« La France est le premier exportateur mondial de pomme de terre. Il est important de garder cette place », a lancé Geoffroy d’Evry, président de l’Union Nationale des Producteurs de Pommes de Terre (UNPT), suite à son assemblée générale du 10 janvier dernier.
En 2022, la croissance des surfaces de pommes de terre s’est poursuivie (+ 1 % à 152 520 ha), poussée par l’appétit de l’industrie de la transformation. Beaucoup de pommes de terre partent vers la Belgique pour revenir en France sous forme surgelée.
Il y a une demande forte des industriels. Des études montrent que l’on aura besoin de près de 2 Mt supplémentaires de pommes de terre dans deux ans en Europe. Or, c’est en France que les industriels viendront les chercher. Comme les Belges Clarebout (qui s’installe à Dunkerque) et Aviko (qui va mettre en route sa nouvelle usine à Poperinge).
Sur le territoire national, McCain continue son développement, tout comme la filière chips avec Intersnack (Vico) et Altho (Brets). « Il y a une guerre entre industriels pour sécuriser leur approvisionnement », complète Guillaume Lidon, directeur de l’UNPT. Les transformateurs ont « faim » des pommes de terre !
Gestion de l’eau
Les producteurs devront accompagner cette demande des filières frite et chips. Comment y parvenir ?
Tout d’abord « inciter les producteurs à poursuivre la culture de pommes de terre », répond l’UNPT. C’est-à-dire en sécurisant leurs moyens et leurs outils de production, comme c’est le cas avec l’irrigation qui, dans les Hauts-de-France, a pris énormément de retard. Or, on l’a vu l’été dernier, l’irrigation peut compenser en partie le stress hydrique, en aidant la plante à conserver un feuillage fonctionnel. « Nous sommes inquiets de possibles restrictions à venir. La culture de la pomme de terre, avec des niveaux de rentabilité économiquement viables, ne pourra se faire sans une réelle gestion de l’eau dans les territoires », insiste Geoffroy d’Evry.
L’UNPT s’inquiète également de la question du maintien des produits phytosanitaires. « Nous ne voulons pas être dans la même situation que la filière betteravière, avec le retrait de matières actives sans solution de remplacement », déclare le président de l’UNPT.
Les coûts de production explosent
Les producteurs pourront répondre à la demande si l’on met fin à l’explosion des coûts de l’énergie, qui menace les producteurs-stockeurs. 80 % de la production de pommes de terre de consommation sont en effet stockés sur des périodes allant de plusieurs semaines à plusieurs mois, entre 4 °C et 8 °C. La température est devenue un facteur d’importance suite à la disparition des anti-germinatifs.
Les coûts de production ont augmenté de l’ordre de 25 à 30 % par rapport à la campagne 2021-2022, sans compter l’explosion des coûts énergétiques de stockage, avec une hausse moyenne de + 500 % des prix de l’électricité pour les contrats proposés en 2023 pour les puissances au-dessus de 36 Kva. Un stockeur en groupe froid (frigo), relié à une puissance supérieure à 36 kVa, verra en moyenne son coût de stockage à la tonne passer de 9 € à 42€/t. Pour rappel, les stockages de pommes de terre ont une capacité moyenne de 2 000 tonnes selon l’UNPT. « Notre demande est claire : nous voulons une extension du bouclier tarifaire pour toutes les exploitations agricoles raccordées à des puissances supérieures à 36 kva », insiste Geoffroy d’Evry.
La hausse historique des coûts de production à l’hectare, corrélée à la baisse de rendement inédite (le plus faible depuis 27 ans), fait figure de double peine et impacte la trésorerie des exploitations. Heureusement, les nouveaux contrats signés avec les industriels ont pris en compte ces hausses des coût. C’est notamment le fruit de la loi EGalim sur la non-négociabilité de la matière première agricole qui s’applique seulement à la filière industrielle. « Cette loi a quand même permis de répercuter une partie des coûts de production. Mais il eût fallu une bonne récolte », analyse le président du UNPT qui, dans ce contexte, reste prudent sur la poursuite du développement des surfaces en 2023. D’autant que l’UNPT souhaite aussi garantir les équilibres des débouchés entre la pomme de terre destinée au marché du frais, de l’industrie et de la fécule.
Total : 6,04 Mt
Marché du frais : 1,2 Mt
Export : 3,2 Mt (dont 1,4 Mt pour le frais et 1,8 Mt pour la transformation)
Transformation en France : 1,3 Mt
Fécule : 800 000 t