« Nous soutenons pleinement le plein accès aux ZFE-m, des véhicules flex-E85 d’origine ou convertis avec des boîtiers E85 homologués, comme un certain nombre d’autres véhicules », a déclaré Nicolas Rialland, le directeur général de la CGB, lors des Rencontre du bioéthanol qui se sont tenues le 13 avril dernier, un événement organisé par la Collective du Bioéthanol qui rassemble l’interprofession de la betterave et du sucre (AIBS) et le syndicat national des producteurs d’alcool agricole (SNPAA). « On peut quand même rappeler le double bénéfice environnemental de ce carburant », a-t-il poursuivi. En effet, si son caractère décarboné n’est pas l’objet des ZFE-m qui ciblent la pollution de l’air, le directeur de la CGB a rappelé que le Superéthanol-E85 émet justement jusqu’à 90 % de moins de particules fines que l’essence. Pour rappel, les ZFE-m sont un dispositif mis en place par les collectivités territoriales, dans un cadre réglementé par l’État, qui vise à restreindre, dans certaines zones urbaines, l’accès aux véhicules les plus polluants. Cela peut concerner notamment ceux dont la vignette Crit’Air est supérieure ou égale à 3. 11 ZFE-m sont déjà en place et 32 autres sont prévues d’ici le 1er janvier 2025, pour toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants.
Pour Bruno Millienne, député des Yvelines (MoDem) et co-rapporteur de la mission flash sur les ZFE-m, « il faut donc absolument qu’on arrive à ce que le bioéthanol (E85) se retrouve en Crit’Air 1. C’est une évidence ». Il subsiste encore des dogmes sur ce sujet mais « nous ferons en sorte qu’ils disparaissent », a précisé le député qui soutient par ailleurs que « la mise en place des ZFE-m a été trop tardive en France », en comparaison avec l’Allemagne qui a lancé ces mesures en 2002.
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La réglementation européenne pour l’après 2035
« L’éthanol est une évidence. C’est une spécificité française qui permet un véritable gain écologique tout en maintenant la mobilité », a déclaré Pierre Chasseray, le délégué général de l’association 60 millions d’automobilistes, à propos du règlement européen CO2 adopté le 28 mars dernier. Grâce à l’action de l’Allemagne (très attachée à son industrie automobile), l’ensemble des véhicules fonctionnant avec un carburant neutre en carbone, et pas seulement les véhicules électriques, seront autorisés à la vente après 2035. Mais « on attend maintenant une définition des carburants neutres en carbone », explique Nicolas Kurtsoglou, l’ingénieur responsable du carburant au SNPAA. Pour l’instant, seuls les e-fuels, des carburants synthétiques produits en utilisant de l’électricité, (très poussés par l’Allemagne) sont identifiés comme neutres en carbone. L’Italie a demandé l’ajout des biocarburants durables et la Finlande, la Suède et l’Estonie celui du biogaz. La France ne s’est pour l’instant pas manifestée et le sujet devra être tranché prochainement. Nicolas Kurtsoglou a aussi rappelé les synergies entre le bioéthanol et les e-fuels, tant à la production qu’à la consommation. D’une part, le CO2 de fermentation issu des usines de bioéthanol peut être utilisé pour produire du e-fuel en le combinant avec de d’hydrogène vert. D’autre part, les caractéristiques complémentaires de ces carburants (indice d’octane et volatilité) permettent un mélange équilibré et performant entre bioéthanol et e-fuel (respect de la norme de l’essence et démarrage à froid, par exemple). Enfin, le coût plus faible du bioéthanol tirera à la baisse le prix à la pompe d’un superéthanol issu d’un tel mélange, qui sera aussi disponible en plus grande quantité.
L’hypocrisie de la règlementation européenne
Pour Jérôme Bignon, le vice-président du SNPAA, la réglementation sur les émissions de CO2 des véhicules légers est bâtie sur un énorme mensonge, car on ne mesure les rejets de CO2 qu’à l’échappement. Or, « en Allemagne, un véhicule électrique pollue plus qu’un moteur thermique ». Il appelle donc à une vision plus large via l’analyse du cycle de vie (ACV). Bruno Millienne est aussi de cet avis. « Les Allemands ne veulent pas de l’ACV, car ils ont refusé le nucléaire sous Angela Merkel et leur électricité est très carbonée à cause du gaz et du charbon », explique le député de la majorité, sans rappeler cependant la fermeture récente par la France de la centrale nucléaire de Fessenheim et la réouverture de la centrale à charbon de Saint-Avold.
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Le bioéthanol au secours de la précarité
Que ce soit les ZFE-m ou l’après 2035, ces sujets dépassent la simple question économique. En effet, Daphné Chamard-Teirlinck, chargée de la mobilité inclusive et durable au Secours Catholique a rappelé que le transport était une cause de fracture sociale, et que les plus précaires seront les plus impactés par la mise en place des ZFE-m. Pierre Chasseray, le délégué de l’association 40 millions d’automobilistes, abonde dans ce sens. En effet, en l’absence de transport en commun adapté, les ZFE-m excluront ceux qui n’auront pas les moyens d’acheter une voiture plus récente. Pour Nicolas Rialland, le bioéthanol est une solution : l’ajout d’un boîtier homologué (à partir de 800 euros, avant déduction des éventuelles subventions), est beaucoup plus abordable que le rachat d’une voiture plus récente. De plus, le directeur de la CGB a rappelé que, ramené au kilomètre parcouru, le superéthanol-E85 est bien plus économique que l’essence classique.
Pour répondre à ces enjeux, Jérôme Bignon, le vice-président du SNPAA, appelle à un plan d’investissement : « soit on bâtit collectivement une politique cohérente avec de l’investissement, soit on laisse passer le train. Si on veut remettre des capacités de production de bioéthanol à l’horizon 2030, il faut absolument démarrer tout de suite ». Enfin, Nicolas Rialland a rappelé que la production de bioéthanol ne représente que 1 % de la SAU française, et moins de 0,7 % si on déduit les drêches et les pulpes qui sont utilisées en alimentation animale. « Il est clair qu’on en a sous le pied, mais encore faut-il que nos moyens agricoles soient préservés », a-t-il affirmé avec espérance mais vigilance.