Inscrite en 2014, RGT Planet semble indétrônable. En 2023, elle a représenté près de 80 % des surfaces d’orge de printemps françaises. Elle se distingue par son niveau de rendement, sa stabilité et ses grandes qualités brassicoles. Isabelle Chaillet, ingénieure en recherche et développement chez Arvalis, indique que « RGT Planet répond à tous les critères recherchés et donne entière satisfaction à la filière brassicole. »
Une concurrence variétale qui se durcit
Cependant, « dans nos essais, nous avons observé des variétés avec un rendement pluriannuel équivalent ou supérieur à celui de RGT Planet, explique Isabelle Chaillet. C’est notamment le cas de KWS Thalis (inscrite sur la liste des variétés « préférées » préconisées par l’IFBM, l’institut français des boissons de la brasserie et de la malterie), Lexy et LG Flamenco (en cours de tests industriels) également bien pourvues en calibrage et en poids spécifique (PS). » D’après l’ingénieure agronome, ces variétés récentes devraient se développer avec un avantage pour KWS Thalis. « De bons résultats agronomiques et technologiques ne sont pas systématiquement synonymes d’une hausse exponentielle des ventes, souligne-t-elle. Il convient que ces variétés apportent un plus en comparaison avec RGT Planet. En revanche, ces variétés seront suivies de près par la filière. » Autre atout pour KWS Thalis : sa faible activité lipoxygénase qui limite l’oxydation du malt durant le brassage et permet une conservation plus longue de la bière. Cette caractéristique, en plus du rendement, est très appréciée et recherchée par la filière. À suivre.
Inscrite en 2022 et en étape 1 des observations commerciales et industrielles, SY Chaska reste en retrait alors que LG Rhapsody a une productivité équivalente à RGT Planet. Plus récentes et admises en validation technologique, Sting et Magnitude retiennent l’attention de la filière brassicole pour leurs valeurs technologiques ainsi que leur rendement et leur calibrage, supérieurs à RGT Planet. « Ces variétés ne présentent, a priori, pas de défaut majeur et sont même plus tolérantes à la verse, précise Isabelle Chaillet. Cependant, ces caractéristiques, en plus de leur niveau de productivité, restent à confirmer sur plusieurs années. »
Enfin, à noter que KWS Fantex, autre variété relativement ancienne cultivée, fournit un rendement moyen proche de celui de RGT Planet et que Lauréate reste toujours cultivée malgré une productivité moins élevée que cette dernière. Lauréate, par son caractère No GN, c’est-à-dire non productrice de glycosidique-nitrile, convient parfaitement pour la distillation du whisky.
« Dans nos essais, nous n’avons pas observé de grandes disparités de comportement des variétés liées au climat », explique Isabelle Chaillet. « Nous remarquons cependant de meilleurs rendements dans les régions où l’eau n’est pas facteur limitant ce qui permet, notamment, une bonne valorisation de l’azote comme ce fut le cas en Bourgogne, dans le Loiret ou en Champagne en 2023. En revanche, en Poitou-Charentes, par exemple, les résultats n’ont pas été si spectaculaires hormis en situation irriguée », précise-t-elle.
Quid pour les orges de printemps semées à l’automne ?
« Pour pratiquer les semis des orges de printemps à l’automne, il convient de semer une variété inscrite sur la liste de l’IFBM, si possible peu sensible aux maladies. Actuellement, RGT Planet et Lauréate sont les plus cultivées sur ce créneau, constate Isabelle Chaillet. Pour rappel, les variétés d’orge de printemps semées à l’automne n’ont pas été sélectionnées pour leur tolérance aux maladies d’hiver, elles sont donc plus sensibles à la rhynchosporiose. Elles nécessitent souvent une protection fongicide supérieure à une orge de printemps semée au printemps ou à une orge d’hiver. » Pour cette raison, Arvalis préconise de ne pas semer trop tôt les orges de printemps à l’automne, voire de décaler le semis en sortie d’hiver en cas de douceur et d’humidité persistantes, favorables au développement des maladies.
Pour rappel, pour semer une variété d’orge de printemps en plein champ, celle-ci doit être validée par le CBMO (Comité bière-malt-orge) puis testée dans les pilotes IFBM (Institut français des boissons, de la brasserie et de la malterie) avant de devenir une variété en observation commerciale et industrielle puis, en cas de succès, une variété préférée. L’organisme stockeur choisit la ou les variétés d’orge de printemps en fonction de sa politique de collecte dont l’enjeu principal consiste à stocker des variétés pures sur une même aire de stockage. Il décide de son choix variétal selon les débouchés possibles, la productivité, les qualités technologiques (poids spécifique, calibrage) puis éventuellement la tolérance à la verse de la variété. La sensibilité aux maladies est peu considérée, d’une part parce qu’il existe peu de différences entre les variétés et, d’autre part, parce que le cycle de l’orge de printemps (semée au printemps) étant court, celle-ci est peu exposée à de fortes pressions cryptogamiques incontrôlables.