« Un énorme décalage est observé entre les pratiques agricoles qui privilégient un semis des plantes de service à partir de la mi-août pour se donner toutes les chances de levées et ce qu’il faudrait faire pour obtenir le maximum de biomasse, c’est-à-dire semer tôt », prévient Jérôme Labreuche, ingénieur Arvalis, expert en travail du sol et intercultures.
Fraîcheur du sol versus semis précoce
C’est vrai que la règle du semis précoce reste difficile à tenir en toutes circonstances. « Si pendant un mois et demi la sécheresse sévit, les couverts semés tôt peinent », indique-t-il. Le semis à la volée avant la moisson est intéressant pour allonger le cycle de la culture. Toutefois, la levée peut être perturbée avec les chaleurs excessives, notamment en semant plus d’un mois avant la moisson : graines trop exposées en surface, concurrence pour l’accès à l’eau avec un blé qui pompe beaucoup en fin de cycle. Avec un sol sec, la plantule peut parfois se dessécher. Après la moisson, les stratégies en semis direct avec des semoirs à dents se révèlent les mieux adaptées. La paille maintenue en surface préserve l’humidité du sol. « Le plus important réside dans la qualité de semis en profitant de la fraîcheur du sol, plutôt que de se focaliser sur une date », résume Jérôme Labreuche.
Autre levier : essayer de nouvelles espèces tels le moha et le sorgho. « Semées tôt, longues à fleurir, elles font un peu le dos rond pendant les périodes de stress hydrique et redémarrent à la faveur des pluies », ajoute l’expert. La moutarde d’Abyssinie est intéressante. Positionnée sur le même créneau que le radis pour structurer le sol, elle est plus facile à détruire. Enfin, parmi les 35 espèces de couverts végétaux évaluées, huit ressortent robustes : féverole, vesce du Bengale, vesce velue, avoine, trèfle incarnat, phacélie, radis et moutarde. Le choix de ces espèces se raisonne selon la date de semis, les services attendus et la culture suivante. Arvalis, l’ITB, Terres Univia et Unilet (légumes) ont d’ailleurs élaboré la liste des espèces les mieux adaptées. Arvalis a aussi créé un un Outil d’aide à la décision (OAD) gratuit (https://choix-des-couverts.arvalis-infos.fr/).
Vesces prometteuses
En raison de son coût moins élevé, la féverole est plébiscitée pendant l’interculture. Autres espèces qui gagnent des surfaces : les vesces avec des évolutions variétales intéressantes. « Historiquement, la vesce se semait au printemps mais les semenciers ont fait un gros effort de sélection pour proposer des espèces et variétés adaptées aux semis d’été », explique Jérôme Labreuche. Des variétés de vesces velues, telle Nickel, et de vesce du Bengale, comme Bingo de Cerience, affichent de très bons résultats dans les essais Arvalis avec une vigueur de pousse. Les vesces servent aussi de base à de nombreux mélanges. Par exemple, de la phacélie peut être semée avec la vesce sur un sol frais. Si elle est plus chère que la moutarde, elle ne nécessite pas de broyage. Adaptée aux semis tardifs derrière du maïs, l’avoine mélangée à de la vesce trouve de l’intérêt : ce couvert est résistant au froid. Semée en été, cette plante peut aussi fournir du fourrage à l’automne, voire en sortie d’hiver.