« Sur la question des pesticides, le Président souhaite impulser un changement de logique et de philosophie », disait-on à l’Élysée avant l’ouverture du Salon. L’entourage d’Emmanuel Macron évoquait une nouvelle approche en matière d’usage des produits phytosanitaires et d’accompagnement des agriculteurs. L’objectif étant de « tenir la promesse de ne laisser aucun agriculteur sans solution ».
De fait, le problème des produits phytosanitaires a constitué un temps fort au Salon de l’Agriculture. Après les annonces surprises de la fin des nénicotinoïdes et de l’interdiction du S-métolachlore, le sujet était toujours brûlant. La Première ministre a donc profité de sa visite, le 27 février, pour esquisser les contours d’une nouvelle doctrine en matière de phytosanitaire, qui se traduira par un nouveau plan Écophyto. « Il y a eu beaucoup d’émotion suscitée par l’interdiction récente d’un certain nombre de molécules. Il faut qu’on change d’approche, qu’on anticipe mieux », a-t-elle déclaré.
Contrairement aux précédents plans, Écophyto 2030, qui devrait être lancé d’ici à cet été, ne comporterait a priori pas de nouvel objectif de réduction des phytos.
Accélérer la recherche d’alternatives
Le gouvernement veut anticiper le retrait éventuel des 200 substances susceptibles d’être interdites ces prochaines années afin de pouvoir trouver des alternatives, bien avant leur retrait. Le gouvernement promet de financer, par des fonds de France 2030, la recherche d’alternatives à ces produits appelés à disparaître. Les instituts techniques, l’Inrae et les entreprises de produits phyto sont appelés à mobiliser des moyens de recherche. Il s’agit en quelque sorte de s’inspirer de la logique qui prévaut dans le plan national de recherche et d’innovation (PNRI) qui accompagne le secteur betteravier, suite à l’interdiction des néonicotinoïdes… Mais cette fois-ci en anticipant, avant que les impasses agronomiques surviennent !
Christian Durlin, vice-président de la commission environnement de la FNSEA, reste prudent sur la mise en œuvre de ce plan Écophyto 2030. « Les annonces sur la non-surtransposition et l’amélioration de l’efficacité de la recherche semblent une bonne approche. Nous avons entendu des paroles, nous attendons maintenant les écrits ».
Au sujet de la gouvernance des AMM (autorisations de mise sur le marché), le gouvernement veut également améliorer la synchronisation entre les calendriers d’évaluation des agences de sécurité sanitaire française et européenne : l’Anses et l’Efsa. Mais va-t-il suivre la FNSEA qui souhaite remettre à plat le système d’évaluation des produits phytosanitaires en France, et redonner la main aux décisions politiques après que l’Anses aura rendu son avis ? En somme, revenir au système d’avant 2015, quand Stéphane Le Foll a confié les autorisations de mise sur le marché à l’Anses.
Européaniser la contrainte
La Première ministre a également annoncé que la France respectera désormais « le cadre européen et rien que le cadre européen » en matière d’interdiction de produits. Sur ce point, il est intéressant de relever la position de l’ONG Générations Futures, qui a expliqué lors d’une conférence de presse le 8 mars : « si la France avait suivi ce principe de strict respect du cadre européen en matière d’interdiction de pesticides par le passé, elle n’aurait jamais interdit certains néonicotinoïdes la première en Europe et n’aurait bien sûr pas convaincu l’Europe de la suivre sur ce terrain pour les 3 principaux néonicotinoïdes ».
Désormais, la promesse de ne pas surtransposer la réglementation européenne sera de toute façon plus facile à tenir, puisque la Commission européenne propose avec son règlement « utilisation durable des pesticides (SUR) » de réduire de 50 % les produits phytosanitaires à l’horizon 2030. Dans l’entourage du Président de la République, on se félicitait d’ailleurs avant l’ouverture du Salon que « la grande avancée obtenue par la France a été d’obtenir que le règlement sur l’utilisation durable des pesticides au niveau européen permette en quelque sorte d’européaniser la contrainte ….Et c’est pour cela qu’on est particulièrement satisfaits que le Green Deal ait pu fixer cette règle du jeu identique partout en Europe ». Le message a le mérite d’être clair. La profession agricole a encore du travail pour atteindre son objectif « pas d’interdiction sans solutions ».
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