul sur la moyenne des importations de 2021-2022-2023, pour tous les secteurs concernés et un délai d’activation de la sauvegarde porté de 21 à 14 jours (qui permettrait d’agir plus rapidement en cas de situation dégradée).

La position adoptée par le trilogue doit maintenant être soumise au vote du Conseil et du Parlement pour être effective.

« L’exclusion du blé ou de l’orge, tout comme une période de référence 2022/2023, avec des volumes d’importation record, seraient interprétées par les agriculteurs comme une provocation, puisqu’il rendrait le dispositif quasiment inopérant » avertissent la FNSEA, l’AGPB, l’AGPM, la CGB et la CFA.

Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire semble aussi de cet avis, au moins sur la question du blé : « L’accord européen sur les importations agricoles ukrainiennes va dans le bon sens, mais les avancées obtenues cette nuit sont insuffisantes. Comme l’a rappelé Marc Fesneau, il doit inclure plus de céréales, dont le blé », a-t-elle déclaré sur le réseau social X.

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