L’ensemble des marchés des commodités se détend. En net repli, leurs prix demeurent toutefois bien plus élevés qu’avant la période Covid. Mais surtout, les marchés agricoles ont appris à fonctionner en ne comptant plus vraiment sur l’Ukraine pour les approvisionner. Par ailleurs, l’Australie s’apprête à réaliser une nouvelle campagne commerciale au moins aussi bonne que la précédente. Selon le site du département australien de l’agriculture Abares, la production de blé serait 36,6 Mt. Le chiffre de 40 Mt est même avancé. Les trois évènements climatiques consécutifs La Niña ont apporté au printemps des pluies abondantes. Elles ont favorisé la croissance des cultures, mais une bonne partie du blé récolté serait de qualité fourragère. En attendant, l’île-continent serait en mesure d’exporter 26 Mt de blé, voire 30 Mt si la production de blé est finalement de 40 Mt. La production d’orges n’est pas en reste. En récoltant 13,4 Mt, l’Australie serait en mesure d’en vendre 9 Mt à des pays tiers.
Par ailleurs, la Russie vend massivement, en ce début d’année, le blé qu’elle n’est pas parvenue à écouler au cours des six premiers mois de la campagne de commercialisation actuelle. Mi-décembre dernier, le site russe Sevecon.ru mentionnait une production de blé finalement estimée à 105 Mt, soit 26,6 Mt de plus qu’en 2021. Le pays pourrait potentiellement exporter jusqu’à 45 Mt de blé mais, au mois de décembre, moins d’un tiers avait été expédié!
Le blé russe vendu moins de 250 € la tonne et la force retrouvée de l’euro ont tiré à Rouen le cours de la tonne de la céréale sous le seuil de 300 €. Le seuil a été franchi plusieurs fois ces quatre dernières semaines.
Mais si la baisse des prix des céréales se poursuit dans les prochaines semaines, les céréaliers français et européens vont vendre leur prochaine récolte à perte.
En attendant, les exportations européennes de blé restent très dynamiques car l’Union européenne (UE) est un partenaire commercial fiable. Au cours des six premiers mois de la campagne actuelle, l’UE a expédié 13,7 Mt de blé selon la Commission européenne. Jusqu’à 34 Mt pourraient être exportées selon le Conseil international des céréales.
Toutefois, les exportations européennes d’orges marquent le pas. Seules 4 Mt ont été vendues depuis le 1er juillet 2022, contre 9,5 Mt la campagne passée. En cause, la Chine qui n’importerait que 9,2 Mt d’orges d’ici la fin de la campagne, soit 3 Mt de moins qu’en 2020.
Mais surtout, l’empire du milieu a fait le choix d’acheter au Kazakhstan l’orge dont il a besoin. « Son intérêt pour l’orge kazakhe est en partie alimenté par les risques liés à la poursuite de l’exploitation des ports maritimes ukrainiens », explique Ukragroconsult (UAC). Or, ces deux dernières saisons, l’Ukraine avait été l’un des trois principaux fournisseurs d’orge de la Chine – 25 % des achats – tandis que le Kazakhstan n’avait représenté que 2 % des importations chinoises.
Perçée du Kazakhstan
En fait, le Kazakhstan réalise une très bonne campagne commerciale à l’export. En ayant récolté 22,5 Mt de grains l’été dernier, le pays exportera 10,5 Mt de blé et d’orges, selon UAC. L’essentiel des grains est vendu à des pays frontaliers ou situés sur les rives de la mer Caspienne. Souvent imprévisible, l’empire du milieu n’a pas joué les oiseaux de mauvais augure sur les marchés des céréales lorsque les prix flambaient. Or, vu la dimension de son marché intérieur, le moindre achat de grains porte systématiquement sur plusieurs millions de tonnes.
Mais la Chine, embourbée dans sa crise sanitaire de la Covid, n’importera que 44,8 Mt de grains selon le fonds souverain China Investment Corp (CIC), soit 17 Mt de moins qu’en 2020-2021 ! Chaque année, ses productions de céréales sont meilleures et l’empire du milieu ponctionnera dans son stock pléthorique de maïs (188 Mt) une partie des grains qu’il consommera en plus cette année.