Pourquoi avez-vous déposé ces deux propositions de loi ?
Mon idée est de formaliser le principe affiché par le gouvernement qui dit : « pas d’interdiction sans solution ».
Une première PPL redonne le pouvoir au ministre de l’Agriculture de délivrer les autorisations de mise sur le marché (AMM), suite aux avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa). Le ministre doit pouvoir trouver un équilibre entre les avis des agences françaises et européennes, et prendre en compte les apports des molécules aux différentes productions.
L’objectif est de dégager une vision commune au niveau européen, et que nos agriculteurs puissent utiliser les mêmes produits que leurs collègues des autres pays. On reviendrait ainsi à la situation que nous avions avant la loi de 2014, qui a donné à l’Anses la charge de délivrer les autorisations de mise sur le marché des produits phytosanitaires.
Je pense que le fait de redonner du pouvoir au ministre de l’Agriculture permettra aussi d’aller plus vite sur l’autorisation de nouvelles solutions, notamment les produits de biocontrôle.
Vous souhaitez aussi que l’on puisse utiliser les néonicotinoïdes autorisés en Europe?
Oui, c’est l’objet de ma deuxième PPL. La loi de 2016 relative à la reconquête de la biodiversité prévoit l’interdiction des produits contenant des néonicotinoïdes. Et celle de 2020 étend cette interdiction aux produits présentant des modes d’actions identiques à ceux de la famille des néonicotinoïdes. Ces décisions ont impacté la filière sucrière en 2020, avec une perte de 30 % des rendements au niveau national. Depuis, on n’a pas vraiment trouvé de solutions efficaces. Pour répondre à ce problème, j’ai simplement ajouté dans le premier alinéa du II de l’article L. 253-8 du code rural la phrase suivante : « sauf si leur usage est autorisé par la réglementation de l’Union européenne ». Les agriculteurs français auront ainsi les mêmes produits que les autres.
Ces deux PPL ont donc pour but de lutter contre les surtranspositions ?
Exactement. Ces propositions de loi visent à éviter des situations de surtransposition réglementaire et donc des distorsions de concurrence inacceptables. Il faut savoir que de nombreux pays européens continuent d’utiliser l’acétamipride (l’Allemagne, la Pologne, l’Estonie, la Croatie et l’Italie) et la flupyradifurone (l’Autriche, la République tchèque, la Hongrie, la Slovaquie, la Roumanie et la Finlande).
Mes deux PPL impliquent de faire confiance à l’Europe. S’il y a une reconnaissance mutuelle des règles au niveau européen, comme cela se fait pour les médicaments, l’agriculture française s’en portera beaucoup mieux.
Comment vos PPL sont-elles accueillies ?
Une trentaine de députés les ont déjà cosignées. Ils viennent des groupes Horizon, Modem, Renaissance et des LR. En revanche, le ministre de l’Agriculture n’est pas très favorable.
Quel sera le parcours de vos propositions de loi ?
Elles seront publiées sur le site internet de l’Assemblée nationale début mars. L’idée est de pouvoir les inscrire dans la loi d’orientation agricole au printemps prochain. Je sais que cela fonctionne et j’ai vérifié la solidité juridique. Avec mes
deux PPL, je propose une solution qui permettra d’affirmer les principes mis en avant dans les discours du Premier ministre.
1. Proposition de loi « visant à éviter des situations de surtransposition réglementaire et des distorsions de concurrence avec les autres États membres de l’Union européenne ».
L’article 1er prévoit de supprimer la mission de délivrance, modification et retrait des autorisations pour les produits phytopharmaceutiques actuellement dévolue à l’Anses.
L’article 2 permettra au ministre de l’Agriculture de décider de l’autorisation des molécules essentielles à la production agricole afin de prendre en compte les décisions de nos voisins européens et d’éviter des distorsions de concurrence.
2. Proposition de loi « visant à préciser le périmètre de l’interdiction des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes ».
Un article unique vise à revenir sur les décisions prises dans la loi n° 2020-1578 pour permettre aux agriculteurs l’utilisation de substances non dangereuses et qui ne sont pas interdites par les normes européennes.