Une petite annonce dans un journal en 2020. Voici comment Hervé Foulloy est devenu fournisseur de combustible pour sa mairie. La municipalité de Conchy-les-Pots recherche alors un agriculteur fournisseur de miscanthus. « J’ai appelé le maire et tout s’est enchaîné », se souvient-il.
La municipalité avait opté pour un chauffage à base de miscanthus pour son projet de 1 200 m2 : un centre de santé au rez-de-chaussée, l’école à l’étage, la mairie et un logement. Les élus voulaient une énergie locale, durable et économique. Soit un besoin de 40 à 50 t/an. La production annuelle de miscanthus varie de 10 à 20 t/ha dans les meilleures terres, avec une durée de 20 ans. « J’ai proposé de planter 4 hectares de cette graminée. Pour établir le contrat de 15 ans, nous avons été accompagnés par la chambre d’agriculture. Avec une base 2020 de 125 €/t rendue mairie, indexée sur le prix du fermage », dévoile l’agriculteur. Un choix qu’il ferait différemment aujourd’hui, vu l’évolution du prix de l’énergie.
Un circuit très court
« J’ai vu cette culture comme une opportunité pour valoriser une parcelle difficile », détaille l’exploitant qui cultive 280 hectares. Elle s’ajoute à un assolement déjà très diversifié. En non-labour depuis 15 ans, les cultures de printemps permettent de limiter le salissement des parcelles. « En diversifiant les cultures, le nombre de matières actives utilisables s’accroît également, avec des modes d’action différents et complémentaires », complète l’agriculteur picard. La betterave garde aussi sa place pour cet éleveur de 50 vaches allaitantes salers et engraisseurs des taurillons. La ration de base s’appuie sur les pulpes déshydratées. Planteur de Saint-Louis Sucre et de Tereos, il s’inquiète cependant de l’évolution du coût de ce produit.
Hervé Foulloy a dû renoncer à la première parcelle où il envisageait de planter l’herbe à éléphant. Refus du propriétaire. Il saisit alors l’opportunité de valoriser une parcelle à faible potentiel, infestée de graminées résistantes. Malgré un sol sableux, elle dispose cependant d’une réserve utile suffisante. Autre atout, sa proximité avec le hangar de stockage. La faible densité du miscanthus (8 m3/t) nécessite d’optimiser le transport. Avec 2,5 t de miscanthus dans sa benne de 20 tonnes ! Enfin, la disponibilité d’un hangar de stockage a facilité le projet. Au final, la production du miscanthus et son lieu de stockage se situent à moins d’un kilomètre des logements à chauffer. Le nec plus ultra du circuit court ! Et un gain de temps pour Hervé qui approvisionne le silo de la chaudière, soit environ un chargement par semaine pendant l’hiver.
… Et économique
La plantation constitue la charge la plus conséquente, environ 3 500 €/ha. Hervé Foulloy a fait appel à Novabiom. Seule intervention pour l’agriculteur, un traitement au glyphosate avant la levée. Il n’apporte ni engrais de fond, ni azote. Même si certains préconisent d’apporter une centaine d’unités de potasse, 50 de phosphore et d’azote tous les cinq ans. La récolte par ensileuse est l’unique charge opérationnelle.
La première année, la production reste faible (de 4 à 8 t/ha). La graminée produit réellement à partir de la deuxième année. L’énergiculteur compte sur 10 t/ha, soit une marge brute de 1 000 €/ha pour une terre à potentiel limité. Sachant qu’une production de 15 t/ha équivaut à 7 000 l de fioul.
La mairie a investi 100 000 € dans une chaudière biomasse Heizomat. À cela, il faut rajouter le coût du silo. Un investissement à mettre en rapport avec le coût total du projet de 2 M€. En 2021, le chauffage au miscanthus a permis d’économiser la moitié de la facture de combustible par rapport au fuel. En 2022, l’économie sera encore bien plus conséquente vu l’explosion des coûts des carburants fossiles. Reste que le paramétrage de la chaudière n’est pas évident au début et que le suivi demande un peu plus de surveillance qu’une chaudière au fuel (descendrage une fois par mois…).
Si Hervé Foulloy n’a bénéficié d’aucune aide, certaines subventions sont possibles : Pass Agri filière en Hauts-de-France, pour l’implantation du miscanthus, certains PCAE (plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles) pour l’achat de rhizomes ou du stockage. Autre possibilité pour les exploitations situées sur des bassins d’alimentation de captage, les aides des agences de l’eau. Enfin, pour ceux qui choisissent de dépoussiérer ou d’ensacher, certaines régions apportent des subventions. Les valorisations en paillage ou alimentation animale s’avèrent plus lucratives, mais demandent plus de temps. Hervé Foulloy se félicite de son choix, pour une culture peu chronophage, qui valorise le rôle des agriculteurs.
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