À Sercus dans le Nord, les chips Bellevue sont déjà des stars ! Personne ne les a encore goûtées car elles seront produites, mises en sachets et commercialisées dans les toutes prochaines semaines par la famille Loingeville-Deram, à la tête de l’exploitation Bellevue de 235 ha.
Mais ces chips s’affichent sur tous les réseaux sociaux. Sur Instagram, 400 followers suivent l’avancée du projet familial. Manon Loingeville, cheffe de projet, y publie régulièrement les films qu’elle réalise pour tenir en haleine ce public assidu. Un des derniers films porte sur les 45 ha de pommes de terre cultivés chaque année par Isabelle et Nicolas Loingeville (ses parents) et son oncle Gauthier Deram, avec le concours de leurs salariés.
Un projet à 600 000 €
La cheffe de projet a collecté l’an passé 8 100 € de dons sur la plateforme de Crowfunding Mimosa auprès des 148 contributeurs avec, comme contrepartie, des sachets de chips et des goodies. Cette somme d’argent a déjà été employée à la réfection du toit du bâtiment qui abritera l’atelier de production.
Comparés au montant du projet (600 000 €), ces fonds ont avant tout une portée symbolique. Mais Manon s’appuie sur les réseaux sociaux pour promouvoir le projet familial qu’elle pilote depuis 16 mois.
Par ailleurs, la cheffe de projet a démarché des magasins de proximité pour faire connaître le projet de sa famille afin de mettre en vente les dizaines de milliers de sachets de chips, qui seront fabriqués à partir de février 2023.
La famille de Manon a décidé de se lancer dans la transformation de pommes de terre en 2019. Depuis plusieurs années, elle souhaitait développer une activité de diversification qui valoriserait une partie de la production agricole de l’exploitation Bellevue. L’enjeu était aussi de préserver l’activité des 4,5 équivalents plein-temps (les chefs d’exploitations et leurs trois salariés) qui y travaillent.
Après avoir réalisé une étude marketing, le choix s’est porté sur la production de chips. Toutefois, la crise de la Covid a compliqué et ralenti le lancement, puis la réalisation du projet agroalimentaire.
Mais entretemps, Manon a achevé ses études en marketing et, il y a 16 mois, elle s’est lancée dans la vie active en proposant à ses parents et à son oncle de prendre en main leur projet de production de chips. Il mobilisait déjà toute sa famille.
« 100 tonnes de pommes de terre riches en matières sèches seront nécessaires pour produire dès cette année 200 000 sachets de 150 grammes », explique Manon Loingeville. Récoltés au début de l’automne dernier, ces tubercules sont stockés dans le hangar de l’exploitation en attendant d’être épluchés, tranchés et frits.
Pour fabriquer les chips, un des bâtiments de l’exploitation (430 m2 au sol) a entièrement été réaménagé pour en faire un atelier de production. Il a été scindé en trois parties.
Une salle sera réservée à la réception des pommes de terre, à leur lavage et à leur épluchage. Une deuxième salle « blanche » sera dédiée à la production de chips et à leur ensachage. Les sachets seront ensuite stockés dans une troisième pièce.
Sur la ligne de production, un chaudron frira les lamelles de pommes de terre dans un bain d’huile porté à 170 °C, puis une centrifugeuse déshuilera les chips obtenues. Enfin, l’huile collectée sera recyclée dans le chaudron.
À la ferme, la production de chips mobilisera cette année 3 à 4 personnes, un jour par semaine. En conséquence, les 200 000 sachets seront produits cette année en 50 jours. Mais leur commercialisation se déroulera toute l’année. Les sachets pourront être stockés au moins six mois.
La nouvelle activité de transformation requiert les compétences agronomiques de Nicolas et de Gauthier ; elle valorisera l’expérience acquise par Isabelle lorsqu’elle était ingénieure dans l’industrie agroalimentaire et elle exploitera les connaissances en marketing digital et en hygiène alimentaire de Manon, diplômée d’un master. Évidemment, la famille sollicitera les deux salariés de l’exploitation pour produire des chips.
Trois kilos de pommes de terre sont nécessaires pour fabriquer 1 kg de chips. Le chiffre d’affaires généré par la nouvelle activité – jusqu’à 30 tonnes de chips seront produites cette année – devra être suffisant pour couvrir les frais de production, le transport, la commercialisation et, évidemment, pour rémunérer le travail d’1,5 équivalent temps plein.
La production de chips est appelée à doubler dès l’an prochain afin de réaliser des économies d’échelle nécessaires pour amortir les investissements réalisés et être rentable.
Les premières chips seront naturelles, juste salées. Manon et ses parents se fourniront en huile de tournesol auprès d’un fabricant français. Une fois trouvé, ils contractualiseront une partie de sa production.
À l’avenir, Manon prévoit de développer une gamme de chips variée en s’appuyant sur certaines productions locales.