À la toute fin septembre, l’analyste S&P a mis à jour ses estimations de bilans mondiaux pour la campagne qui vient d’ouvrir (2022-2023), et revoit à la hausse son excédent mondial. Après 3 campagnes déficitaires, qui ont vu les stocks chuter de 8,2 Mt, l’excédent pourrait atteindre les 3 Mt : un niveau conséquent.
C’est avant tout sur trois pays que se concentrent des prévisions à la hausse.
Le premier, c’est évidemment le Brésil. Même si cela reste une gageure de prévoir les rendements du pays pour sa future campagne qui ne commencera qu’en avril prochain, l’analyste prévoit que le débouché sucre sera privilégié, en anticipant un moindre intérêt pour l’éthanol. Résultat : le pays produirait environ 38 Mt de sucre, soit 2 Mt de plus que cette année. Vient ensuite la Thaïlande, dont la prochaine campagne ouvrira dans 15 jours. Le pays parviendrait à dépasser les 11,5 Mt, un niveau qu’il n’avait pas atteint depuis 3 ans, avant tout parce que les pluies ont été abondantes pendant la phase de croissance de la canne. C’est sur le même argument climatique que la production pakistanaise est vue au-dessus des 9,2 Mt, un niveau encore jamais atteint dans ce pays dont les surfaces en canne sont en hausse de 10 %, du fait de prix domestiques du sucre historiquement élevés. Le pays compenserait ainsi les baisses prévues en Inde, dont le volume de sucre dépasserait néanmoins les 38 Mt, donc au coude à coude avec le Brésil, mais où la part de canne allouée à l’éthanol va croissant, en raison du plan gouvernemental en faveur du carburant vert.
Et pourtant, le marché ne tremble pas. Car, dans le même temps, le pétrole retrouve des couleurs : il a pris 12 % sur la dernière quinzaine, et dépasse à nouveau les 95 $/baril. De quoi chambouler les prévisions d’allocation de la canne, entre sucre et éthanol, au Brésil ? D’autant plus selon la manière dont la monnaie brésilienne évoluera après le second tour de la présidentielle, quand on voit le soubresaut qu’il a connu au premier tour !
D’autant que les disponibilités actuelles restent limitées sur le marché mondial : nos stocks actuels sont à leur plus bas niveau depuis 5 ans. D’ailleurs, les spéculateurs restent froids, et ne sont toujours que très légèrement nets-vendeurs (1,5 Mt).
Attention cependant au réveil : la dernière fois que le Pakistan et la Thaïlande s’étaient réveillés simultanément, c’était en 2017-2018, et l’on se souvient encore de la crise que cela avait entraînée sur les marchés mondiaux !