Après une nette hausse en avril dernier, le marché mondial du sucre semble retenir son souffle. Il faut dire que la campagne brésilienne a commencé fort. Très fort, même. Pendant les 6 premières semaines de la nouvelle campagne, du 1er avril au 15 mai, 79 Mt de canne ont été écrasées dans le Centre-Sud : c’est 24 % de plus que l’an dernier à la même époque. Mais beaucoup estiment qu’il ne s’agit que d’une ouverture rapide, qui devrait se tasser, d’autant que le rendement est tout juste identique à celui de l’an dernier. Il n’en reste pas moins que, jusqu’à présent, 45 % de cette canne est utilisée pour produire du sucre (le reste allant à l’éthanol) : un niveau supérieur de 7 points par rapport à l’an dernier. Résultat : selon S&P, cela devrait conduire à une production, sur la campagne en cours, de 42,3 Mt, soit 3,6 Mt de plus que l’an dernier (38,7 Mt). Datagro est bien moins optimiste, anticipant « seulement » 38,3 Mt – prévoyant donc une fin de campagne décevante.
Pas de quoi modifier fortement la balance mondiale de sucre, qui reste, toujours selon S&P, à l’équilibre sur la campagne actuelle (+ 0,0 Mt) ainsi que sur la suivante (+ 0,6 Mt) – et encore, si le climat est clément. Car, ailleurs, la situation n’est pas aussi rose. En Inde, on s’attend à une production similaire à l’an passé (36,4 Mt) et en baisse en Thaïlande, par manque de surface cannière. Enfin, la campagne européenne s’annonce décevante, entre semis tardifs et craintes liées à la jaunisse.
Du coup, le marché mondial fait une pause, d’autant que les spéculateurs commencent à réduire leurs positions à l’achat : ils sont toujours nets-acheteurs en quantité forte, mais, à 7,3 Mt, la baisse est de 1 Mt sur un mois. Pas de panique néanmoins : si le sucre brut perd 4 % sur le mois de mai, le sucre blanc résiste, illustrant que la demande reste forte pour une utilisation immédiate.
Aucun assouplissement, en revanche, en Europe : le marché est toujours aussi tendu. Et si certains comptaient sur les importations en provenance d’Ukraine pour un peu de répit en fin de campagne, ils doivent s’en mordre les doigts : après avoir exporté quelque 0,3 Mt sur l’Union européenne, le pays craint pour sa propre consommation et vient de suspendre toutes nouvelles exportations jusqu’aux prochains arrachages, en octobre prochain… Dès lors, le marché n’est pas près de flancher. Le spot reste au-delà de 1 000 €/t sortie sucrerie : une valeur qui servira probablement de référence dans les négociations de vente de sucre pour la campagne prochaine, qui ouvrent en ce moment… Car ce prix, aussi élevé soit-il, ne fait que refléter le prix mondial et les disponibilités dans l’Union !