L’évolution de la conjoncture économique mondiale inquiète davantage que celle du conflit engagé par la Russie sur le sol ukrainien. Les prévisions de production revues à la baisse par l’USDA ont laissé les marchés pantois. Pourtant, le département d’État américain pour l’agriculture n’estime plus la production ukrainienne de maïs qu’à 27 Mt, soit 4,5 Mt de moins que le mois passé.
En fait, les marchés céréaliers tendent vers un nouvel équilibre axé sur une offre mondiale de céréales (y compris celle de riz) déficitaire de près de 30 Mt durant toute la campagne et sur le retrait partiel de l’Ukraine de la scène internationale.
En revanche, les opérateurs constatent que la Russie est pressée d’écouler sa récolte pléthorique de blé. Sur les marchés, la quantité de grains disponible à la vente est très importante.
Le retour des fondamentaux
Or, la consommation mondiale 2022-2023 de grains faiblit. Toutes céréales confondues, celle-ci serait inférieure de 5 Mt aux dernières prévisions du mois passé et même de près de 31 Mt à celle de la dernière campagne.
Aussi, les cours des céréales n’ont pas cessé de se replier tout au long du mois de novembre. À Rouen, le prix de la tonne de blé ne valait plus que 301 € le 7 décembre dernier. Il a baissé de près de 50 € en un mois. La hausse de l’euro de 6 % en un mois a accéléré la baisse des cours.
Les nouvelles parvenant d’Amérique n’ont eu aucun impact sur les prix. En Argentine, la récolte de blé (12,5 Mt) n’en finit pas d’être revue en baisse (- 3 Mt en un mois, -10 Mt sur un an) et au Canada, 33,8 Mt de blé auraient été moissonnées, alors qu’une récolte de 35 Mt était encore annoncée le mois passé.
Mais à ce jour, personne n’est en mesure de savoir comment la levée d’une grande partie des barrières sanitaires impactera l’état de santé des Chinois et la conjoncture économique de leur pays dans les semaines à venir.
En Ukraine, la nouvelle baisse de 4,5 Mt de la production de maïs annoncée par l’USDA n’étonne pas les quelques visiteurs qui s’étaient aventurés dans la région d’Uman au mois d’octobre dernier. En effet, des milliers d’hectares de maïs n’étaient pas encore récoltés, alors que les pluies rendaient les terres impraticables.
Interrogés, les agriculteurs affirmaient ne pas avoir les moyens de payer le séchage de leurs récoltes. Le prix du gaz était trop cher. À 130 €/t sortie-ferme, le cours du maïs ne couvre pas les coûts de production. Aussi, une partie des plantations de maïs passera l’hiver en l’état, séchera sous des températures glaciales pour être ensuite récoltée avant le dégel. Mais les céréaliers déploreront d’importantes pertes.
Un bilan européen mitigé
Cependant, l’Ukraine parviendrait à exporter 17,5 Mt de maïs, soit 2 Mt de plus qu’annoncé le mois passé car les expéditions par voies terrestres et maritimes sont de plus en plus fluides. De même, 12,5 Mt de blé seraient aussi vendues (+ 1,5 Mt en un mois).
Selon Ukrainian Agri Council, 1,14 Mt de céréales a été expédiée le mois passé par le rail. La plus grande quantité de céréales (242 000 t) a été transportée via la gare d’Izov située à la frontière polonaise. En cinq mois, l’Ukraine en guerre est ainsi parvenue à vendre 5 Mt de maïs à l’Union européenne. Mais les vingt-sept ont seulement expédié 13,9 Mt de blé et 2,7 Mt d’orges vers les pays tiers.
Quatre pays ont acheté plus d’un million de tonnes de blé européen chacun. L’Algérie, premier client, a même importé 2 Mt. L’Arabie saoudite est en tête des pays importateurs d’orge européenne. Elle a acquis 1 Mt de grains, loin devant la Chine (440 000 t ; -1,55 Mt sur un an). Sur des volumes plus réduits, l’UE a vendu du blé dur aux Émirats arabes unis (63 000 t), à l’Algérie (60 000 t) et à la Tanzanie (48 000 t).