Betteravier à Achiet-le-Grand, dans le Pas-de-Calais, à 6 km de Bapaume, Julien Mahieu cultive 60 ha de pommes de terre (consommation et chips). Il les commercialise lui-même, ainsi que celles d’autres producteurs au sein de sa société Mac’Pom. « Au total, je stocke 6 000 t de tubercules, destinées principalement au marché export Italie et Espagne, explique-t-il. Soit 4 000 pallox ». Pour les refroidir et les conserver de fin août à mi-juin, l’agriculteur consomme 650 000 kilowattheures. Quatre frigos aspirent l’air extérieur dès qu’il est plus frais que l’air intérieur grâce à un thermostat automatique, pour atteindre une température de 4°C pour les pommes de terre de consommation et 8°C pour les chips.
50 000 € d’électricité
« En décembre 2021, mon fournisseur d’électricité m’a annoncé que mon contrat s’arrêtait, se souvient-il. Je devais choisir un nouveau contrat ». Face à la hausse des prix proposés, à la multiplicité des contrats et leurs complexités, Julien Mahieu contacte un conseiller indépendant. « Quand je n’ai pas les compétences, je fais appel à un professionnel », justifie le chef d’entreprise.
Avec une facture annuelle avoisinant les 50 000 €, l’enjeu était conséquent. « Mon conseiller indépendant en énergie (VSO Conseil) m’a sauvé, il a tout optimisé », reconnaît le planteur. Il opte pour un contrat Estivia d’EDF adapté pour les agriculteurs stockeurs de pommes de terre et irrigant. Ce contrat comprend des heures creuses et des heures pleines, des prix plus attractifs en demi-saison et en période estivale, garantis pendant 3 ans.
« J’ai eu beaucoup de chance en signant mon contrat d’achat d’électricité le 27 février 2022, juste avant la flambée des prix dus à la guerre en Ukraine. Ensuite, le mois d’avril 2022 resté très frais, notamment la nuit, a limité la consommation. Autre aubaine, les pommes de terre commercialisées un peu plus rapidement que d’habitude m’ont évité le stockage en juin, période chaude, plus coûteuse pour refroidir. »
Un quart des besoins produit en photovoltaïque
Mais cet épisode fait réfléchir l’agriculteur sur sa dépendance au coût d’électricité. « Les conséquences de la flambée énergétique auraient pu être dramatiques pour mon entreprise », insiste l’entrepreneur. Pour éviter ces risques, Julien Mahieu décide de produire de l’électricité en photovoltaïque. Il avait déjà fait poser des panneaux en 2012, avec 36 kw en revente totale à 22 ct/kwatt.
Début 2022, toujours aidé par son conseiller énergie, il monte un second projet de 207 kilowatt-crêtes (kWc) sur 1 000 m2. Cette fois-ci, une partie de l’électricité est utilisée en autoconsommation. « En autoconsommation, je ne peux pas réinjecter plus que mon contrat d’électricité actuel de 250 kilovoltampères », précise-t-il. Le courant produit va servir à couvrir une partie des besoins des frigos et du conditionnement en big bag. Le surplus est revendu. La production a débuté le 5 mai 2023, avec un ensoleillement record.
En 2014, lors d’un agrandissement, Julien Mahieu avait installé un transformateur de 60 000 € près de son site, au lieu d’utiliser le transformateur public. Ce qui aujourd’hui lui permet de poursuivre son développement photovoltaïque avec un troisième projet de 166 kWc, soit 800 m2 installés par l’entreprise, en fonctionnement depuis août. « Cette fois-ci, j’utilise des toitures sur la face nord. A priori, cette face produira 20 % d’électricité en moins. Mais elle permet d’optimiser le coût du transformateur, le nouveau contrat d’électricité ainsi que l’optimisation de production des trois onduleurs », dévoile-t-il.
Au total, les deux projets (373 kWc) demandent un investissement de 280 000 à 300 000 €. L’agriculteur estime son retour sur investissement entre 8 et 9 ans, selon l’ensoleillement et l’évolution du coût de l’électricité. Agé de 40 ans, il espère profiter de la production électrique plusieurs décennies, les prix actuels étant garantis 20 ans. Sa production en autoconsommation permettra de couvrir un quart de son besoin en électricité. L’électricité en surplus est revendue à 0,1287 euros/kwatt (prix premier trimestre 2023) pour le nouveau projet. « Encore une fois, j’ai eu de la chance. Le projet a pris un peu de retard et les prix ont augmenté », se réjouit-il.
Le producteur de pommes de terre apprécie aussi l’atout environnemental sur lequel il peut communiquer. Le deuxième projet mis en route le 5 mai, permettait déjà, 40 jours plus tard d’économiser 21 t de CO2 ou l’équivalent de 1 676 arbres. Ses 2 000 m2 de toiture lui laissent encore la possibilité de réaliser de nouvelles productions énergétiques à l’avenir.