Baptiste Gatouillat s’en souvient encore : François Baroin, alors député, était venu expliquer son travail de parlementaire aux élèves de son école. Le garçonnet était loin de s’imaginer qu’une trentaine d’années plus tard, ce même François Baroin, devenu patron des Républicains dans l’Aube, viendrait le solliciter pour succéder à Gérard Menuel, le député sortant, lui-même ancien agriculteur, qui a décidé de ne pas se représenter. L’actuel maire de Troyes avait eu l’occasion de le croiser, et de l’apprécier, lors de réunions professionnelles. Aujourd’hui âgé de 38 ans, Baptiste Gatouillat éprouve à l’égard de ce double parrainage (il a aussi le soutien de Gérard Menuel) un sentiment de « fierté » et y voit un signe de « reconnaissance » pour tout le travail accompli au sein des Jeunes Agriculteurs, dont il a été le président aubois, puis le vice-président national de 2016 à 2020.
Nul doute que les JA, qu’il décrit comme une « superbe école de formation », lui ont permis d’affirmer son goût naturel pour l’organisation, pour le débat et la confrontation d’idées, y compris avec ses professeurs lorsqu’il fréquentait le lycée agricole de Sainte-Maure, puis celui de Saint-Pouange. Pas très fan de l’école, il s’est arrêté au BTSA, même si l’idée de poursuivre des études d’ingénieur l’a effleuré. Il aurait pu tout aussi bien être mécanicien ou boulanger, deux activités qui lui plaisaient, lui qui voulait de toute façon exercer un métier manuel. Dès lors, pourquoi chercher plus loin que la profession d’agriculteur, sa « passion » première et sa « vocation » originelle ; pourquoi aussi ne pas marcher dans les pas de ses parents ? « Après trois années comme salarié dans un élevage, j’ai repris une partie de l’exploitation de mon père en 2006 quand celui-ci a pris sa retraite, et je l’ai réunie avec l’exploitation de ma mère pour créer l’EARL Les Masures à Dierrey-Saint-Pierre. Je suis au moins la quatrième génération d’agriculteurs dans la famille ». L’exploitation fait aujourd’hui 240 ha.
« Quand on s’engage, on s’engage »
Parallèlement à ses activités professionnelles, Baptiste Gatouillat a donc exercé des fonctions syndicales, suivant en cela l’exemple de sa mère. Ses mandats lui ont permis d’aborder de multiples sujets, comme l’environnement, les grandes cultures, les États généraux de l’alimentation, la communication ou l’économie. Mais le dossier qu’il a « adoré » a trait à la gestion des risques, et il a ressenti un sentiment de « victoire » lorsque la loi sur les aléas climatiques a été adoptée en 2022, sur la base d’un travail entamé en 2016 par les JA. Un avant-goût de ses futures missions ? Baptiste Gatouillat a déjà eu l’occasion de participer à des commissions parlementaires ou d’enquête, sans jamais toutefois pénétrer dans l’hémicycle. Il avoue « s’intéresser depuis toujours à la politique », et même avoir vaguement songé un jour à devenir député, mais pas au point cependant de franchir le pas en devenant maire de sa commune comme son paternel par exemple, ni de militer au sein d’un parti ou d’être encarté. Mais ça, c’était avant que Les Républicains ne viennent le solliciter pour porter les couleurs de la droite et du centre droit, ce qui l’a décidé à prendre son adhésion car, dit-il, « quand on s’engage, on s’engage ». Il s’est d’ailleurs mis en réserve de la chambre d’agriculture de l’Aube, dont il est l’un des vice-présidents, tout en conservant ses fonctions de président de Végellia, un organisme technique aubois.
« Pragmatisme et bon sens »
Son engagement sera placé sous le sceau du « pragmatisme » et du « bon sens », des valeurs qui lui sont chères, et du respect de l’autre, car « il faut savoir écouter pour prendre les bonnes décisions ». Il ne sera pas un opposant par principe — s’il est dans l’opposition —, étant par exemple capable de dire du bien de la loi Egalim 2. Ce qui lui importe, c’est de défendre la ruralité en général et son territoire en particulier, même si la circonscription dans laquelle il se présente empiète sur la ville, traçant une diagonale entre Troyes et Nogent-sur-Seine. « Mon programme s’articule autour de quatre axes : l’économie, la santé, la sécurité et la formation », précise le candidat. Son souhait : « que les gens soient fiers d’avoir des élus qui les représentent, même s’ils ne font pas tout bien ». Une mesure phare à prendre ? « La simplification administrative et la baisse des charges ». Son rêve ? « Que tout le monde ait un revenu décent pour vivre de son travail ».
Baptiste Gatouillat a bien conscience que sa vie risque de basculer au soir du 19 juin. La décision de briguer un mandat de député a été prise après plusieurs jours de réflexion et de discussion avec ses proches. Rodé par plusieurs années de syndicalisme chronophage, l’agriculteur connaît les sacrifices qu’un mandat électif implique. Il a pris l’habitude de se faire remplacer sur l’exploitation durant ses absences par la banque d’entraide. Cette fois, il sait qu’il devra embaucher un salarié. Mais il ne renoncera pas pour autant à gérer sa ferme, ni même à monter sur le tracteur quand l’envie et le besoin s’en feront sentir. L’Aubois veut rester un député de terrain au contact des réalités. « Pour être un bon élu, il faut garder les pieds sur terre ». Foi de paysan.
Baptiste Gatouillat qui livre 32 hectares de betteraves à la sucrerie d’Arcis-sur-Aube (groupe Cristal Union), prédit « un bel avenir à la filière betterave ». Il faut dire que l’agriculteur aubois se dit d’un « naturel optimiste » qui l’incline « à voir toujours les bons côtés, même dans les moments difficiles ».
« Le contexte est porteur, les prix sont plutôt bons, on a retrouvé un niveau de marge satisfaisant, et on a des usines performantes qui nous appartiennent », se félicite-t-il.
Quoiqu’il faudrait à son goût « mettre davantage en valeur le sucre français ». Il s’interroge aussi sur l’arrêt des néonicotinoïdes à l’horizon 2023 : « la génétique va-t-elle nous apporter la solution ? »
Lui qui martèle le slogan « pas d’interdiction sans solution », pense qu’il faut « investir dans la recherche ».