En prévision de la suppression des néonicotinoïdes, l’Anses, l’agence nationale de sécurité sanitaire, a proposé en mai 2021, 22 solutions alternatives à ces insecticides controversés. Mais contrairement à ce qui se dit dans la presse grand public, leur efficacité n’est pas prouvée.
À court terme, l’Anses recommande l’utilisation du Movento et du Teppeki, des insecticides déjà utilisés et qui ont montré leurs limites en 2020. Ensuite, l’agence invite les agriculteurs à pailler les semis de betteraves (2,5 t de paille / ha) et à les fertiliser avec des produits organiques de type lombricompost, tout en diminuant globalement les apports d’azote. Au-delà de l’efficacité de ces pratiques qui reste discutable, plusieurs questions se posent : la mise en œuvre et du coût de ces solutions, la disponibilité du lombricompost et les impacts sur la croissance de la betterave d’une faible disponibilité en azote.
À moyen terme, l’agence recommande 4 autres molécules insecticides que les firmes phytosanitaires elles-mêmes ne jugent pas suffisamment opérantes sur le puceron vert. Trois produits de biocontrôle sont aussi mis en avant. L’un est jugé inefficace sur le Myzus persicae par son fabricant et les essais réalisés sur les deux autres par l’institut technique de la betterave (ITB) aboutissent à des résultats insuffisants. Même constat pour les huiles ainsi que les micro et macro-organismes recommandés, dont l’efficacité serait nulle, faible ou très hétérogène en conditions réelles. Les stimulateurs de défense des plantes sont en cours de test, mais rien ne dit encore qu’ils auront une réelle utilité.
Dans les essais menés par l’ITB, les graminées utilisées en plantes compagnes diminuent la population de pucerons de 35 % en moyenne. Toutefois, au regard du rythme de reproduction des pucerons verts et de la capacité virulifère d’un seul individu, cela apparaît insuffisant. Sans compter que le coût et la complexité de l’itinéraire cultural risquent fort de décourager les planteurs. Enfin, les bandes fleuries recommandées abritent certes des auxiliaires, mais leur rayon d’action est faible. Peut-on alors se permettre d’y consacrer une part importante de chaque parcelle ?
La génétique semble être, pour l’instant, la principale solution mais, à ce stade, la productivité des variétés dites tolérantes à la jaunisse apparaît insuffisante, tant en l’absence qu’en la présence de jaunisse pour assurer la rentabilité de la culture, d’autant plus que le défi consiste à rendre ces variétés tolérantes aux trois familles virales responsables des symptômes de jaunisse.
L’ITB note cependant qu’en raison du manque de références bibliographiques sur la betterave, les solutions identifiées par l’Agence sont issues d’essais réalisés sur d’autres cultures ou bien testées sur d’autres espèces de pucerons, avec des résultats obtenus le plus souvent en conditions contrôlées (sous serre notamment). Par ailleurs, on peut noter que l’impact économique n’a pas pu être évalué. C’est pourtant une étape essentielle avant de pouvoir déclarer ces solutions comme viables.
Une bonne partie de ces solutions sont en cours d’évaluations dans le cadre du PNRI.
L’ITB a réalisé une analyse complète des propositions faites par l’Anses ; elle est disponible ici.
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