À 55-57 ans passés, si un jeune agriculteur ou une jeune agricultrice vous propose de racheter votre ferme, pourquoi ne pas saisir l’opportunité ? La fin d’une carrière professionnelle peut s’envisager sans être agriculteur ! En devenant salarié par exemple ?
Pierre a justement 57 ans et ses enfants ne sont pas décidés à reprendre l’exploitation. Il a contacté la Mutualité sociale agricole (MSA) pour faire un audit de sa situation professionnelle. Sa carrière professionnelle reconstituée, l’agriculteur saura alors combien d’années il lui reste à travailler avant d’atteindre l’âge requis pour percevoir une pension de retraite complète.
Dans le même temps, Pierre fera le point sur ses baux : il consultera ses propriétaires pour prendre connaissance de leurs intentions, lorsqu’il cessera d’être exploitant agricole dans 7 à 8 ans. Il pourra leur demander de prendre quelques engagements (fermage, vente etc).
« Une grande partie de la valeur de la ferme de l’agriculteur dépend de la superficie des terres que son repreneur pourra lui-même exploiter une fois installé, affirme Laurent Brun, responsable du service comptable d’Auverco, membre du réseau AgirAgri. Sans terres, son corps de ferme sera assimilable à une résidence en zone rurale ». Les bâtiments de l’exploitation seraient alors difficilement valorisables. Ils pourraient même entraver la vente du bien immobilier.
Mais 7 à 8 ans avant son départ en retraite, Pierre peut toujours acheter quelques hectares en fin de bail pour revendre une ferme économiquement viable avec des terres situées à proximité des bâtiments. Pierre les louera ensuite au repreneur.
Se porter acquéreur des terres en fin de bail
L’agriculteur pourra aussi alerter la Société d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) de son département pour se porter acquéreur des terres en fin de bail, que leurs propriétaires souhaitent vendre, afin d’éviter le démantèlement de son exploitation. La société d’aménagement foncier pourra aussi faire appel à des apporteurs de capitaux pour acheter ces terres en fin de bail.
« Ce placement foncier est peu rentable car les montants des fermages sont encadrés, reconnaît Laurent Brun d’Auverco. Mais la valeur des terres augmente régulièrement et la transmission successorale du foncier acquis sera fortement défiscalisée ».
Toujours dans la perspective de vendre sa ferme, Pierre maintiendra son outil de production viable pour qu’il soit reprenable à tout moment. Ses terres seront fertilisées régulièrement et les élevages seront conduits pour rester performants. Le repreneur doit pouvoir produire pour rembourser les prêts qu’il aura souscrits pour acheter sa ferme sans avoir été auparavant contraint de se lancer dans une phase de recapitalisation du troupeau. À cette fin, il pourrait demander des analyses de sol (NPK et matières organiques) pour s’assurer que les terres ont été correctement fertilisées.
Dans les hangars, Pierre rationalisera son parc matériel pour qu’il soit dimensionné à la taille de son exploitation. À cette fin, Pierre se séparera des machines en surnombre ou qui ne seront pas utiles pour le repreneur.
A contrario, les matériels qu’il conservera devront être connectables à des outils d’aide à la décision. Si Pierre doit remplacer un tracteur, il optera pour une machine équipée d’un GPS. Les jeunes agriculteurs travaillent avec leur smartphone en poche.
« À la retraite, le niveau de vie de Pierre dépendra au moins autant du produit de la vente de sa ferme qu’il aura placé que du montant de sa pension de retraite », avertit Laurent Brun.
Son prix de vente sera fixé en fonction de sa valeur patrimoniale, mais aussi de sa valeur économique et financière. Le repreneur doit pouvoir dégager un excédent brut d’exploitation suffisamment élevé pour rembourser ses prêts contractés, se rémunérer, investir et se constituer un fonds de roulement.
Avec son comptable, Pierre prendra aussi les dispositions fiscales nécessaires pour ne pas être imposé aux plus-values, une fois les matériels vendus puis l’exploitation cédée. Il souscrira par exemple un Plan épargne retraite (PER) pour les placer et les exonérer de prélèvements obligatoires. S’il est en société, il pourrait aussi revoir le statut de sa société pour qu’elle soit transmissible en plusieurs étapes. Rien ne l’empêche de conserver une partie du capital.